Par Meta W.
La Fédération française de rugby (FFR) va faire son choix pour le site qui accueillera le Grand Stade de rugby. Trop dépendante du Consortium du Stade de France, elle souhaite aboutir ainsi à une indépendance financière afin de gérer directement ses ressources et la répartition des fonds pour le développement du rugby français. L’objectif est louable, ambitieux (un stade ultramoderne de 82 000 places) et coûteux (600 millions d’euros), mais ce n’est pas là-dessus que je vais m’attarder. Je voudrais revenir sur le site.
En juillet 2011, le comité de sélection a retenu neuf dossiers, et tous étaient situés en région parisienne. C’est là que j’ai été interloqué, car le rugby est un sport de tradition beaucoup plus implanté dans le Midi de la France. Par Midi, il faut entendre la partie sud qui correspond avec l’ancienne Occitanie dont les limites vont de Bordeaux à Briançon en passant par Limoges et Montluçon.Certes, le Stade Français et le Racing-Métro sont des clubs historiques qui portent hauts les couleurs de la région francilienne, certes le rugby se popularise de plus en plus, mais il est indéniable que le rugby est un sport du Sud, comme l’atteste la liste des clubs professionnels, car à part les deux franciliens, rares sont les clubs situés au nord de la Loire qui peuvent se targuer de jouer depuis longtemps au haut niveau.
Mais la FFR va choisir d’implanter son énorme complexe en région parisienne (Orly et Evry sont encore en course). Les arguments semblent plaider en faveur de ce choix : démographie, niveau de vie, transports…et surtout la symbolique de Paris, l’éternelle capitale de la France. L’Ile-de-France reste donc le meilleur pour installer un complexe à vocation nationale.Un seul bémol vient contrarier ces arguments : la région va être saturée par de tels complexes, et il n’est pas dit que le futur stade gagne ses retours sur investissements. Le Stade Français va enfin jouer dans un Jean-Bouin de 20 000 places, le Racing-Métro ne tardera pas à loger dans une Arena 92 de 40 000 places, et le Stade de France (80 000 places) continuera de prospérer grâce aux matchs de l’équipe de France de foooooot et du Paris Saint-Quatar, et aux délocalisations des gros matches joués par les clubs de rugby franciliens.La FFR va donc arriver dans un marché concurrentiel en phase de saturation. Or le Midi, et en particulier la région toulousaine, n’a pas d’équipement sportifs de cette ampleur, et possède des ressources non négligeables, en premier lieu un public potentiel dont la passion pour le rugby n’est plus à prouver. Toulouse possède un aéroport international, une agglomération de 865 000 habitants et un PIB assez élevé grâce aux industries de pointe.
Alors oui, il aurait fallu développer un peu plus cette région afin de suivre les ambitions de la FFR en termes de rentabilité. Mais c’est justement pour cela qu’il aurait été ambitieux d’aller à Toulouse. On tance la France depuis des années à cause du manque de compétitivité et d’attractivité de ses villes de province, contrairement à ses voisines. Introniser Toulouse comme capitale officielle du rugby français aurait été un acte courageux de décentralisation. Les investissements qui auraient été réalisés en termes d’infrastructures auraient profité à tout le bassin du Midi et encouragé les gens à ne plus voir dans Paris l’unique moteur de la France. En plus, Paris n’a pas besoin d’un nouveau stade géant pour accroître son développement.
Je pense que ce Grand Stade aurait dû revenir à la capitale du rugby français. On me dira que cela aurait été trop coûteux. Je répondrai que quand, en temps de crise, on est déjà prêt à investir 600 millions d’euros pour un stade, autant être ambitieux et lâcher quelques biffetons supplémentaires.