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"Je ne suis pas dans l'improvisation", François Hollande aux lecteurs de Métro

Publié le 02 avril 2012 par Letombe

François Hollande a répondu à cinq lecteurs du quotidien gratuit Metro. Il a eu notamment l'occasion d'aborder les sujets de la sécurité, de l'emploi, de la fiscalité, de l'éducation et de sa campagne de manière générale. Retrouvez ici l'interview complète.

Benoît : Quelles solutions novatrices imaginez-vous pour résoudre le problème de l'emploi ?

J'ai une proposition qui correspond aux difficultés des jeunes et des seniors sur le marché du travail. C'est le contrat de génération : l'entreprise qui s'engagera à garder un senior afin qu'il puisse partir à la retraite dans de bonnes conditions, et qui embauchera un jeune en CDI, ne paiera plus aucune cotisation sociale sur ces deux emplois. Je ne dis pas que cela règlera immédiatement la question du chômage : sa baisse dépend beaucoup de la politique économique que nous mettrons en œuvre et de la croissance que nous devrons être capables de relancer en Europe. Mais c’est une mesure forte pour réduire la précarité des jeunes et maintenir les séniors dans l’emploi.

Noé : Jean-Luc Mélenchon veut augmenter le Smic à 1 700 euros. Seriez-vous prêt à faire pareil ?

Je ne promets que ce que je serai capable de tenir. Donc plutôt que d'annoncer un chiffre, je réunirai une conférence avec les partenaires sociaux pour ouvrir des négociations sur l’emploi des jeunes et sur les salaires. Quant au SMIC, il sera non seulement indexé sur les prix, mais aussi directement lié à la croissance.

Awa : Maman célibataire, je travaille en CDI mais je vis à l'hôtel avec mon fils car je n'arrive pas à trouver de logement. Que comptez-vous faire pour aider les personnes dans mon cas ?

Plus d'un million de personnes attendent un logement social, et à Paris la tension est très forte. Vous en êtes hélas la victime. Mais vous êtes une mère seule, qui travaille, donc je considère que vous êtes prioritaire. Pour les familles mono-parentales, nous créerons des logements très sociaux. C'est pourquoi j'ai proposé que tous les terrains dont l'Etat est propriétaire soient mis à disposition des collectivités locales pour qu'elles construisent davantage de logements.

Benoît : Comptez-vous vraiment rétablir la retraite à 60 ans ?

Le principe qui m’anime est celui de la justice. Celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt (16 ans), qui ont leurs trimestres requis pour partir à la retraite à taux plein, pourront le faire à 60 ans. Pour les autres, nous ouvrirons une négociation sur la pénibilité, sur la décote, ainsi que sur la situation des femmes dont les carrières ont été incomplètes.

Anne-Sophie : Alors que l'Europe entière met en œuvre des cures d'austérité, est-il crédible de vouloir créer 60 000 postes dans l'Education nationale ?

La croissance est indispensable pour atteindre nos objectifs de réduction de déficit et de maîtrise de la dette. Quand j'ai annoncé la création de 60 000 postes à la fin du quinquennat, soient 12 000 par an, j'ai chiffré la mesure : elle coûtera 2,5 milliards d'euros. C'est la somme qu'a représentée le bouclier fiscal mis en place par le candidat sortant. Le candidat sortant a protégé les plus fortunés. Moi, j’ai choisi de protéger nos enfants !

Awa : Des fédérations de parents d'élèves demandent la suppression des devoirs à la maison pour les écoliers. Quelle est votre position sur ce sujet ?

Un certain nombre de familles ne peuvent pas accompagner scolairement leurs enfants. Il est donc très important, pour lutter contre l’échec, que les devoirs soient encadrés dans l'établissement. En même temps, je souhaite que soient encouragées les activités sportives et culturelles après l’école. Et face à la gravité de la déscolarisation, je veux soutenir les familles en difficulté.

Julien : Vous avez proposez de taxer à hauteur de 75 % les revenus supérieurs à un million d'euros. N'est-il pas dangereux de créer l'exode des grosses fortunes ?

