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50e anniversaire des accords d’Evian

Publié le 20 mars 2012 par Copeau @Contrepoints

Les accords d’Evian, une erreur à de nombreux titres, révélateur de la malédiction qui a frappé le peuple français depuis des siècles : les gens croient à l’Etat, et au chef d’Etat. Le chef est omniscient, omnipotent, il prend en mains toutes les décisions dans tous les domaines.

Par Jacques Garello.

50e anniversaire des accords d’Evian

Groupe des Six chefs du FLN en 1954 (Copyleft, Ministère Algérien des Moudjahidine)

Je vais cette semaine vous dispenser de mes commentaires sur la campagne électorale, car je crois que vous aurez compris que n’importe qui raconte n’importe quoi, et peu importent les convictions des candidats, s’ils en ont : l’essentiel est d’aller chercher les électeurs chez les autres, et pour ce faire de perdre une partie de ses électeurs naturels.

Puisqu’on va « fêter » le 19 mars leur cinquantième anniversaire, je voudrais tout d’abord vous rappeler ce qu’ont été les accords d’Evian. Ce qui a été montré ces jours-ci dans les films, les débats télévisés, la presse écrite, est loin de donner une image fidèle des circonstances dans lesquelles ces accords ont été signés.

Ils n’ont pas été signés parce que l’armée française avait perdu la guerre, puisqu’elle l’avait gagnée. Ils n’ont pas été signés avec des « interlocuteurs valables », mais avec des terroristes. Ils n’ont pas été signés par des représentants de la population, ni même des troupes du FLN, mais par un gouvernement « provisoire » en exil. Ils n’ont pas été signés au nom de la population algérienne, car elle avait fait le choix de la France aussi longtemps que le gouvernement a laissé croire qu’il avait fait le choix de l’Algérie Française.

Après les accords, les première dissonances : une semaine plus tard, le 26 mars, des troupes françaises tirent sur la foule des Pieds Noirs assemblée rue d’Isly à Alger. Les Pieds Noirs ont compris : ils fuient. Le 8 avril 1962, les accords d’Evian sont approuvés par referendum soumis aux Français par 90 % des votants. Le 1er juillet 1962, un autre referendum, destiné cette fois-ci à la population algérienne, propose l’indépendance, acceptée à 99 % des suffrages. Le 5 juillet est le jour officiel de l’indépendance de l’Algérie, c’est le jour du massacre d’Oran, et c’est le début d’une épuration qui coûtera la mort de plus de 100.000 harkis et 10.000 pieds-noirs enlevés par le FLN. Les geôles françaises se remplissent : 10.000 prisonniers politiques sur le territoire de la France à la fin de l’année, quelques fusillés…

50e anniversaire des accords d’Evian

Le bilan des accords d’Evian est assez dramatique :

1° L’Etat français a refusé d’assurer les personnes et les biens des Français de toutes origines et de toutes conditions. Un million de personnes ont quitté leur pays, leur maison, leur passé. 2° Dix millions de personnes de souche nord-africaine ont été livrées à un régime totalitaire et corrompu, qui a persuadé la jeunesse que les Algériens avaient vaillamment battu les Français – un sentiment plus tard partagé par les « beurs » de la seconde génération.

3° Avec la ruine économique et les nouveaux modes de vie, la population algérienne a été multipliée par cinq. La situation a poussé un nombre croissant d’Algériens à émigrer vers la France, alors même que l’on avait laissé croire à la population française que l’indépendance marquerait la fin de l’immigration.

4° Les richesses pétrolières et minières ont été perdues pour la France, l’organisation commune des régions sahariennes (OCRS) prévue à Evian n’a jamais été mise en place.

On se fait aujourd’hui un devoir d’acheter du gaz et du pétrole algériens à un prix fixé par le cartel constitué avec les Russes.

5° Un pays riche en énergie et en matières premières, avec une agriculture très développée, et un trésor touristique inégalé en Afrique, est aujourd’hui parmi les plus pauvres du monde, et fait appel à la Chine pour amorcer un développement impossible, faute de liberté économique.

6° L’indépendance de l’Algérie a effacé le projet d’une Eurafrique fondée sur les complémentarités entre le Nord et le Sud. Par contraste est né un axe Est-Ouest qui a rapproché l’Algérie du bloc communiste de l’Est dans un premier temps, puis du Moyen Orient islamique actuellement.

Et tout cela pourquoi ?

Parce que le Général avait un grand projet pour la France : la mettre à la tête d’un troisième bloc, capable d’équilibrer communisme et capitalisme. Les « non alignés » devaient se rallier à la France. Le discours de Pnom Pehn était explicite sur ces points. Mais De Gaulle ne pouvait réaliser son projet que s’il mettait fin à la guerre « coloniale ».

Voici qui m’amène à la conclusion. Bastiat disait « Il y a trop de grands hommes dans le monde, trop de gens se mettent au-dessus de l’humanité pour la régenter, trop de gens font métier de s’occuper d’elle ».

Les peuples libres n’ont besoin ni de guides, ni de généraux, ni de savants pour les gouverner. Les « visionnaires » sont en réalité des gens qui ont une courtevue. Une malédiction a frappé le peuple français depuis des siècles : les gens croient à l’Etat, et au chef d’Etat. Le chef est omniscient, omnipotent, il prend en mains toutes les décisions dans tous les domaines.

Aujourd’hui les projets des candidats chefs sont assez flous pour que personne n’y croie n’y s’y arrête. En se concentrant ainsi, la vie publique se dégrade, et le fossé se creuse entre la société politique et la société civile, dont on peut se demander ce qu’il en reste après des années, voire des siècles d’étatisme invétéré.

Alors, ces jours-ci, amis lecteurs, vous allez entendre dire tout et son contraire à propos des accords d’Evian, mais dans l’ensemble le « devoir de mémoire » sera remplacé par un devoir d’amnésie. Je me suis fait un devoir de dire ce que j’avais en mémoire, pour l’avoir vécu, et intensément. Mais je l’ai fait pour vous dire aussi de ne pas céder à la nostalgie ni à la résignation. Le progrès de l’humanité s’est fait par une série d’erreurs et d’essais. Les accords d’Evian ont été une erreur. La monarchie française est une erreur. Faisons l’essai de la démocratie, pas celle qui nous autorise à voter quand on nous le demande, mais celle qui permet de protéger la vie, la liberté et la propriété de toute personne humaine.

Sur le web

En complément, nous vous proposons l’article de Michel Leter pour Contrepoints paru le 19 mars 2012.


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