Le réveil politique sans gueule ni langue de bois de Serge Federbusch sur Atlantico !
D’abord, saluons le remarquable discours de Nicolas Sarkozy, plein de retenue et de dignité. Il a su en quelques mots calmer la colère de ses partisans pour les élever au dessus du ressentiment. Ensuite, on doit au president sortant, quelles que furent ses erreurs, la reconnaissance que la réforme de la France est une tâche quasi-impossible tant le conservatisme est grand dans notre pays. Repousser l’âge de départ à la retraite de deux ans met des millions de gens dans la rue pendant des semaines. Que provoquerait la refonte drastique de l’Etat et du système de protection sociale qui est pourtant indispensable ? Il serait téméraire d’affirmer que, dans le contexte de crise grave connu depuis 2008, on pouvait le faire sans risquer une quasi guerre civile. Nicolas Sarkozy est loin d’avoir démérité et son rôle sera rapidement réévalué.
Dans l’immédiat, l’objectif de François Hollande est de gagner les élections législatives. N’oublions pas en effet que le pouvoir ultime se situe au sein de l’Assemblée nationale en cas de désaccord avec le président, sauf pour ce dernier à manier l’arme dangereuse du referendum. Jusqu’au 18 juin, François Hollande est donc très loin d’avoir toutes les cartes en main. Pour assurer sa vraie victoire, il va multiplier les mesures démagogiques prises par voie réglementaire : hausse de l’allocation de rentrée scolaire, gel du prix de l’essence, baisse symbolique du traitement du president et des ministres, parité hommes-femmes au gouvernement. Il va tenter aussi d’obtenir quelques declarations d’intention de gouvernements étrangers formulant des voeux pieux sur le retour de la croissance et la fin de l’austérité en Europe. Sera-ce suffisant ?
De trois choses l’une.
Soit l’exercice est réussi, ce qui est tout à fait possible, et le PS a la majorité seul à l’Assemblée. Gouverner sera alors plus facile et Hollande laissera son premier ministre s’exposer au quotidien, tout en se réservant les généralités et les annonces agréables. Soit le PS a besoin du Front de Gauche et des Verts pour atteindre la majorité absolue. Il sera plus délicat de faire passer les renoncements aux promesses de campagne et le premier ministre se grillera rapidement. Soit, enfin, l’UMP remporte les legislatives et le quinquennat Hollande sera de facto interrompu jusqu’à dissolution de l’Assemblée si l’occasion se présente. Cette dernière hypothèse a toutefois un degré de probabilité très faible. Hollande disposera vraisemblablement d’une majorité absolue ou relative pour le PS.
Tout va dépendre ensuite de l’environnement économique international et de l’évolution de la crise en Europe. Ne prévoyant aucune réforme structurelle en France, Hollande est en effet tributaire d’une amélioration de la conjoncture économique pour s’en sortir. Les redistributions par l’impôt qu’il prévoit ne peuvent qu’être au mieux un jeu à somme nulle pour l’économie intérieure.
Mais il faudrait un fort rebond de l’activité mondiale pour que les choses aillent un peu mieux en France. Dès lors en effet que la BCE ne veut ou ne peut faire baisser le taux de change surévalué de l’Euro, l’activité dans l’Euroland ne redémarrera pas suffisamment quand bien même les taux d’intérêt resteraient au bas niveau d’aujourd’hui. Si par malheur ces taux remontaient, l’étau se refermerait encore plus vite sur l’économie française.
Il est peu probable que le nouveau president obtienne autre chose que des bonnes paroles d’Angela Merkel et la poursuite prudente de la politique de planche à billets de Draghi, dont l’efficacité va d’ailleurs déclinant. La chancelière allemande n’a aucun intérêt à sembler laxiste et à risquer l’épargne des Allemands pour faire plaisir à son partenaire français.
Avant la fin de 2012, si l’activité économique n’a pas redémarré de manière tangible, François Hollande va donc devoir brutalement réveiller ses électeurs et leur annoncer l’austérité sans prononcer ce mot terrible. S’il s’y refuse, il lui faudra faire face à la perspective de quitter l’Euroland. Mais il n’a ni les moyens politiques ni le discours de vérité qui seraient nécessaires pour affronter une telle aventure. Le score de ce deuxième tour, où il obtient moins de 52 % malgré les terribles handicaps du president sortant et le discours convenu et creux qu’il a tenu à Tulle en sont déjà les preuves.
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