Lors de sa prestation lundi 9 avril au Grand Journal de Canal+, à la suite de considérations sur les difficultés auxquelles un président de la République peut être confronté, Nicolas Sarkozy nous a fait quelques confidences : « Tout d’un coup, vous êtes président, du jour au lendemain, ça vous tombe dessus ». Comme Michel Denisot lui fait remarquer que la surprise n’était malgré tout pas si complète que cela, avançant un « pas par hasard », notre président reprend « c’est pas parce qu’on y pense qu’on y est, parce qu’y a des tas de gens qui y pensent et qui y seront jamais. » Il arbore alors un large sourire ravi, ce navrant sourire qui lui vient si souvent aux lèvres sans qu’il puisse toujours le réprimer. Denisot reprend alors : « au point où vous y pensez, y en a pas tant qu’ça. ». Notre président conclut, modeste : « c’est pt’être pour ça qu’j’y suis arrivé ».
Admirons l’élégance rare du français employé par un homme qui veut exiger des immigrés qu’ils maîtrisent notre langue : c’est pas, y’a des tas, qui y seront, pt’être, qu’j’y suis, y’en a, tant qu’ça. Épargnons à des oreilles scolaires de telles horreurs. En fait, le plus remarquable, au sens de digne d’être remarqué, c’est ce qu’une telle déclaration révèle sur le personnage. Patrick Poivre d’Arvor a perdu son poste de présentateur du Journal télévisé pour, à la suite de la piteuse performance de notre président au sommet du G8 à Heiligendamm, l’avoir, en sa présence comparé à « un petit garçon qui est en train de rentrer dans la cour des grands ».
Il faut malheureusement reconnaître que cette comparaison était tout à fait fondée. En langage Sarkozy, il est possible qu’après sa victoire, il ait pensé : « j’ai gagné, j’emmène mes potes au Fouquet’s ; j’avais parlé d’une retraite, une croisière c’est mieux ; la Lanterne à Versailles est la résidence du premier ministre, j’m’en fous, j’la veux, c’est moi l’chef, c’est moi qu’ai l’plus long zizi, j’la prends » et tout à l’avenant !
Parlant de la présidence, Nicolas Sarkozy avait déclaré, avant même d’être candidat en 2007 : « j’y pense et pas seulement en me rasant ». Son problème, et surtout notre problème, c’est que devant sa glace, lorsqu’il se rase, il doit toujours penser : « j’ai gagné, c’est moi le meilleur, et pas eux, et je les ai bien eus, nananère ! ». Pauvre homme !