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"The Gaza Genocide" par Laila El-Haddad

Publié le 13 mars 2008 par Anom Yme

The Gaza Genocide

02/03/08

par Laila El-Haddad [1]

Aujourd'hui nous fêtions l'anniversaire des quatre ans de Yousuf. Nous avons mangé du gâteau. Et nous avons compté les corps. Nous avons chanté joyeux anniversaire. Et ma mère a sangloté. Nous avons vu les avions de combat vrombir sur l'écran de notre télévision, broyant rue après rue ; puis nous avons entendu un train hurlant au dehors. Et nous avons frémis.

Yousuf déchira le papier de ses cadeaux et il demanda à ma mère de lui faire un papier zanana, un drone, un origami ; et nous furent déchirés de l'intérieur, submergés par un sentiment d'impuissance ; de peur, de rage et de chagrin ; de découragement et de confusion.

« Nous sommes en train de crever comme des poulets » disait Yassine la nuit dernière tandis que nous regardions la couverture médiatique des événements de ces derniers jours.

Même le Guardian dans une dépêche a mentionné la mort de Palestiniens, y compris des enfants.

En fait, une étude faite par Si les Américains Savaient [2] a montré que la couverture du conflit par AP [3]comprenait des distorsions significatives, particulièrement en sur-estimant le nombre d'Israéliens tués, et sous-estimant le nombre de Palestiniens assassinés. L'étude a révélé qu'AP reportait la mort d'enfants israéliens plus souvent que les décès eurent lieu, mais n'a pas réussi à couvrir 85% des enfants palestiniens tués.

Il y a quelques années de cela, la même organisation avait révélé que le NY Times était sept fois plus enclin à commenter la mort d'un enfant israélien que celle de palestiniens.

C'est seulement quand le député Matan Vilnai utilisa le terme « shoah » [4] pour décrire ce qui allait arriver à Gaza que certains médias prirent note. Nous avions ici un membre officiel du gouvernement israélien invoquant l'Holocauste, le plus horrible massacre de son peuple, en faisant référence au sort de Gaza.

Mais ce n'était pas nécessairement parce que les Gazaouites pouvaient souffrir du même sort qu'ils furent perturbés, mais plus parce que cet événement, cette phrase -génocide ou Holocauste- puisse être utilisée avec une telle légèreté ; qu'user d'un tel terme puisse atténuer quelque peu la véritable horreur de l'acte original.

C'est comme si ce qui s'est passé à Gaza continuait de se passer, soit par le biais délibéré et soutenu du siège et du blocus, soit par la recrudescence des morts civils qui est devenue acceptable, voire même encouragée.
Ilan Pappé
[5] disait que le Génocide « est la seule manière appropriée pour décrire ce que l'armée israélienne (Tsahal)est en train de faire dans la bande de Gaza » après beaucoup de de réflexion et de délibération.

Mais le véritable génocide à Gaza ne peut ou ne sera pas évalué au moyen de chiffres. Il ne s'agit pas d'un massacre de chambres à gaz.
Non.
C'est un génocide lent et calculé -un Génocide mieux calibré, ce qui veut dire un génocide à long terme. Et si le terme est utilisé dans n'importe quel contexte, ce devrait être celui-ci. De bien des manières c'est un génocide bien plus sinistre car il a tendance à être négligé : tout est okay à Gaza, le terrain en friche, la terre qui s'est habituée au massacre et à la survie ; Gaza, dont les habitants sont, de biens des manières, des sous-hommes. Nous ne devrions pas en prendre note, nous n'avons pas besoin d'en prendre note ; à moins qu'il n'y ait un massacre ou une famine.

C'est comme si ce qui est en train de se passer n'était pas un lent assassinat ciblé ; un étranglement de masse. Mais les gouvernements et les présidents du monde civilisé, même notre propre président (président de quoi ?), sont avides d'accords de paix historiques et d'accords « faisons-leur croire que » ; de sommets théâtraux et de « quasi-états » ; le tout pour entendre « et bien qu'ils mangent de la brioche ! » [6]
Et c'est ce que nous faisons.

--*--

Notes :

[1] Laila El-Haddad est une journaliste palestinienne qui passe son temps entre les USA et la bande de Gaza. Elle tient le très bon blog « Raising Yousuf, Unplugged : diary of a Palestinian mother ».

[2] : L'association If Americans Knew (what every American needs to know about Israel/Palestine)part du principe que « dans une démocratie, il est essentiel que les citoyens soient bien informés », ajoutant que ce n'est pas le cas aux USA. L'association se base sur l'état d'Israël car « Israël est le principal bénéficiaire de l'aide financière US dans le monde entier. Il reçoit une aide plus importante que celle accordée à tous les pays de l'Afrique sub-saharienne, d'Amérique latine et des Caraïbes réunis. » De plus, toujours pour l'association, « encouragé par l'argent américain, Israël occupe des terres qui ne lui appartiennent pas, et enfreint de nombreuses lois et conventions internationales dont il est signataire ».

[3] : Associated Press: agence de presse américaine, équivalent de notre Agence France Presse(AFP) ou encore de Reuters

[4] : Pour ceux qui ne seraient pas au courant de la polémique qui suivit les propos de Vilani, je vous renvois vers la dépêche Reuters / Le Monde ; ou encore vers l'article d'Euro Palestine.

[5] : Ilan Pappé est un historien israélien assez polémique, ancien professeur à l'université de Haïfa, désormais à celle de Exeter. Il fait partie de ce peu d'historiens qui ont voulu ré-examiné l'histoire sous un joug nouveau. Outre ces prises de positions féroces contre le sionisme et le colonialisme, Ilan Pappé a milité un temps pour le Hadash, et prône la solution "d'un seul état" pour résoudre le problème israélo-palestinien. 

[6] : Après quelques recherches, l'expression « let them eat cake ! » viendrait de la réponse de Louis XVI lorsque Marie-Antoinette, sa femme, lui dit : « Les Français n'ont plus de pain » ; il déclara :  « Et bien qu'ils mangent de la brioche ! » On peut voir cette explication ici.

Cet article est sous (C) Laila El-Haddad. Traduction (CC) Shyankar.  


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