Aussi bien que je me souvienne ! Oui, avant que je n’oublie !

Publié le 26 avril 2012 par Donquichotte

Aussi bien que je me souvienne ! Oui, avant que je n’oublie  que je suis QUÉBÉCOIS !

L’Indépendance du Québec, un rêve ? Une Réalité en marche ?

Aussi loin que je me souvienne, je me suis toujours identifié politiquement comme un Indépendantiste québécois ; bref, comme un citoyen d’une patrie à naître, une patrie qui nous (les Français à l'époque) a été volée par les Anglais sur les Plaines d’Abraham, un jour de 1759.

Voir cet article de Wikipédia qui relate bien cette bataille:

« Elle opposa les Français défendant la ville assiégée à l’armée britannique attaquante et se solda par la victoire de cette dernière et la mort des deux généraux commandant la bataille, Montcalm et Wolfe. Elle marque le début de la conquête britannique et la fin du régime français en Nouvelle-France ».

Mort de Wolfe

 Mort de Montcalm

Aussi loin que je me souvienne... Oui, il est question de souvenirs. Le premier ? je me rappelle, j’écoute le petit Chaput (j’oublie le prénom), il est étudiant comme moi, mais déjà beaucoup plus allumé ; chaque jour, je l’écoute, je suis alors étudiant en Belles Lettres (cours classique) à l’Académie de Québec, j'ai 16 ans, nous sommes en 1961-62, qui nous parle du mouvement indépendantiste de l’époque dont un des chefs de file est Marcel Chaput.

Chaput avait débuté ainsi : « Après avoir lu « Où va le Canada français? L'exercice de la pleine souveraineté est essentiel à l'épanouissement du Québec » de Raymond Barbeau, interviewé par Jean-Marc Léger dans Le Devoir, Chaput est déterminé à entrer en contact avec cet homme, fondateur de l'Alliance laurentienne. Chaput invite Barbeau à tenir une conférence à Hull le 28 août 1959, dans une ancienne salle paroissiale de l'église Notre-Dame. Une vingtaine de personnes sont présentes. Chaput fait la rencontre d'André D'Allemagne à cette occasion. Barbeau invite Chaput à prendre la parole à la salle Saint-Stanislas de Montréal le 13  septembre 1959 dans le cadre d'une soirée organisée pour commémorer le 200e anniversaire de la Abraham 8. »

C’est à ce moment que je décide de devenir membre du RIN, le Rassemblement pour l’Indépendance Nationale. Simple, il suffisait, pour être membre, de s’abonner au journal du RIN : l'Indépendance.

Je prends alors connaissance du Manifeste pour l’Indépendance nationale :

Manifeste du Rassemblement pour l'Indépendance Nationale (adopté à la première assemblée générale du RIN, octobre 1960) 

« Les Canadiens français constituent une nation dont l'origine remonte à l'époque de la Nouvelle-France. Conquise par la force des armes, isolée de sa mère-patrie, soumise à des tentatives d'assimilation nombreuses et prolongées, la nation canadienne-française a toujours manifesté une indomptable volonté de survivre et de s'épanouir librement en conformité avec ses origines et son génie particulier. La Confédération, issue de la Conquête et de l'impérialisme britannique, a placé et maintenu le peuple du Québec dans une situation anormale de faiblesse et d'infériorité. Ce régime, par ailleurs, n'a pas été établi par la volonté expresse des peuples en cause mais improvisé par la loi d'une métropole impériale. De plus, les droits accordés officiellement par l'Acte de l'Amérique du nord britannique au peuple canadien-français, dans le but d'assurer sa survivance et sa protection, ont sans cesse été violés, et continuent de l'être, par le gouvernement fédéral, à Ottawa. La logique et le droit permettent donc aujourd'hui d'affirmer que le pacte confédératif, par ses origines et par le cours de l'histoire, est nul et périmé.

