Associations A suivre (Ivry), Les Amis de la Terre, Attac Ivry-Charenton,
CLCV-Ivry, Passerelles (Ivry), Rudologie & co (Ivry), avec le soutien du CNIID.
Collectif 3R (Réduire, Réutiliser, Recycler)
c/o Anne Connan
100 rue Molière- At.09
94200- Ivry-sur-Seine
Paris/Montreuil/Ivry-sur-Seine, le 10 juin 2010
Observations à consigner dans le registre de l’enquête publique sur le centre de traitement des déchets de Romainville
1) Remarques de forme
En tant qu’associations ayant participé activement au Débat Public sur la reconstruction du centre de traitement des déchets d’Ivry-Paris XIII, un autre projet porté par le Syctom, nous tenons en premier lieu à exprimer nos regrets les plus vifs quant au manque de communication et de transparence relatifs à l’enquête publique concernant le centre de traitement des déchets de Romainville.
Il ne s’agit bien entendu pas de la même procédure administrative, mais cela ne saurait justifier les
possibilités de consultation du dossier extrêmement limitées, et la durée bien trop courte de l’enquête publique, qui rendent difficiles toute appropriation citoyenne des éléments présentés à la population.
2) Remarques de fond
Sur le principe de la future usine de Romainville consistant à capter le méthane contenu dans les
déchets pour en faire du biogaz, nous sommes de premier abord séduits, mais plusieurs problèmes se posent :
1) La technologie du Tri-Mécano-Biologique n’est pas satisfaisante dans son fonctionnement, eu
égard à son coût, au découragement du geste citoyen de tri « à la source », et surtout à son manque de fiabilité.
• En effet, il est trompeur de laisser entendre que les résidus d’un processus de TMB-méthanisation pourront être utilisés à des fins agricoles.
Vus les taux extrêmement faibles de captage des déchets dangereux diffus sur le territoire du Syctom, il est plus que probable que le compost contiendra des éléments indésirables (type résidus de lingettes hygièniques, qui sont un type de déchet en constante augmentation ces dernières années et qui contaminent particulièrement facilement les déchets organiques que le TMB tenterait d’isoler à partir des ordures ménagères résiduelles et).
Les expériences françaises de TMB n'ont jusqu’à présent pas fait leurs preuves (en Val d'Oise, une installation met en décharge les organiques extraits par ce procédé car ils sont pollués.. et ne passent pas les normes des composts – pourtant laxistes).
En outre, le fait de produire un compost à la norme française NF U 44-051 est loin d’être garant de l’innocuité pour les sols et la santé, car cette norme autorise jusqu'à 2% de verre et métaux et 1,1% de plastiques, soit pour un mètre cube de compost, jusqu'à 5 kg de verre/métaux et 2,7 kg de plastiques, comme le note 1 l’association France Nature Environnement .
• Par ailleurs, l’ADEME observe que « La production d’un compost conforme aux exigences
réglementaires à partir d'ordures ménagères résiduelles impose vraisemblablement des investissements plus lourds et une performance renforcée des installations qu’une production de compost à partir de biodéchets collectés sélectivement » . Le projet présenté par le Syctom se trouve très précisément dans ce cas de figure pointé par l’ADEME.
Une cinquantaine de projets de TMB émergent actuellement en France au moment où dans la plupart des pays européens bien plus en avance que le nôtre, on freine ce type de projets, comme le note un article paru sur le site www.eitb.com, « en Allemagne, deux TMB ont fermées en 2007, (…) au Royaume Uni, la réflexion est plus portée sur une plus grande sensibilisation au "tri sélectif à la base", permettant de ne pas avoir à agrandir le parc actuel des TMB, (…) en Belgique, le coût de fonctionnement se montre au final plus élevé que l'incinération, freinant d'autant son développement, et incitant de fait à une forte campagne médiatique pour obtenir des habitants une forte responsabilisation quant au tri sélectif à la base, (…) la Catalogne constate aujourd'hui "une faible efficacité des TMB", et incite à un "accroissement de la collecte sélective" ».
2) Il est prévu que les éléments non méthanisables (fraction combustible résiduelle) soient 3
incinérés dans l’usine d’incinération d’Ivry-Paris XIII . Nous rappelons que la priorité n’est pas
à l’incinération mais au recyclage matière, notamment des papiers, cartons et plastiques.
Nous pensons qu’une grande partie de ces déchets « combustibles » sont en réalité recyclables (plastiques, cartons) et devraient faire l’objet de collectes sélectives. Il faut pour cela que le Syctom et ses communes membres investissent davantage dans la promotion du geste de tri auprès de l’ensemble des sources collectées dans le cadre du service public, à savoir les ménages mais aussi les artisans, petits commerces et activités de services.
3) Par ailleurs, la contribution du TMB méthanisation à la lutte contre les changements
climatiques est elle réelle ? Dispose-t-on notamment d’études chiffrées indépendantes sur la
question de savoir si la méthanisation des cartons et papier (versus leur recyclage) évite des
émissions de CO2 ?
Nous considérons que la méthanisation est acceptable sous 4 conditions :
qu’elle n’ait pas recours au TMB mais à un tri sélectif à la source. En effet, la méthanisation ne doit pas aller à l’encontre des priorités absolues que constituent la prévention des déchets, la promotion des collectes sélectives et le recyclage.
que les unités de méthanisation soient de petite taille. Pour rappel, le procédé de méthanisation était pratiqué dans de nombreuses fermes au début du 20ème siècle... c'est un procédé facile à maîtriser dans de petites installations. Dès lors, pourquoi chercher à en faire d'immenses centrales. Pour les petites à moyennes installations un tri hydraulique peut être une option plus fiable que le TMB (voir par exemple la méthanisation sélective de Microferma) que les déchets méthanisés soient à 100% organiques, pour obtenir un résidu utilisable comme compost ; ou bien, qu’elle concerne des « déchets ultimes » qui seraient de toute façon mis en décharge, car il est alors pertinent de les « stabiliser » pour en capter le méthane et avoir ainsi des décharges neutres de émissions de GES (ce qui se fait en Allemagne).
Il faut aussi garder à l'esprit qu'une façon bien moins coûteuse de gérer les déchets organiques, c'est
le compostage de proximité, qui demande à être promu et accompagné de façon plus audacieuse que
les actuelles expériences pilotes sur le territoire du Syctom.
Nous demandons donc au commissaire enquêteur chargé de cette enquête publique de rendre un avis défavorable à ce projet, en tenant compte de nos observations.