Magazine

Chindôgu ou l'Art d'innover inutilement

Publié le 12 mars 2008 par Marianne Dekeyser @IDKIPARL
On sait la méditation silencieuse profondément ancrée dans la culture japonaise. Celle-ci a été largement vulgarisée depuis via le concept de "zen", ce détachement de toute agitation du monde.
Plus récemment, sous l'impulsion de l'alter consommation, le concept zen est même devenu synonyme de "simplicité" dans les esprits : se transformant en véritable art de vivre et de penser.

Mais qui sait qu'au pays du Kaizen on a aussi le sens du pied de nez ?
Pour dénoncer la tyrannie de la société de consommation qui encourage à acheter des gadgets inutiles, utilisables mais pas toujours utiles, Kenji Kawakami, une sorte de Naomi Klein japonais, a créé le
Chindôgu dans les années 80. Il dirigeait alors un magazine de consommation à Tokyo, Tshuhan Seikatsu. C'est dans les pages de ce magazine que le chindôgu est né.
Le Chindogû, en résumé, c'est l'art de créer des gadgets absurdes et inutiles pour simplifier la vie de tous les jours : «Il s'agit d'un gag visuel au-delà du langage. Un objet dramatiquement drôle, car il résout un problème mais en engendre un autre plus compliqué», explique Dan Papia, président de la Société internationale de chindôgu.
Vous voulez être étonné, rire ou vous interrogez ? Pour voir plus d'exemples de réalisations chindogoiesques, cliquez
ici

Pour bien comprendre le concept et l'art subtil et très sérieux du chindôgu, voici les 10 préceptes edictés par son association internationale :

  1. L'inutilité tu rechercheras : un chindôgu ne peut être utilisé , l'invention doit être (presque) complètement inutile. Si un chindogu devient utile et employé par tous, vous avez échoué: allez faire breveter votre produit!
  2. Lui donner une existence tu t'évertueras : un chindôgu doit exister, vous ne pouvez l'employer mais vous devez le construire. Pour être inutile, il doit d'abord exister physiquement et vous devez imaginer les gens en train de l'utiliser.
  3. L'anarchie tu cultiveras : les chindogus sont des objets manufacturés qui échappent au dogme de l'utilité. Ils représentent une liberté de l'esprit et de l'action: le droit d'être (presque) inutile.
  4. Universel et simple Un chindogu est fait pour un usage quotidien : il doit être compris par tous, sans devenir technique ou complexe et donc réservé à des initiés.
  5. Chindôgu tu ne vendras point .
  6. Dans l'humour, tu ne t'enfermeras pas : l'humour ne doit pas être la seule raison de créer un chindogu: il s'agit avant tout de trouver une solution à un problème. L'humour est le fruit d'une solution élaborée ou non conventionnelle à un problème qui ne nous apparaissait pas directement.
  7. De la propagande, tu t'éloigneras : un chindôgu est innocent, créé pour être utilisé, même s'il ne peut être utilisé.
  8. Les tabous, tu banniras : un chindôgu n'est jamais vulgaire, sexuel, cruel ou irrespectueux de la société.
  9. Le Chindôgu tu partagereas : un chindôgu ne peut être breveté, il doit être offert au monde, il est pour tous et ne peut être protégé par des brevets.
  10. Des préjugés tu feras table rase : un chindogu ne favorise ni une race, un sexe ou une classe, il doit pouvoir être apprécié par tous.


En résumé, pour tous ceux qui travaillent sur des innovations incrémentales ou non, le Chindôgu peut être pris à la lettre :

  • comme garde-fou pour éviter la sur-innovation et comme technique pour éviter la fausse bonne idée (reprenez les 10 préceptes et inversez),
  • pour préparer votre argumentaire de vente d'une nouvelle idée (idem ci-dessus),
  • comme état d'esprit créatif au moins 10 minutes par jour...car l'inutilité, ce concept en est la preuve, est pavé de...bon sens !

Je réserve la conclusion à Kenji Kawakami :
"Chindogu is the symbol of freedom, a free soul is needed to think of chindogu, to think of stupid, crazy things. You can never do it with common sense alone."


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Marianne Dekeyser 216 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossiers Paperblog