En outre, la centralisation fédérale, réalisée à un rythme croissant, qui tend à transformer le régime confédératif en celui d'un État-nation unitaire, compromet non seulement l'épanouissement mais aussi l'existence même de la nation canadienne-française déjà gravement menacée par son isolement culturel et social et par l'influence anglo-américaine.

À l'époque actuelle où dans le monde entier les peuples s'affranchissent du joug colonial et les nations revendiquent leur pleine indépendance, le Canada français ne peut plus accepter de demeurer sous la tutelle économique et politique de l'étranger. L'idéal de l'indépendance nationale, qui s'allie à celui de l'internationalisme lucide, est valable au Canada français comme partout ailleurs. L'indépendance est du reste dans la ligne de l'histoire du Canada français : préparée par la Confédération puis par l'établissement de l'autonomie provinciale, elle représente l'aboutissement normal de l'évolution historique du Canada français. De nos jours, les peuples n'ont plus besoin d'excuses pour vouloir être libres. Car si la liberté nationale n'est pas une fin en soi, elle est la condition essentielle à tout épanouissement réel des hommes et des peuples. La première des libertés civiques étant l'indépendance de la patrie, le Rassemblement pour l'indépendance Nationale réclame l'indépendance totale du Québec afin de permettre au peuple canadien-français de choisir librement les voies de son avenir. Une fois l'indépendance acquise, la nation canadienne-française devra se donner, par des moyens démocratiques, les institutions qu'elle jugera lui convenir. Tels sont les principes et l'idéal que le Rassemblement pour l'indépendance Nationale (RIN) a pour but de défendre et de propager. Le RIN n'est aucunement relié, associé ni affilié à aucun autre organisme existant. Les membres du RIN sont par ailleurs entièrement libre d'exprimer et de faire valoir, à titre personnel, leurs idées et leurs convictions sur les questions qui ont trait à la politique interne, à la religion, aux théories économiques et aux doctrines sociales, car la seule raison d'être du RIN est de favoriser et d'accélérer l'instauration de l'indépendance nationale du Québec, sans haine ni hostilité envers quiconque mais dans un esprit de justice et de liberté pour tous. En réclamant l'indépendance totale du Québec, le RIN rejette le pessimisme né de la Conquête et manifeste sa foi en la nation canadienne-française, issue des plus grandes civilisations de l'histoire ». Source : André D'ALLEMAGNE, Le RIN et les débuts du mouvement indépendantiste québécois. Le R.I.N. de 1960 à 1963. Étude d'un groupe de pression au Québec, Montréal, Éditions de l'Étincelle, 1974, 160 p. Préface de Marcel Rioux. Voir ANNEXE III, p. 139-140".

Chaque jour, je lis le journal Le Devoir, et aussi La Presse, et, avec les copains, je cherche des arguments pour prouver que cette Indépendance du Québec est nécessaire, chaque jour, je cherche à prouver que cette Indépendance est possible, « économiquement » parlant. Bref, on nous répète trop souvent, et sans cesse, que nous ne pourrions survivre sans le reste du Canada, si fort économiquement à l’époque (cela est vrai dans un sens ; à l’époque, les Anglophones possèdent l’économie du Québec)

Nous n’avions pas à ce moment-là cet argumentaire en dix point qui a été développé depuis, dont ces deux « points économiques » :

8. La nécessaire limite à la compétitivité. L'argument économique (I)

  • Le nationalisme, un contrepoids essentiel au néo-libéralisme
  • Le Canada d'aujourd'hui est-il semblable à l'Europe de demain ?
  • Le maintien de l'union économique

9. Le nécessaire développement. L'argument économique (II)

  • Une politique préférentielle
  • Un développement inégal
  • Le Québec est-il un bénéficiaire du régime fédéral ?
  • Le partage de la dette
  • Les fameux effets à court terme

Mais il y a longtemps que je ne cherche plus d'argument pour démontrer la faisabilité de l'Indépendance du Québec. On a qu'à la faire.