Environ 3 000 personnes gagnent plus d'un million d'euros. Il ne s'agit pas de décourager qui que ce soit, mais d'envoyer un message simple : nous devons tous nous mobiliser pour le redressement, et l’exemple doit venir d’en haut. Il y a des bonus indécents. De la même manière, je baisserai le train de vie de l'Etat et diminuerai de 30% les rémunérations du Président et des membres du gouvernement. Ce n'est évidemment pas ce qui renflouera les caisses de l'Etat, mais ce sera le signe que les temps changent.

Noé : que proposez-vous en matière de sécurité ?

D’abord, je veux évoquer la lutte conte le terrorisme. Elle doit être menée de manière implacable, continue et cohérente. Tous les enseignements de la tuerie de Montauban et de Toulouse seront tirés, en termes de services de renseignements et même de lois si c'est nécessaire. Je n'exclus rien, mais je ne veux pas faire d'annonces précipitées ou sans effet. Ensuite, l’insécurité s’est fortement amplifiée. Nous devons lutter fermement contre les violences aux personnes, qui ont progressé de 20% ces cinq dernières années ! Nous mettrons davantage d'effectifs de police et de gendarmerie, nous identifierons les zones de sécurité. Ces moyens seront redéployés. Et face à la délinquance juvénile, je renforcerai la protection judiciaire de la jeunesse et doublerai le nombre d’établissements qui accueillent les mineurs violents.

Anne-Sophie : La progression de Jean-Luc Mélenchon dans les sondages vous inquiète-t-elle ?

Je ne suis pas dans une bataille à l'intérieur de la gauche. Je dois la rassembler. Je n'ai qu'un seul adversaire, la droite, et qu'un seul objectif, battre Nicolas Sarkozy afin de pouvoir gouverner la France avec une autre perspective : le redressement dans la justice et la priorité donnée à la jeunesse. Pour y parvenir, je dois être au plus haut au soir du premier tour. Donc je fais en sorte de convaincre les électeurs de faire le choix essentiel dès le 22 avril.

Benoît : Gauche modérée, écologistes, pression de Jean-Luc Mélenchon… Comment ferez-vous pour gouverner alors que vous devrez composer avec de telles tendances diverses ? Aura-t-on un "consensus mou" ?

La question du rassemblement se pose davantage pour le candidat sortant. Qui sera son partenaire pour le second tour ? Il cherche du côté de l’extrême droite. Quant au centre, il se veut indépendant. Je dois faire le rassemblement autour des 60 propositions que j’ai présentées aux Français. Après, il y aura une majorité parlementaire à constituer. Là encore, ce seront les électeurs qui en décideront lors des législatives. Je veux une équipe solide et solidaire. Celles et ceux qui voudront gouverner, seront les bienvenus. Mais je ne veux forcer personne.

Benoît : Certains essaieront certainement de vous faire changer certaines lignes de votre programme…

J’écouterai le message des électeurs du premier tour. Mais mon rôle c’est de donner la direction. J'ai présenté mes propositions dès le mois de janvier. Je ne suis pas dans l'improvisation, je ne sors pas des mesures de ma poche pour tenter de convaincre au dernier moment. Quand Nicolas Sarkozy le fait, chacun se demande : "Mais pourquoi ne l’a-t-il pas fait plus tôt ?" Je ne veux pas être le chef d'un clan, le chef d’un parti, d'une coalition. Je veux être chef de l'Etat, avec l'impartialité et l'exemplarité qui sont attendus.

Metro/LCI : Vous avez commencé votre campagne il y a déjà un an. N'avez-vous pas peur d'être dans la peau d'un marathonien qui peine à trouver un nouveau souffle à quelques kilomètres de l'arrivée ?

Ce qui compte, c'est de gagner la course, mais être parti tôt m'a donné un précieux entraînement. Je ne suis jamais fatigué quand il s’agit de convaincre. Ce ne sont pas cinq semaines, mais cinq ans qui m'attendent. Le président sortant, cela fait cinq ans qu'il a entamé son parcours. Le problème, c'est qu'il est allé en zigzag.

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