Magazine Politique

Sarkozy, les socialistes lui disent merci

Publié le 15 mars 2012 par Pslys

Pour un peu, ils triompheraient mais c’est formellement interdit par le chef à six semaines du premier tour. Avec son ultimatum à la renégociation des accords de Schengen et des traités commerciaux de l’Union, Nicolas Sarkozy a ouvert une brèche européenne dans laquelle les socialistes n’ont pas perdu une minute pour s’engouffrer dimanche. Eux que le chef de l’Etat traite d’irresponsables parce que François Hollande veut, s’il est élu, revoir le pacte budgétaire européen tout juste adopté par 25 pays de l’Union européenne sur 27 pour y ajouter un volet croissance et emploi. C’est même à cause de cette volonté de renégocier ce «traité d’austérité» que les dirigeants conservateurs de l’Europe lui fermeraient la porte au nez.

«En parlant de renégocier Schengen – une mesure appliquée au Danemark par la droite soutenue par l’extrême droite avant qu’elle soit balayée par la gauche, Sarkozy donne raison à François Hollande : les traités européens peuvent être renégociés»
, se félicite Jean-Christophe Cambadélis, chargé des relations internationales au PS. «Nicolas Sarkozy qui nous pilonnait sur notre volonté de revenir sur un traité pas encore ratifié et voilà qu’il veut tout renégocier en Europe», renchérit le porte-parole de campagne Bruno Le Roux. «Avec tout ça, Merkel va bientôt appeler Hollande», plaisante (à peine) Manuel Valls.

Avant même le discours du candidat de l’UMP, François Hollande répliquait sur le mode serein, dans les colonnes du magazine allemand Der Spiegel. «Si le peuple français valide ma position, celle-ci devra être entendue par les autres pays», y explique le candidat à l’Elysée. «Pour cette raison, je voulais avertir suffisamment tôt les autres chefs d’Etat. On va devoir m’écouter», prévient Hollande, qui a exposé dimanche matin sa vision de la politique française de défense: pas mal d’Otan et beaucoup de défense européenne. Et sa démonstration de force à lui, loin de la bataille de chiffres sur les participants du meeting de Villepinte, a consisté à faire asseoir sur le même rang Lionel Jospin et Michel Rocard.

Hollande: Sarkozy prend l’Europe comme «bouc-émissaire»

Sur M6, en début de soirée, Hollande a estimé que son adversaire de droite était dans une «fuite en avant», prenant l’Europe pour «bouc émissaire» parce qu’il ne «peut pas présenter d’autres propositions aux Français».
«Il y a là une façon de faire qui ne peut pas être comprise par les Français», a jugé le socialiste. «Pourquoi le président sortant n’a-t-il pas été capable de faire des ajustements puisqu’il était le président de l’Union européenne et du G20? Et comment pourrait-il me faire le reproche de mettre en cause un traité dont l’encre est à peine sèche quand lui veut même suspendre sa participation à l’Union européenne» sur certains dossiers, a souligné Hollande. Au final, il s’est dégagé de Villepinte «une curieuse impression», selon le député de Corrèze: «ce n’était ni l’expression de la fierté de ce qu’il avait fait ni la présentation de ce qu’il nous propose» pour l’avenir.

Sur le fond, s’en prendre aux accords de Schengen sur la libre circulation des personnes, prouve aux yeux de Benoît Hamon que le président sortant a choisi de faire sa campagne «sur les même axes que les droites dures européennes: immigration et islam». Avec acidité, le porte-parole du PS salue la volonté de Sarkozy de mettre en place «une forme de protectionnisme européen alors qu’il a combattu sa toute sa vie politique et encore plus ces derniers mois». Vise-t-il à attiser les divisions européennes parmi les socialistes, six ans après la victoire du «non» au traité constitutionnel? «Il n’y a plus de plaies au PS donc il ne peut pas remettre du sel dessus. Des désaccord sur l’Europe, on n’en aura pas pendant la campagne», promet le héraut de la gauche du parti.

Sarkozy devant ses partisans, a refusé de «laisser la gestion des flux migratoires aux technocrates et aux tribunaux». Pour Harlem Désir, «Nicolas Sarkozy vient de faire passer son discours stigmatisant de la scène nationale à l’échelle européenne: les chômeurs, les assistés, les syndicats, les immigrés». Verdict du député européen: «il continue sa triste course poursuite avec le Front national».

Et pour ce qui est de prôner un «Buy European Act», les socialistes l’ont proposé pour la première fois en 1993 par la voix d’Elisabeth Guigou. L’idée a ensuite été portée par la Fondation Jean-Jaurès et vantée par Arnaud Montebourg dans son traité sur la «démondialisation». Bref, résume la porte-parole Delphine Batho, «aucune proposition pour venir en aide aux Français, une mauvaise compil» des discours précédents. Pour le sénateur-maire de Dijon, François Rebsamen, Nicolas Sarkozy s’est livré à «un exercice d’amnésie, comme si pendant 10 ans il avait vécu ailleurs et découvrait tout d’un coup des problèmes dont il est le principal responsable».


Retour à La Une de Logo Paperblog