L’autre souvenir « fort » est ma première rencontre avec Pierre Bourgault, deux années plus tard, je suis alors étudiant chez les Oblats de Marie-Immaculée, à Jonquière, en classe de Philosophie I (toujours le Cours Classique). Celui-ci était venu nous faire une conférence sur la question de l’Indépendance du Québec. Je me rappelle bien son bref rappel historique, et surtout comment le pays (le Canada) s’était développé d’est en ouest avec le « chemin de fer », et comment s’est alors structurée l’économie canadienne anglo-saxonne, à capital anglo-saxon, à ingénierie anglo-saxonne, à urbanisation anglo-saxonne... les Québécois francophones étant alors une communauté des campagnes, oubliée, et encore sous le joug de l’Église.

Rappel de l'importance du développement ferroviaire et de son impact sur le renforcement de l'emprise anglo-saxonne sur la communauté canadienne-française de l'époque: (extraits choisis)

« Le succès que remportent les promoteurs de projets ferroviaires est largement dû à leur détermination et à l'enthousiasme apparemment sans limites des investisseurs britanniques pour les chemins de fer.  

Les chemins de fer pénètrent de nouveaux territoires et repoussent les limites de l'exploitation agricole et forestière vers le nord et vers l'ouest. Leur effet sur les centres urbains naissants est crucial et spectaculaire. Les chemins de fer sont indissociables de l'industrialisation, car ils rapprochent les marchés et en ouvrent de nouveaux tout en créant eux-mêmes une demande pour le mazout, le fer et l'acier, les LOCOMOTIVES ET LE MATÉRIEL ROULANT. Le chemin de fer assure un essor considérable à l'INGÉNIERIE, particulièrement par ses besoins en PONTS et en TUNNELS. La principale étape de l'expansion ferroviaire au Canada débute avec la CONFÉDÉRATION, en 1867. Comme le fait remarquer un historien, « des liens d'acier devaient s'ajouter aux bonnes intentions pour que la nouvelle Confédération survive. Sans le chemin de fer, il n'y aurait pas eu de Canada, il n'aurait pas pu y en avoir ». Propriété du gouvernement fédéral et géré par celui-ci, l'Intercolonial est largement financé par des prêts britanniques garantis par l'Empire. Bien qu'étant officiellement une entreprise privée, le CP est généreusement doté par le gouvernement fédéral en argent (25 millions de dollars), en concessions de terres (25 millions d'acres), en allégements fiscaux et en droits divers. De nouvelles villes, de Winnipeg à Vancouver, doivent pratiquement leur existence au chemin de fer transcanadien. »    

Le ton ferme, ardent, - il se transfigure - du conférencier; oui, la fougue de Bourgault, son charisme, sa véhémence, et cette « volonté » que l’on devinait d’en finir avec l’assujettissement des francophones à une société contrôlée par les Anglo-saxons de Montréal, du reste du Canada, et de l’Empire britannique encore si présent, faisaient des émules. Et j’en étais. Je n’ai plus jamais oublié ce discours (les mots peut-être, mais pas l’essentiel : nous devions choisir d’être « libres » Québécois) qui a été à l’origine de ma conviction profonde de la nécessité pour le Québec d’être indépendant.

Dans les années 60, au Québec, et dans ce qu’on peut appeler les premières années de cette effervescence nouvelle en faveur de l’Idée de l’Indépendance, plusieurs tendances ont émergé, dont l’une, plus radicale que les autres, et qui avait opté pour la voie de la violence et la voix du cri de guerre contre l’oligarchie anglo-saxonne et al : celle du FLQ, le Front de libération du Québec.

Ce groupe va même enlever un Lord anglais, James Richard Cross, et aussi un ministre du Gouvernement du Québec, Pierre Laporte, qu’il va finalement assassiner. Dès le premier enlèvement, le FLQ va forcer le gouvernement à faire lire leur « Manifeste » sur les ondes de la télévision nationale. Cette aventure est néfaste ; elle ne convainquit qu’un petit nombre de Québécois, dont Louis Fournier, dans son livre « F.L.Q. Histoire d'un mouvement clandestin », nous présente quelques portraits ; l’aventure felquiste, elle, sera peu à peu oubliée.

