Faits-divers
ILS RECLAMENT JUSTICE POUR AMINE BENTOUNSI
Par
Jean-Emmanuel Nicolau-Bergeret
Le rendez-vous était fixé à 18h00, mais ils étaient arrivés par petits groupes dès 17h30 sur la place Jeanne d'Arc à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), beaucoup portant un tee-shirt blanc arborant de face la photo d'Amine et de dos l'inscription " Que justice soit faite ".
Sa soeur réclame justice
Amine Bentounsi, récidiviste de 29 ans qui n'avait pas rejoint la prison de Chateaudun après une permission à l'été 2010 et qui faisait l'objet d'un mandat d'arrêt depuis, est ce jeune homme qui, suite à un appel téléphonique anonyme passé d'une cabine téléphonique du centre-ville, avait été mortellement blessé par un policier lors de sa tentative d'interpellation le 21 avril dernier sur le territoire de notre commune, atteint dans le dos par une des quatre balles tirées par le fonctionnaire.
Ce dernier avait alors avancé la thèse de la légitime défense, expliquant que le fuyard l'avait braqué avec une arme. Une défense mise à mal par les premiers éléments de l'enquête dont l'autopsie et un témoin de la scène. Depuis, le policier a été mis en examen pour " homicide volontaire ", une qualification assez rare qui a immédiatement suscité de nombreuse manifestations de soutiens de ses collègues dans toute la France. Le fonctionnaire a depuis été placé sous contrôle judiciaire, muté en province avec maintient de son salaire.
Amal Bentounsi, soeur du jeune homme qui a été inhumé mercredi dans le carré Musulman d'un cimetière de Meaux dont il était originaire, n'a cesse depuis le drame de réhabiliter la mémoire de son frère et de réclamer justice. Arrivée vers 18h15 hier à Noisy-le-Sec, la jeune femme a déclaré aux journalistes : " Je n'appelle pas à la vengeance, mais nous réclamons la justice. C'est une marche blanche pour dénoncer toutes les bavures policières ". Tenant une banderole sur laquelle on pouvait lire " Ce petit frère qu'on assassine. Non au permis de Tuer " (photo ci-dessous), la jeune femme dénonce devant les médias : " Tous les jours, il y a des flics qui jouent les cow-boys. J'ai envie qu'on dise stop aux bavures et non au permis de tuer que les syndicats de police réclament ", répondant ainsi à la réforme de la légitime défense réclamée depuis les faits par la base des fonctionnaires de police lors de manifestations spontannées à travers toute la France, prenant de court ainsi leurs syndicats professionnels.
Le cortège d'une centaine de personne s'est ébranlé vers 20h00 de devant le café où Amine Bentounsi se trouvait lorsque la police a tenté de l'interpeller, puis a emprunté la rue Frépillon avant de marquer un temps d'arrêt à l'endroit même où Amine Bentousi a été mortellement touché avant de se diriger sous une pluie battante en direction du commissariat de police.
Les manifestant ont ensuite repris la direction du centre-ville où le cortège s'est disloqué dans le calme.
" Il ne méritait pas çà. Il faut que tu en parles "
C'est en ces termes que Salim* m'évoque Amine Bentounsi. " J'ai sans doute été l'un des derniers a lui avoir serré la main " m'explique ainsi ce trentenaire habitant le centre-ville, présent lorsque la police est arrivée il y a quinze jours pour l'interpeller. " Il venait ici assez souvent. Je le connaissais bien. C'était un garçon sans histoire. Il venait boire un coca ou un café, jamais d'alcool, payait sa conso et n'avait jamais un mot plus haut que l'autre. Et franchement, jamais je ne me serai douté qu'il avait une arme sur lui. Il était recherché parce qu'il était pas revenu de permission. Mais il n'avait pas commis de braquage ! ". Et ce militant politique actif sur la commune de poursuivre : " J'étais là quand la police à débarqué. A leur arrivée, ils ont dits qu'il venaient pour un contrôle d'identité. J'ai même pas eu le temps de sortir mes papiers " continue-t-il en miman le geste pour attraper ses papiers dans sa poche . " Amine et un autre jeune se sont enfuis par la rue Frépillon. Mais la grenade, il ne l'a pas jetée en direction des policiers. Il l'a jetée dans un buisson. Je suis catégorique. " tient à souligner celui que je croise de temps à autres lors de tractages sur le marché ou lors de réunions publiques.
Salim* est en colère contre les télés. " Cà, il faut que tu en parles. L'autre jour, un de mes potes a été inteviewé par plusieurs télés. Il leur a parlé d'Amine comme je t'en parle aujourd'hui. C'était pas un type "dangereux". Oui, il avait fait des conneries. Oui, il avait été le plus jeune incarcéré de France. Mais il n'était pas non plus l'ennemi public n°1 ! Tu parles, aucune télé a diffusé son témoignage ! Ça collait pas avec l'image qu'on a voulu en donner ".
Pour Salim*, la légitime défense ne tient pas. " Quand t'es un bon flic, t'a pas besoin de tirer quatre balles pour neutraliser un mec. Un seul tir de sommation aurait suffit, il se serait rendu. En plus il y a un témoin. " dit-il persuadé d'une bavure.
Nous continuons à discuter longuement d'Amine Bentounsi en buvant un café avant de poursuivre sur les élections de dimanche, lui qui a régulièrement collé les affiches officielles d'un des deux finalistes.
La nuit est tombée sur Noisy-le-Sec. Je retrouverai Salim* à la mairie dimanche soir. Pour les résultats.
Auteur : Jean-Emmanuel Nicolau-Bergeret
© 06 mai 2012 - JENB Productions - Noisy-le-Sec
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* Le prénom a été changé à la demande de l'interessé.