Magazine

Duo comique

Publié le 31 décembre 2007 par Maxd
Dans Le Miroir des idées, Michel Tournier nous apprend comment apparut l’Auguste, clown rouge et inséparable compère au cirque du clown blanc. Ce dernier, au début, était seul à amuser la galerie du petit cirque de village qui sillonnait les campagnes. Poudré à frimas, élégant, habillé de soie, un sourcil relevé et dédaigneux, affublé d’un chapeau conique, chaussé de fins escarpins vernis et le mollet galbé sous des bas blancs immaculés, le clown blanc choisissait dans les gradins le plus rougeaud, le plus rustre et le plus lourdaud des spectateurs pour faire crouler le public de rire à ses dépens et le tourner en ridicule. C’est ainsi que naquit ce fameux duo comique, de l’Auguste au gros nez rouge, maladroit, grotesque, mal fagoté dans ses vêtements trop larges et ses souliers interminables, et du clown blanc, l’homme raffiné, sérieux, rationnel, ironique, maniant le langage au deuxième degré. Car tout oppose ces deux clowns, l’un, le blanc, faisant rire le public sur le dos parfois bossu de l’Auguste mais qui “reste intact, hors d’atteinte, le rire qu’il déchaîne ne l’éclabousse pas, c’est une douche destinée au rouge qui est là pour encaisser… Rien n’est trop distingué pour le blanc… Rien n’est trop burlesque pour le rouge”. Partant de l’idée qu’on peut retrouver ces deux personnages dans la vie, Michel Tournier nous parle des clowns qui nous gouvernent ou plutôt qui nous ont gouvernés, classant parmi les clowns rouges, outre Napoléon et Mussollini, De Gaulle, Georges Marchais, Jacques Chirac et Raymond Barre, et parmi les clowns blancs Talleyrand, François Mitterrand, Valery Giscard d’Estaing et Edouard Balladur. À ces derniers j’ajouterais volontiers, malgré son teint jaunasse, Dominique de Villepin. Avouez qu’on l’imagine bien avec son chapeau en cône, les bas blancs et tout et tout ! Quant à notre président actuel dont l’écrivain évidemment ne parle pas puisque Nicolas Sarkozy était encore très loin de la magistrature suprême lorsque fut publié en 1994 Le Miroir des idées, je vous laisse le soin de le classer dans l’une des deux catégories, celle des clowns blancs ou celle des clowns rouges, mais, en ce qui me concerne, c’est dans la seconde que je le mets sans hésitation et, par-dessus le marché, parmi les plus talentueux des clowns rouges avec, comme compère, évidemment, le non moins talentueux clown blanc au nom de François Fillon.

Retour à La Une de Logo Paperblog