Pourtant, le 9 septembre 2009, le journal Le Devoir rappelle qu’il y aurait des raisons de relire le Manifeste du FLQ, dont le contenu – au delà de l’appel à la violence et des excès de langage - reste très actuel.

Voici un extrait de cet article.   « Les éléments qui méritent toujours, selon nous, d'être considérés près de 40 ans plus tard sont les suivants: - une opposition approfondie au complexe étatico-capitaliste, ce mariage entre ce que les plus riches de la société font faire à l'État et ce que celui-ci leur laisse faire;   - la constitution spécifique d'une figure politique du peuple;   - le principe d'autonomie inséparable de l'idée de réappropriation collective des ressources, des institutions et des pouvoirs communs ».

Une autre personne a fortement influencé ma compréhension de la réalité politique du Québec : Clément Richard, un avocat et député indépendantiste un peu plus tard, a été, à cette époque, notre professeur d’histoire à l’Académie de Québec. Il nous a initié à la « vraie » histoire du Québec, pas celle des martyrs canadiens (nos chers pères jésuites Brébeuf, Hogues, Lallemand et al...), pas celle des Iroquois qui brûlaient nos forts et combattaient nos alliés Algonkins ; non, la « vraie » histoire, dont ces trois exemples dont je me souviens...

1/ ...celle des patriotes de 1837, celle des « vrais » Québécois (j’entends cette population francophone nettement majoritaire : plus de 90 % de la population du Bas-Canada à l’époque) qui voulaient assumer un rôle plus important dans la conduite du pays ; mieux, qui se révoltaient contre des pouvoirs abusifs des anglophones dans la vie politique du Bas-Canada de l’époque...

Rappel :

« Après la conquête de la Nouvelle-France par la Grande-Bretagne en 1759, le gouvernement du Bas-Canada (aujourd'hui, le Québec) est assuré par un gouverneur général nommé par Londres et celui-ci assume des pouvoirs absolus. Le Traité de Paris de 1763 confirme la perte de la colonie et le commerce devient exclusivement tourné vers l'Empire britannique, par l'intermédiaire de ses marchands, dont surtout ceux de Boston. L'immigration est limitée aux ressortissants britanniques et seuls ceux qui prêtent serment du test peuvent occuper un poste dans l'administration civile, ce qui implique de renier la religion catholique et l'autorité du pape. Ce changement a donc fait des anciens colons français des citoyens de seconde zone. » Vers 1830, la population du Bas-Canada est constituée d'environ 75 000 Anglais et de 500 000 Canadiens français".  

Les Patriotes gagneront la bataille de St-Denis...

La Bataille de Saint-Denis est un combat livré le 23 novembre 1837. Elle opposa les 200 patriotes du docteur Wolfred Nelson aux 300 Britanniques de Sir Charles Gore, et prit fin avec la victoire des Patriotes.

...mais perdront celle de St-Charles :

Jean-Philippe Boucher-Belleville, journaliste et enseignant, fait partie des insurgés, et témoigne : « Comme à Saint-Denis, la plupart de nos braves bonnets bleus montrèrent un zèle et un intrépidité qui n'auraient pas manqué de faire décider la victoire en notre faveur. Les femmes mêmes avaient coulé des balles et fait des cartouches ; des vieillards et des enfants voulurent partager les dangers du combat. » La Bataille de Saint-Charles se termine dans un bain de sang. Cent cinquante Patriotes meurent au combat tandis que trente soldats anglais sont tués ».

    2/ ...celle de la formation de la Confédération canadienne, née en 1867 :

« Avant 1867, l'Amérique du Nord britannique était un groupement de six colonies indépendantes : la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Canada-Uni (comprenant essentiellement les parties méridionales du Québec et de l'Ontario), Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard et la Colombie-Britannique. Au début, seules les trois premières colonies énumérées ci-dessus constituaient la Confédération, les autres s'y joignirent par la suite, et Terre-Neuve fut la dernière en 1949, à l'intégrer (le reste du Canada actuel se compose de la Terre de Rupert et des Territoires du Nord-Ouest, qui appartenaient à la Compagnie de la Baie d'Hudsonet qui furent cédés au Canada en 1870, et des îles arctiques, qui étaient sous tutelle britannique)".

