J-33. Personne n’échappe à l’odeur de souffre qui agite le pays et accompagne les joutes verbales des candidats à la présidence de la république . On en serait presque à se demander quel coup sordide va encore sortir du chapeau, celui qui assommera à coup sûr l’adversaire et permettra de rafler la mise. Autant dire le coup de grâce. Aujourd’hui, toute la politosphère se rue à Toulouse pour se faire voir et commenter une actualité dramatique, mais qui aurait peut-être connu un autre éclairage en dehors de l’actuelle période électorale. Il s’agit une nouvelle fois de secouer l’opinion publique avec un sempiternel «plus jamais ça». La bonne vieille recette du tout sécuritaire qui a permis à l’actuel monarque et son prédécesseur d’accéder au Graal a toujours bien cours.
Ainsi, quelques vies ont encore basculé sous la barbarie ce matin, devant une école. L’acte est ignoble, monstrueux, abjecte, mais autant le dire tout net, il me semble que ce drame deux ans plus tôt, n’aurait pas eu un tel retentissement et une telle emprise médiatique que celle constatée actuellement. Bien d’autres malheureusement ont été touchés par des tragédies épouvantables sans que cela ne soucie ou ne déplace un quelconque personnage politique. Mais là, falcons et cameras chauffent…
L’opinion publique peut s’indigner et les raisons ne manquent pas. Elles sont chaque jour un plus nombreuses, mais paradoxalement, les réactions sont de moins en moins vives. Depuis quelques temps maintenant, on constate une sorte d’apathie entrecoupée par de maigres soubresauts maladroits ou réduits par un gazage de bon aloi si besoin.
Aujourd’hui, l’opinion publique est presque blasée, personne ne bouge plus. Tout est permis, tout est possible. Des propos ouvertement xénophobes prononcés par des personnalités de l’Etat en exercice, des collusions à peine dissimulées avec les dictateurs, les mafias et le monde de l’argent pour des menus besoins personnels, un peu de sang sur les mains, un peu de favoritisme et d’arrangements par-ci par-là, beaucoup de gourdin pour qui ne gagne pas 5.000 euros par mois, tous passe, tout glisse avec un facilité déconcertante. Même le droit de grève a été bien encadré, et personne, hormis une poignée d’irréductibles, n’a bronché. Un petit matin brun…
En ce jour sombre, je ne peux m’empêcher de penser à toutes ces petites phrases assassines sur les autres, sur la stigmatisation de catégories de personnes, en désignant des communautés entières comme trop différentes. En laissant dire, on a banalisé des propos inadmissibles. On s’étonne ensuite quand des illuminés passent aux actes.
Je suis sidéré par cette société amnésique et moutonnière, nourrie en perfusion et à haute dose par TF1, le tiercé et le nouveau smartphone à la mode… A la veille de se présenter à nouveau devant le suffrage universel, le petit excité, toujours sans projet digne de ce nom, fait feu de tout bois et rebondit sur tout pour secouer une population amorphe, et même l’actualité la plus abjecte peut lui apporter un éclairage un peu plus favorable. Raconter et promettre tout en son contraire dans le même discours, même après 5 ans d’exercice du pouvoir suprême, flirter sans arrêt avec la ligne jaune de la xénophobie, de l’exclusion et de «l’humainement supportable» n’est pas nouveau. C’est le seul domaine ou il excelle, avec les résultats que l’on sait.
Qui sème la haine récolte le feu. Non, vraiment, plus jamais ça.
C’est dérisoire, mais je pense aux victimes, à leurs familles, à leurs proches.