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L'Agenda Puydomois n°190 met à l'honneur Echec au Roy

Publié le 31 mars 2012 par Fkuss

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Cette quinzaine, l'Agenda Puydomois me fait l'heur de mettre en avant "Echec au Roy" dans une interview qui dresse également quelques pistes sur mes valeurs, mon métier; croisant mes passions : l'histoire, la chose publique, la communication, l'écriture.

***

Vous avez suivi des études littéraires. Un plus pour écrire un roman ?

Oui et non. Les lettres sont utiles car elles nourrissent mon univers de création. Ecrire c’est dialoguer avec les autres écrivains que l’on a pu lire. Mais il faut prendre garde à ne pas s’enfermer dans certains tics d’écriture. Un de mes prof de lettres me disait toujours qu’il fallait connaître les classiques pour mieux les oublier. Apprendre à désapprendre, déconstruire les constructions établies pour libérer son imagination.. C’est, je le crois, la clé pour faire émerger son propre style !   

Il s’agit de votre troisième ouvrage autour du même héros, le commissaire Pierre Castilhon. Comment se sont vendus les deux premiers et quels sont vos espoirs vous ce troisième volume ?

« L’enfant de Floréal », ma première parution, fut une surprise heureuse. C’est une nouvelle historique parue en 2008 aux éditions du Masque dans un recueil parrainé par Jean d’Aillon, célèbre auteur de polars historiques. Ensuite est venu mon premier roman, « Le Complot des Salines ». Paru en 2010, il avoisine désormais les 1500 ventes. Pour « Echec au Roy », je ne me fixe pas d’objectifs. Ce qui m’importe c’est ce que mes lecteurs m’en diront. Sur l’intrigue, sur les valeurs que je partage avec eux.  

Parlez-nous de Pierre Castilhon ?

C’est l’archétype de l’homme de 1789. Juriste, jeune commissaire, franc-maçon, idéaliste. Il fait partie du « Tiers Etat », c’est-à-dire le peuple, mais plutôt de la frange instruite et éclairée. Son père, parti de rien, s’est enrichi dans le commerce et Pierre Castilhon incarne cette petite bourgeoisie des talents qui aspire à une société fondée sur les « mérites » de chacun. Or dans la France de 1789, le pouvoir est détenu par les « ordres privilégiés » de l’époque : la Noblesse et le Clergé.

Quel type de policier est-il ?

Il a la fougue de sa jeunesse (25 ans) et la sagesse de sa mission. A la croisée de deux mondes, en permanence écartelé. Entre les pratiques féodales d’un ancien régime qui n’a pas encore expiré et les mœurs nouvelles des Lumières. Pierre Castilhon est convaincu que les « clartés » du XVIIIème siècle doivent s’appliquer aux méthodes de police. Plus d’enquête scientifique et moins de « question » (la torture). D’ailleurs il est aussi convaincu que la bonne application de la « raison » assurera, par la Loi, par une Constitution, par l’éducation du peuple et l’élection d’hommes « éclairés », un bon gouvernement. Ce n’est pas pour autant un républicain. En 1789 tout le monde est royaliste. Louis XVI est aimé des français et on lui rend grâce d’avoir convoqué les Etats Généraux pour enfin exprimer ses « doléances ». Pierre Castilhon, comme beaucoup, ne rêve que d’une monarchie « tempérée » où les représentants du peuple partageraient le pouvoir avec le Roi.  

P. Castilhon, peut-il être une sorte de Nicolas Eymerich (Valério Evangilisti, également diplômé de sciences politiques d’ailleurs) Français ?

L’analogie peut s’appliquer sur son caractère intrépide.  Le Commissaire Castilhon veut débusquer la vérité. Où qu’elle niche, y compris lorsque les coupables sont les habitués des hautes sphères du royaume. A le comparer, je l’inscrirais plutôt dans la lignée des aventures de Nicolas Le Floch, de Jean-François Parot.  

P. Castilhon est originaire de Sète, comme vous. Un hasard certainement ?

Un hommage à ma petite patrie ! C’est aussi cela 1789, des hommes et des femmes qui sont arrivés, depuis leurs provinces, au cœur du pouvoir royal, à Versailles. Pour le réformer, puis le renverser. Robespierre était originaire d’Arras, Mirabeau représente la Provence aux Etats Généraux, La Fayette l’Auvergne..  

Pourquoi vous intéresser à cette période précise de l’Histoire de France ?

La Révolution Française fonde notre modernité. Pas seulement en France ou en Europe. Sa plus noble réalisation, la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, porte un message universel. D’autres révolutions l’ont précédé. Mais elles étaient plus limitées comme les révolutions anglaises et américaines qui n’étaient que des révolutions libérales. La Révolution Française est à la fois une révolution de la liberté, et une révolution de l’égalité. Une révolution politique en 1789 et en 1793 une révolution sociale ; c’est cette totalité qui la rend passionnante.  

Votre roman aborde de nombreux faits historiques. Avez-vous entrepris un travail d’historien pour écrire ce troisième chapitre des aventures de P. Castilhon ?

