Quelles leçons pour l'histoire?
Les débats sont restés toutefois dans des proportions mesurées et dans des cercles scientifiques restreints et on ne peut que s’en féliciter. Mais ils touchent pourtant bien à la parole narrative, ou pour mieux dire à la médiatisation des patrimoines. S’agit-il de mettre en perspective contradictoire les histoires nationales, d’identifier les épisodes glorieux de l’histoire d’une nation en opposition aux autres, ou encore de dresser des murs identitaires à partir de l’idée de frontières ? Ce type de question ne pouvait que se poser, en raison par ailleurs de l’enquête nationale sur l’identité française qui a été menée et de l’accumulation d’un certain nombre de discours protecteurs concernant la question du contrôle de l’entrée et de la circulation des immigrés au sein de l’Union Européenne. Tout est lié en ce qui concerne la manière dont le statut et la place de l’autre, de l’étranger est prise en considération.
Les immigrés ont-ils affaire directement avec l’histoire celte de la France pour y trouver des ancêtres ? Les résidents européens séjournant en France ont-ils à se voir décerner leur titre de séjour à partir d’une leçon sur le pré-carré de Vauban ? Comment va-t-on mettre en perspective l’histoire récente des quartiers dits chinois de Paris et le quartier de la Goutte d’Or, ou encore à partir de la place des harkis et de la participation des soldats venus des anciennes colonies françaises aux deux Guerres Mondiales, au sein de l’armée nationale ?
Exposition La France en relief. Le public cherche les fortifications sur la carte de l'IGN Work in progress
La poursuite du travail peut bien entendu seule nous donner la réponse. En ce début d’année, les fondations de la Maison de l’Histoire de France ont été posées par Décret du 1er janvier. Maryvonne de Saint Pulgent en a été nommée directrice une semaine à peine après que le Ministre français de la Culture ait mis en place le Comité Scientifique le 12 janvier. La Directrice avoue au journal Le Monde : «C'est le quatrième (établissement public) que je préside, après la Caisse nationale des monuments historiques et des sites (actuel Centre des monuments nationaux), l'Opéra-Comique et l'Institut géographique national. Je ne suis pas historienne, je n'ai pas sollicité le poste, je n'ai ni feuille de route ni ordre de mission, j'ai vu le ministre très rapidement", confie-t-elle, regrettant "le débat malheureux sur l'identité nationale qui a pollué la discussion. Le projet s'en démarque très nettement. J'arrive dans un esprit de collaboration. On devrait pouvoir trouver une position commune et réconcilier la communauté des historiens ».
Une première exposition de grande ampleur sur «La France en relief : Chefs-d'œuvre de la collection des plans reliefs de Louis XIV à Napoléon III» s’est déroulée de mi-janvier à mi-février.
Elle a eu un grand succès. Ce sera l’objet d’un prochain post.
Bodo von Borries. “Multiperspectivity” – Utopian Pretensions or Feasible Fundament of Historical Learning in Europe? in Joke van der Leeuw-Roord (ed.), History for Today and Tomorrow: What does Europe mean for School History? Hamburg, Körber Stiftung. 2001.
Jean-Pierre Rioux. La France perd la mémoire, Paris, Perrin, 2006.
Max Gallo. L’Âme de la France, Paris, Fayard, 2007
Robert Stradling. Multiperspectivity in history teaching: a guide for teachers. Document du Conseil de l’Europe, 2009.
Pierre Nora. Historien public. Gallimard. 2011.