Les Pères de la confédération

Une confédération canadienne qui s'est faite sans consultation ou consentement populaire, et qui servait surtout les intérêt économiques anglo-saxons qui avaient peur d’une invasion américaine (on parlait aux Etats-Unis d’annexer le Canada-Uni pour se venger du choix de l’Empire Britannique qui avait aidé les rebelles sudistes dans la guerre de Sécession américaine). En se regroupant, les colonies du Canada-Uni se renforçaient.

3/ ... celle de la déportation des Acadiens :

Images de la déportation

 

 En résumé

 « Par le traité d'Utrecht signé en 1713, la partie la plus peuplée de l'Acadie et ses 1 700 habitants sont cédés à la Grande-Bretagne et ils deviennent des sujets britanniques1. Quatre cents soldats britanniques restent sur place et un gouvernement militaire évite à la Grande-Bretagne de devoir créer une législature à majorité acadienne. Dès 1720 les premiers plans de la déportation massive sont dessinés. Le 28 décembre 1720, à Londres, les "Lords of boards" ont écrit : "Il nous semble que les Français de la Nouvelle-Écosse ne seront jamais de bons sujets de Sa Majesté... C'est pourquoi nous pensons qu'ils devront être expulsés aussitôt que les forces que nous avons dessein de vous envoyer seront arrivées en Nouvelle-Écosse"2 » La partie cédée à la Grande-Bretagne prend le nom de Nouvelle-Écosse. La population acadienne passe de 1 700 en 1713 à plus de 15 000 en 1755.   C’est à ce moment que se situe la Déportation, appelée aussi « Le Grand Dérangement » :   En 1755, 1 800 soldats de la Nouvelle-Angleterre arrivent en Nouvelle-Écosse. Ce débarquement est suivi de la prise des forts français par le général Robert Monckton. Lawrence confisque les armes et les embarcations des Acadiens. En juin, il rencontre des délégués acadiens et exige d'eux un nouveau serment d'allégeance inconditionnel en échange du retour des armes. Les Acadiens refusent. Lawrence décréta la déportation des Acadiens au mois de juillet 1755 Lawrence ordonne aux commandants de Beaubassin, Pisiquid et Annapolis Royal d'attirer les hommes français de leurs districts respectifs au fort ou à l'église locale pour que les « instructions du roi » leur soient communiquées; une fois sur place, ils étaient encerclés, puis arrêtés et détenus dans des bateaux1. Ils allaient être déportés à l'extérieur de la province et leurs possessions allaient être confisquées par Sa Majesté1 Des historiens américains estiment que, sur une population totale évaluée entre 12 000 et 18 000 Acadiens en 1755, de 7 500 à 9 000 périrent entre 1755 et 1763, soit des effets de la déportation, soit en tentant d'y échapper. »  

Un roman acadien, récompensé par le Goncourt raconte cette épopée. Pélagie-la-Charette, roman d'Antonine Maillet, raconte le bouleversement qu'a subi l'Acadie lors de la Déportation.  

Quand j’entre à l’université, à la Faculté d’Architecture, j’ai alors 21 ans, je garde vivante cette ambition d’Indépendance, mais je ne fais rien, j’entends - je ne suis pas un militant, - pour promouvoir l’Idée de l’Indépendance. Je suis à mes plaisirs, et peu à mes études.

Pourtant, un certain soir du 24 juin 1968, à la veille d’une élection fédérale qui verra l’arrivée au pouvoir de Pierre Elliot Trudeau, je suis pris dans une manifestation du RIN à Montréal, pris par la police et emprisonné pour 24 heures. Mon procès, qui aura lieu dans l’année qui suit, se terminera par mon inculpation « pour avoir participé à une émeute et avoir troublé l’ordre social », je purgerai ma peine à la prison de Bordeaux.