C’est essentiel ! Enquêter dans les ruelles de Paris de 1789, fureter à Versailles, au Petit Trianon, sur les pas des ébats de Marie-Antoinette avec son amant supposé ou encore faire participer le Commissaire Castilhon au Serment du Jeu de Paume ou à la Prise de la Bastille ; cela ne s’invente pas ! Le contexte doit être précis. Pour les dialogues par exemple je ressuscite des expressions du XVIIIème, des mots disparus. L’exercice de style est passionnant. Il faut réécrire, sans trahir, ce que tant d’autres ont déjà raconté pour mettre la grande Histoire au service de la petite, l’intrigue.  Les zones d’ombres de l’Histoire permettent, comme le faisait Alexandre Dumas, de se servir des faits pour nourrir une aventure imaginaire. Tout n’est pas vrai, mais tout est vraisemblable !

En quoi cette période, la Révolution, nous parle-t-elle d’aujourd’hui ?

Parce qu’aujourd’hui comme hier il reste de très nombreuses Bastille à prendre. Il existe toujours un Tiers Etat et des ordres « privilégiés ». La promesse de liberté et d’égalité de 1789 est encore à concrétiser !

Une connaissance de l’Histoire nous permet-elle de mieux comprendre l’époque actuelle ?

Pour moi c’est évident. A la lumière du passé, le présent s’éclaire. Et de ce passé nous pouvons apprendre que nous ne sommes pas condamnés à vivre dans le monde tel que nous le connaissons. Je ne crois pas à la fin de l’Histoire mais à la volonté humaine porteuse de changements et de progrès !

Vous êtes un homme de communication, or pour votre nouveau roman, vous avez besoin de communiquer. Un paradoxe ou un cas d’école ?

C’est un bon exercice pratique. Je ne crois pas à la com’ au sens pub, mais à la communication comme vecteur d’écoute, de partage et d’échange entre les individus. La communication c’est un dialogue et une ouverture permanente. C’est aussi de la remise en question. Exactement comme dans l’écriture. En communication ce n’est pas le buzz du moment qui compte, il sera vite balayé le lendemain par un autre sujet, par l’écume des jours. Ce qui compte, c’est d’arriver durablement à ne pas laisser l’autre indifférent et à toujours créer les conditions du désir, de l’intérêt. C’est pour cela que le retour des lecteurs m’est aussi cher. Je dialogue avec eux de livre en livre. Au fond, à travers mes polars je m’essaie à une autre pratique du storytelling !  

Parallèlement, vous gérez la communication de la Région Auvergne… Comment voit-on votre seconde carrière à la Région ?

Le mieux serait de demander au Président René Souchon ;-) Sérieusement, « seconde carrière » est un peu ambitieux ! J’aimerais me consacrer autant à l’écriture que je ne me consacre à la Région ! Cela viendra peut-être, pour le moment faire connaître aux auvergnats tout ce que les élus régionaux font pour eux sur le TER, la carte jeunes nouveau monde, le soutien à l’emploi avec l’emprunt populaire ou le très haut débit est suffisamment passionnant. C’est d’ailleurs une grande source de motivation car il n’y a pas d’écarts entre les actions et les valeurs affichées. Communiquer sur une Auvergne plus juste et plus grande, cela s’appuie sur une réalité et des actions. Je me vois mal faire de la com’ pour de la com’, sans convictions.    

Quand trouvez-vous le temps d’écrire ?

Le soir, les week-end.. Au quotidien mes collègues et mes amis me voient toujours avec un petit carnet noir entre les mains ou dans la poche. Il me sert à croquer de nombreuses idées qu’il faut ensuite, quand le projet mûrit, mettre en ordre !  

Sciences Po, dont vous êtes diplômé, a été précurseur dans son ouverture à la diversité. Comment, en tant qu’ancien élève, avez-vous vécu ce changement ?

J’ai fait Sciences-Po avant la réforme. Boursier moi-même, issu d’un milieu modeste, j’ai découvert les classes prépas et les instituts d’études politiques presque par hasard, en Terminales, grâce aux bons conseils du documentaliste de mon Lycée. Bref mon milieu ne me destinait pas à cela car je n’étais pas un « héritier » au sens de Bourdieu. J’ai pris conscience d’ailleurs de la véracité de ce concept une fois la barrière du concours passée car j’ai découvert que pour nombre de mes camarades de promo, cela faisait partie d’une stratégie parentale bien établie depuis leur adolescence. Il fallait lire tel livre, aller dans tel Lycée pour intégrer telle prépa et ainsi avoir le plus de chances de finir en grande école. De fait tout ce qui permet de démocratiser l’accès à l’enseignement supérieur et les grandes écoles va dans le bon sens. Cependant je ne crois pas à la politique des quotas comme une solution de long terme, certainement parce que je suis un produit du mérite républicain. Ce n’est pas en permettant à quelques jeunes d’intégrer Sciences-Po ou HEC parce qu’ils viennent de ZEP que l’on résoudra le problème initial. Ce n’est qu’en mettant le paquet sur les quartiers et zones difficiles en terme d’éducation, d’accompagnement scolaire, de bourses et de professeurs expérimentés que l’on permettra aux enfants de milieux modestes de concourir de manière équitable avec les autres pour accéder aux grandes écoles. C’est aussi en refusant que l’injustice sociale tienne lieu d’horizon que les choses avanceront. Evidemment cela suppose un changement dans la conduite des affaires de la Nation car depuis 10 ans c’est plutôt une éducation, une société même à double vitesse qui s’installe ! je le disais plus haut, il y a encore beaucoup de Bastilles à prendre ! 

La littérature, pour vous, ne sera toujours qu’une passion à défaut d’un métier ?

Stendhal disait « la vocation, c’est avoir pour métier sa passion ». Pour l’heure c’est la communication, demain..


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