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Le piège est en place

Publié le 23 mars 2012 par Alteroueb

Je ne sais pas pour vous, mais personnellement cette semaine a été malsaine, avec un horrible arrière-goût âcre et permanent de vomi. Je n’ai jamais aimé cette ambiance de curée, ou la populace se masse frénétiquement devant son poste de télévision pour ne rien rater de l’effrayant mais fascinant spectacle. Pour les faits, face à l’horreur pure, il y avait de quoi être retourné par tant de haine et de sauvagerie. Mais ce n’est pas tout. Pour ne rien vous cacher, le malaise et l’odeur venait également du traitement médiatique de cette affaire et du gain potentiel que le pouvoir actuel pourrait en retirer.

5 ans de gachis, avec Toulouse en point d'orgue...
Ce dégoût tarde à passer. Même les contenus des blogs des copains cette semaine, pourtant si brillants d’habitude, m’ont paru fades et creux, comme si eux aussi restaient scotchés, assistant incapables à l’habillage gouvernemental de l’évenement, à la confiscation habile de l’attention des futurs électeurs. La campagne présidentielle n’a pas été suspendue pour tout le monde de la même manière, et l’UMP a fait feu sur tout ce qui bougeait alentour sans discernement et sans état-d’âme. A la manière Merah.

Ce n’est pas le moment de faire une pause. Il faut vite se ressaisir et fourbir ses armes parce que l’effet Merah peut produire des conséquences dévastatrices pour l’avenir entier du pays. Ce dramatique épisode est du pain béni pour notre monarque en talonnette qui se demandait bien comment déplacer le débat sur l’aspect sécuritaire sans aide extérieure, sans un fait scabreux bien concret comme la fort opportune affaire Papy Voise en 2002 ou l’émeute causée par le contrôle musclé d’un voyageur, Gare du Nord le 27 mars 2007. Outre le message et l’impact des crimes abjectes commis ces derniers jours, il y a surtout l’omniprésence télévisuelle jour et nuit de Toto 1er ou l’un de ses sbires, se posant là comme le seul gardien des valeurs et de l’ordre, le pompier salvateur, alors que cela fait 10 ans qu’il souffle patiemment sur les braises. Vous avez dit suspension de campagne ?

Au moment de tirer un certain nombre d’enseignements d’un tel drame, le naturel est revenu au galop pour annoncer comme pour chaque fait divers une brouette de nouvelles lois, dont quelque chose qui ressemble à une nouvelle charge sur l’internaute butineur, dans la grande tradition de ce qui se fait déjà depuis 10 ans. Ce qui voudrait donc dire que LOPPSI, DADVSI, LCEN et consoeurs passées ou à venir comme ACTA seraient inefficaces ou n’iraient pas assez loin dans l’intrusion ? Lire serait ainsi devenu un délit ? Suis-je un dangereux terroriste parce qu’il m’arrive, dans ma veille internet et d’actualité, de passer sur des sites de ce type ? Sous le fallacieux prétexte de dire non à la barbarie, au mieux, cela ressemble à un nouvel grossier effet d’annonce, une nouvelle gesticulation, comme celle d’imposer les exilés fiscaux… Au pire, il s’agit d’une manœuvre pour obtenir, sans passer par les processus démocratiques, un contrôle complet de l’internet du pays. Et dans ce cas, traquer l’islamiste sur la toile serait bien le cadet des soucis du président-candidat. L’islamiste lui est bien trop utile, il ne va pas s’en priver comme cela, aussi bêtement… A plus d’un titre, le piège est bien en place.

J’aimerais tant que les français ne soient pas dupes une nouvelle fois. La première, c’était en 2007, au sortir des 5 ans d’agitation et d’affairisme à la tête de tous les ministères pour faciliter son dessein présidentiel. L’excuse consistant à clamer qu’on ne savait pas n’avait déjà aucune validité. Pour 2012, il y a un bilan. Celui d’un président en plein exercice. Il est consistant et désastreux. Il n’a protégé le pays ni de la crise, ni de la violence, et favorisé plus qu’il ne le dit le communautarisme, le sectarisme, le radicalisme, le ressentiment, l’exclusion, la méfiance des autres jusqu’à la crainte. Incontestablement un beau projet de société. Aujourd’hui, on ne le sait que trop. Surtout, ne retombons pas dans ce piège grossier une seconde fois.

Le changement, c’est maintenant.

PS : je retombe à l’instant sur un vieux billet, écrit au lendemain de la tragédie d’Oslo. C’est fou ce qu’il est encore d’actualité. Je dois être un peu devin…


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