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254ème semaine de Sarkofrance: le référendum anti-Sarkozy peut-il commencer ?

Publié le 17 mars 2012 par Juan
254ème semaine de Sarkofrance: le référendum anti-Sarkozy peut-il commencer ? Rien n'est jamais gagné, surtout en politique. Mais cette semaine, Nicolas Sarkozy voulait croire qu'il allait terrasser le destin que d'aucuns lui promettaient pour cette élection présidentielle.
Il voulait croire et faire croire que cette semaine serait celle de tous les retournements, que le référendum contre sa personne n'aurait pas lieu le 6 mai prochain.
Nous eûmes donc droit à nouveau story-telling, une construction médiatique de haut-vol, un montage qui ne changeait rien mais devait tout changer.
Enthousiasme forcé
Le bilan du Monarque était soudainement bon: « le meilleur tremplin de Sarkozy, c'est son bilan » lança Valérie Pécresse. En réalité, rien n'avait changé. Le chômage s'aggravait toujours, et surtout chez les seniors. Le déficit budgétaire restait abyssal. La dette publique avait bien dépassé les 1.700 milliards d'euros. La croissance était atone. La fraude sociale chez les entreprises était massive. Tout comme la précarité. Un ménage sur deux consacre près de 20% de son budget à son logement. Des mal-logés manifestaient encore la semaine dernière quand la CAF de Paris décida de supprimer des allocations logement à des foyers reconnus prioritaires DALO. Tout juste l'envolée du prix de l'essence devenait-elle un sujet politique...
A l'étranger, ce n'était guère mieux. La Syrie était toujours le théâtre de massacres de civils, un an de guerre civile. La Grèce n'était pas sauvée, malgré les grandes déclarations sarkozyennes d'il y a 10 jours. Le FMI s'est inquiété de sa sortie de la zone euro. Et l'on parle de prolonger de deux ans le mandat des commissaires européens présents sur place.
Cette semaine, il fallait surtout croire que l'opération reconquête avait débuté: le meeting de Villepinte serait gigantesque. Nous eûmes les 40 à 80.000 participants dans une salle qui n'avait que 30.000 places debout. Nicolas Sarkozy serait convaincant dans l'émission Paroles de Candidat. Le candidat sortant allait enfin dépasser son rival socialiste dans les intentions sondagières de premier tour. Dès lundi soir, quelques 30 personnes sondées firent effectivement une différence suffisante pour placer Sarko devant Hollande. Nicolas Sarkozy serait charismatique et vibrant vendredi à Recy. Nicolas Sarkozy serait souriant et charmant sur Europe1 mercredi matin. Jeudi, François Hollande allait perdre son face-à-face face à l'énergique copain de Ziad Takieddine et futur candidat à la présidentielle de 2017. Vendredi, le Monarque martelait encore: « Si le peuple de France décide que la majorité silencieuse refuse le diktat de la pensée unique, refuse les scénarios écrits à l’avance, refuse qu’on lui impose des idées dont elle ne veut pas, alors je vous le dis, oui, on va gagner. »
Et l'ex-frontiste Guillaume Peltier relayait les éléments de langages: « la peur de perdre et l’envie de gagner sont en train de changer de camp ». Tout comme Xavier Bertrand, toujours ministre du Chômage, qui releva « un sentiment de peur, une pression dans le camp de Hollande ».
Ils l'avaient écrit, prédit, promis. Sarkozy l'avait fait.