Le 21 juin 2003, le journal Le Devoir rappelait :

« L'émeute qui a transformé la Saint-Jean-Baptiste en fête nationale" (Jean-Claude Germain - Dramaturge et historien  21 juin 2003  Québec)

"Au moment où il nous quitte, il serait bon de se souvenir que, sans Pierre Bourgault, sans le RIN dont il était le chef et sans l'émeute du 24 juin 1968, la Saint-Jean-Baptiste ne serait pas devenue la fête nationale.  

Il y a 35 ans, le Québec attend un messie et le Canada anglais désespère d'un saint George. Pierre Elliott Trudeau choisit alors d'être ce paladin qui terrasse le dragon du nationalisme sur son cheval blanc. Quant le fier PET ne cabriole pas, il se cabre et lance des ruades verbales qui lui ont déjà valu de remplacer Lester B. Pearson à la tête du Parti libéral fédéral.   À chaque nouvelle bombe felquiste qui éclate, le fier PET bombe le torse, roule les épaules et gonfle les biceps. C'est un agent-provocateur né. «Comme les assassins de Robert Kennedy, vous êtes porteurs de haine et vous allez vous faire mal!» aboie-t-il à Rouyn en menaçant les séparatistes. »

Plus tard, beaucoup plus tard, Marcel Rioux m’initiait à la Sociologie, à la Sociologie critique, à Marx surtout :

« Analysant l'évolution idéologique du Québec depuis le siècle dernier, Marcel Rioux distinguait trois types dominants d'idéologie durant cette période [1].

1/ C'est d'abord l'idéologie de conservation qui domine la société québécoise, définissant cette société comme « porteur d'une culture » qui lui est propre et lui assignant le devoir de préserver l'héritage de ses ancêtres, héritage qui se compose essentiellement de la religion catholique, de la langue française et d'un certain nombre de traditions et de coutumes.

2/ Avec l'industrialisation du Québec et le tournant de la Deuxième Guerre mondiale se développe peu à peu un mouvement de contestation. Il s'oppose à cette idéologie de conservation par une critique systématique du rôle de l'Église, par une critique du pouvoir politique incarné dans l'Union nationale et par une critique de tout le système d'éducation fondé sur les humanités gréco-latines et sur une interprétation traditionnelle de l'histoire nationale. Dans sa partie positive, l'idéologie de rattrapage cherche à combler l'écart entre la culture québécoise au niveau de ses valeurs et de ses symboles et la société québécoise déjà largement industrialisée et urbanisée.

3/Avec les années de la révolution tranquille se développe un troisième type d'idéologie :

L'idéologie du Rassemblement pour l'indépendance nationale se rattache à cette idéologie d'affirmation et de dépassement qui s'est imposée au Québec au cours des années 60. Le R.I.N. a aussi tenté de donner un contenu socio-économique à cette indépendance en préconisant la planification des principaux secteurs d'activité, la décentralisation administrative et la participation des citoyens, cherchant aussi à définir un « socialisme » plus ou moins mitigé qui serait adapté à la situation québécoise.

Ce sont là les deux composantes majeures de l'idéologie du R.I.N. (extraits choisis de : “L’idéologie du R.I.N. : une idéologie d’affirmation.” par Réjean Pelletier)  

Quand je me remémore ces premières années, avec le recul, et regardant en arrière, je me dis que j’ai fait « peu de choses » pour que mon pays devienne un pays. Un de mes fils milite aujourd’hui à « Option Nationale », bien lui en fasse. Il fait déjà plus que moi.

D’autres années, dans cette longue marche vers l’Indépendance ont eu leur importance : elles se résument pour moi à la grande aventure du Parti Québécois, depuis sa création par René Levesque, l’élection de ses premiers députés en 1970, son accession au Pouvoir en 1976, et ses réélections qui ont suivi.

Est-il en panne aujourd’hui ?

