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Projet romain

Par Villefluctuante

Comment habite-t-on le temps? En explorant deux coupes mobiles dans l’espace urbain, ce projet propose de représenter les formes temporelles qu'elles hébergent et développe des propositions prospectives à l'échelle du territoire métropolitain romain.

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Nouvelle géographie

Jusqu'au milieu du 20e siècle, la ville européenne s’était développée sur le principe de la contigüité spatiale. Notre société s’articule dorénavant en flux de capitaux, d’informations et d’images. L’espace comme support matériel de la simultanéité sociale adopte de nouvelles formes de mise en relation. Le sociologue Manuel Castells et le géographe David Harvey ont démontré les changements survenus depuis les années 1970 quant à notre expérience quotidienne de l’urbain. Dans cette nouvelle société informationnelle, l’espace et le temps se rapportent à une nouvelle configuration appelée l’espace des flux qui modifie considérablement la forme de l’espace géographique et de l’espace urbain en particulier. Cela a produit la métropolisation qui est à l'œuvre dans toute l'Europe par la constitution d’un espace urbain flexible. Dans cette spatialité dîte du scope, l’étendue géographique laisse place à des champs de possibilités où fusionnent les échelles et où le temps devient le support de nos vies. L’attention de la communauté scientifique s’est portée ces dernières années sur la prise en compte de la ville en éveil permanent du fait de l’individualisation croissante de la société. Des expériences similaires avaient déjà été tentées au sein des bureaux des temps mais aujourd’hui encore, on peut penser qu’il existe peu d’avancées concrètes pour l’urbanisme. Or, nous pouvons aller plus loin en développant un urbanisme axé sur la plastique temporelle.

 

Rome, métropole incomplète

 

Rome, ville-monde historiquement, forme au XXIe siècle une ville mondiale non globale. Précocement internationalisée dans l’histoire, cette ville possède un héritage historique unique qui en fait une métropole monocentrique peu flexible et incomplète au regard de la globalisation. Malgré la succession des plans régulateurs, cette ville se caractérise toujours par un centre ancien bordé d'une aire où alterne des zones denses et diffuses. 

De la ville du Pape à la Rome musolinienne en passant par l'Empire et la réunification italienne, Rome n'a cessé de se renouveller. Ces deux derniers siècles, l'espace public a été plusieurs fois refondé avec de grands projets de modernisation de la forma urbis souvent inachevés. Successivement seconde ville de l'Empire napoléonien, nouvelle ville sainte, capitale de l'Italie unifiée, vitrine de l'Italie fasciste, la ville s'est transformée maintes fois, modifiant son réseau viaire, dégageant les monuments antiques mais détruisant une partie de son patrimoine pour arriver à sa structure contemporaine et ses nouveaux quartiers en dehors de la muraille aurélienne. Le développement des borghetti a vu au vingtième siècle l'étalement de l'habitat dans l'agro romana.  Le développement vers la mer, anticipé par le projet E42 - EUR, puis après la seconde guerre mondiale la construction du  Grande Raccordo Annulare vont définitivement dessiner le visage de la métropole d’aujourd’hui. Les efforts actuellement entrepris apparaissent particulièrement intéressants puisque la nécessité de devenir une métropole à part entière est inscrite dans le Piano Regolatore Generale approuvé en 2006. Poursuivant la modernisation des infrastructures de transport pour assurer la liaison entre le centre historique, la première couronne dense et l'aire périphérique diffuse, ce plan crée dans la ville diffuse une vingtaine de nouvelles centralités concentrant des activités, des services et de l’habitat autour des nœuds d’échange. Refonder une nouvelle fois la forma urbis par une stratégie de création ex-nihilo de nouvelles centralités innervées par les transports en commun est un pari alors que l’observation de terrain montre un développement immobilier anarchique.

Coupes mobiles et représentation des formes temporelles

Exploiter deux coupes mobiles, donc deux plans de matière, consiste a faire varier les situations tout en maintenant la continuité spatiale d'un grand territoire. Chacun des deux plans de matière décrits se confond avec les mouvements qui se feront en chacun de ses points, comme il se confond avec les mouvements qui ne cessent de s’échanger et de se propager sur lui.

Le dessin cartographique, malgré son attachement historique à l’espace, reste néanmoins le moyen privilégié de retranscription des réalités territoriales. Des artistes contemporains tels que Wim Delvoye, Pierre Joseph ou le laboratoire Stalker ont montré qu’une autre représentation de l’étendue géographique était possible. Il s'agira aussi pour moi d'expérimenter des modes de représentation telles les cartes reliefs ou encore photographies-cartes pour représenter les phénomènes temporels. Je m'appuierai pour cela sur la longue histoire de la cartographie temporelle, de la carte chronologique conventionnelle à la carte psychique ou mnémonique.

La cartographie est un outil projectuel. Elle permet de déterritorialiser l'espace urbain vers d'autres agencements le reterritorialisant différemment. Partant du principe que dans un plan de matière, les images-mouvement réagissent les unes sur les autres, la carte deviendra un diagramme propice à des projets prospectifs d’aménagement de l’espace urbain en opérant par opérations cinétiques (modification, ajout, résonance et contraste). 

d.u.M.s ROME 02


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