Médias soulagés
Quelques éditorialistes se frottaient les mains. Le match aurait quand même lieu. Les instituts de sondages se régalaient. On parlait de leurs enquêtes matin, midi et soir, et même entre les deux
Vendredi, c'était le pompon. De Funès était à Meaux devant quelques centaines de partisans. Sa maquilleuse l'avait repoudré, Sarkozy semblait presque orange et surtout aux anges. Il se moqua de François Hollande. Il l'accusa de vouloir faire la guerre au dictionnaire puisque le candidat socialiste avait proposé la suppression du mot race de la Constitution. L'annonce datait de deux mois, mais Sarkozy était en retard. Il ne voulait pas discuter des 60 propositions de Hollande, il voulait nier, ridiculiser, empêcher le débat. Les termes de riposte contre Hollande n'étaient pas sur le fond mais toujours sur l'homme. On aurait du sourire. Nicolas Sarkozy était cet homme agité, incapable de maîtriser ses nerfs, dangereusement narcissique, souvent psychologiquement fragile.
Le soir, il était au Grand Journal de CANAL+, pour deux heures d'émission. « Ce soir, Sarkozy reçoit l'équipe du Grand Journal » commenta un intrenaute sur Twitter. Un autre s'inquiéta de la mort de l'émission. Mais l'important était ailleurs: le Monarque esquiva tous les sujets. Son échec ? La faute à la crise. La France aurait mieux résisté. Aucun journaliste ne contesta. Il confirma avoir découvert, au bout de 5 ans, que ses amis du CAC 40 présents au Fouquet's ne payaient pas d'impôt sur les sociétés, s'indigna Ségolène Royal.
Il fut ignoblement cynique jusqu'à regretter Jean-Marie Le Pen père contre sa fille Marine. Au moins avec le père, déclara-t-il, « il y avait une histoire, une perspective, une culture ».
Il fut insultant quand, après la diffusion du Zapping quotidien, il fit cette comparaison outrancière concernant l'un des représentants de Florange: « Entre l'agité de la CGT et l'accro au sexe, on fait de la publicité à ce qu'il y a de plus extrémiste. La vraie vie, ce n'est pas ça »
Outrances
Alors, ça y est. Il a gagné. Serait-ce fini ? 
Bien sûr, la réalité était tout autre.
Dimanche, on ne connaissait toujours pas le programme de Nicolas Sarkozy. Interrogé 10 jours avant, il avait pourtant promis qu'il le livrerait à l'occasion de son « mega-meeting ». Où est donc passé le programme de Sarkozy ? C'est le mistigri de cette campagne
Lundi, Nicolas Sarkozy traita Laurence Ferrari de porte-parole de Kadhafi. La journaliste avait gagné ses galons d'indépendance. Il n'avait pas supporté qu'elle l'interroge sur le financement de sa campagne de 2007 par le clan Kadhafi. Le médecin personnel de Ziad Takieddine, brouillé avec ce dernier, avait confié que de nombreux voyages et contacts avaient eu lieu en 2005/2007 entre Sarkozy, Guéant, Takieddine et le pouvoir libyen. A la clé, un juteux contrat de vente d'équipement d'espionnage de la société Amesys, et, n financement occulte de la campagne Sarkozy. Mediapart avait lâché sa nouvelle petite bombe lundi matin. Le montage financier passait par les Bahamas.
Mardi, certains réagissaient à la proposition de la veille, imposer les exilés fiscaux sur leurs revenus mondiaux. Comme toujours, on se demandait pourquoi Sarkozy-le-gauchiste n'avait pas fait voter la dite mesure quand il était président. Ses services de campagne se sont rapidement fait communiquer les adresses emails des Français expatriés pour les spammer d'un email rassurant.
Mardi, nos partenaires européens, y compris allemands, n'en revenaient toujours pas de chantage sarkozyen de sortir de l'espace Schengen sans durcissement des frontières. « Qui est le candidat de l'extrême droite en France, Le Pen ou Sarkozy ? » s'inquiéta Guy Verhofstadt, l'actuel président du groupe libéral au Parlement européen. Le WallStreet Journal s'interrogea sur « Nicolas Le Pen ».
Sarkozy, lui, traitait les écologistes d'EELV de « forme de secte ». Une outrance de plus. L'homme débloquait sans doute.
Violences
Mercredi matin, Nicolas Sarkozy était tout en connivence souriante sur Europe1. Les questions n'étaient plus gênantes. Il avait fait oublier une autre de ses matinales, sur RMC voici 6 jours, où il avait confié qu'il arrêterait la politique le 7 mai prochain en cas de défaite électorale.
Jeudi, le candidat sortant avait refusé de recevoir les représentants CFDT et CGT des salariés d'Arcelor-Mittal de Florange. Des CRS avaient accueillis au gaz lacrymogène les quelque 200 ouvriers venus spécialement de Lorraine. Le symbole était terrible. C'était encore un choc de la France réelle contre la France fictive . Le « candidat du peuple » s'échappa rapidement pour visiter une fonderie dans la Marne, non sans avoir expliqué à des micros impatients que ces métallos n'étaient pas de « vrais salariés ». Il traita un journaliste de couillon. Il aimait rudoyer certains journalistes de temps à autre pour attirer l'attention.
Le même jour, il lança son idée du jour, étendre le congé parental (sans solde) jusqu'aux 18 ans de l'enfant. La belle arnarque !
Vendredi, nous savions qu'il n'y aurait que 10 candidats. A droite, le paysage s'était éclairé. 
En l'espace de 6 mois, Nicolas Sarkozy avait débranché Jean-Louis Borloo (qui boudait en coulisses), Frédéric Nihous (ravi d'incarner la ruralité), Hervé Morin (rescapé du naufrage), Christine Boutin (toujours du côté du manche), et même Dominique de Villepin (qui s'attendait pourtant à un miracle républicain). 
Ami sarkozyste, tu es là.


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