Je n’en ai aucune idée, je suis trop loin ; et je sais que d’autres partis se forment et demandent cette INDÉPENDANCE que tant de milliers de militants québécois exigent depuis 1959. D’autres Bloc Québécois, Québec Solidaire et Option Nationale verront sans doute le jour et ouvriront encore plus la voie vers...

Et, à côté, il y a des hommes et des femmes aussi qui ont tracé la voie, chaque jour, et sans relâche, des artistes, des politiques, des Monsieur tout le monde, des gens importants, du petit monde aussi ; des syndicats également, des organisations à la marge de toutes sortes... il serait trop long de les nommer tous, si même cela était possible...

Mais moi, j’aime bien Pierre Perreault,

et ses films plus québécois que nature,

et le contrasté Pierre Falardeau,

et ses postures pas si bouffonnes ...

J’aime bien Vigneault,

et ses poèmes du cœur,

et Fred Pellerin

et son monde...

J’aime bien me rappeler mon prof de finance, Jacques Parizeau, et ses démonstrations pour un budget québécois qui tienne... et mes professeurs de Sociologie, Delmas Levesque (et son texte « L’expérience québécoise ») et Marcel Rioux, si libre penseur, et Guy Rocher, qui n’a de cesse de se préoccuper de l’Éducation avec un grand É...   Il y en a tant et tant que j’aime... mieux vaut m‘arrêter... ou y revenir...

Pot-Pourri de Québécois

Je me rappelle cependant que, pendant toutes mes années d’enseignement dans une faculté de gestion à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), je n’ai eu de cesse de mettre en perspective, de contextualiser, de rappeler, de soutenir dans tous les débats, et sur toutes les tribunes, l’Idée de l’Indépendance du Québec.

Récemment, on m’a demandé de faire une petite causerie sur la question de l’Indépendance et, surtout, sur cette fameuse phrase du Général de Gaulle « Vive le Québec Libre » prononcée lors d’une brève allocution, en 1967, au balcon de l’Hôtel de Ville de Montréal. Je vis maintenant en France, et cette causerie a eu lieu à la demande d’un petit groupe de retraités français et au local de leur association à l’automne 2011, en cette petite ville de St-Jean du Gard.

À cette occasion, j’ai dû me re-souvenir de cette histoire que je viens d’amorcer.

Alors, qu’est-ce que je leur ai dit ?

Mes objectifs étaient les suivants : - faire un peu l’histoire du Québec, - faire un peu l’histoire de l’idée d’Indépendance, - montrer si possible (c’était leur demande) l’importance qu’a eu ce « Vive le Québec Libre » de De Gaulle, - m’amuser un peu avec eux (j’entends faire cette causerie sur le ton de la bonhommie et du partage : j’étais aussi intrigué par leur demande), - bref, je crois bien, que je voulais, ce faisant, me re-québéciser, moi l’exilé, avant que je ne perde pied complètement.

Des événements récents au Québec, - cette grève étudiante qui prend l’allure d’un mouvement social plus large, - cette marche dans Montréal pour célébrer cette 42ième rencontre de la « Journée de la Terre » qui a réuni plus de 200,000 personnes, oui, tout cela me confirme que je dois rester plus alerte, plus au fait, et surtout, plus sensible à la réalité de mon pays d’avant que je ne me retraite en France.

On chante notre pays que l’on aime partager :

Raoul Duguay nous a donné un hymne :

Gilles Vigneault également (« Gens du pays ») :

Les métis ont aussi leur hymne :

Les Acadiens ont leur hymne :

Mais aujourd’hui toujours, on doit encore entendre (pour ceux qui ne le savent pas) ce type de merde d’anglophone anti-Québec. Mais lui, ce qu'il n'a pas compris, c'est qu'un jour il va se retrouver le nez dans la merde... la sienne.

Je m’arrête là pour ce soir.

(à suivre)


[1]    Marcel Rioux, la Question du Québec, Paris, Seghers, éd. revue et augmentée, 1971.