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Le mythe des super banques canadiennes

Publié le 14 mai 2012 par Copeau @Contrepoints

Depuis 2008, les six grandes banques ont reçu une aide totale de 114 milliards $. En proportion, ça ressemble beaucoup à l’aide qu’ont reçue les banques américaines de leur gouvernement au plus fort de la crise. Sauf qu’ici, les médias en ont très peu parlé.

Par David Descôteaux, depuis Montréal, Québec.

Le mythe des super banques canadiennes
Le mythe des super banques canadiennes vient d’en prendre un coup. Nos grandes banques ont eu besoin de notre aide pendant la crise financière, et pas à peu près.

C’est David Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives, qui a déterré les chiffres. Enfin, il a fait une estimation. C’est tout ce qu’il a pu faire, car la Banque du Canada n’est pas très transparente dans ce dossier, semble-t-il.

Depuis 2008, les six grandes banques ont reçu une aide totale de 114 milliards $. Des prêts à court terme de la Banque du Canada, de la Réserve fédérale des États-Unis, ainsi que des rachats de titres hypothécaires par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). En proportion, ça ressemble beaucoup à l’aide qu’ont reçue les banques américaines de leur gouvernement au plus fort de la crise. Sauf qu’ici, les médias en ont très peu parlé.

Oups !

À première vue, ça semble embarrassant pour le ministre des Finances Jim Flaherty et le premier ministre Harper. Ces deux-là ne se sont pas gênés, depuis le début de la crise, pour vanter la « solidité » de nos banques. « Nous avons les seules banques dans le monde occidental qui n’ont pas besoin de bailout (sauvetage avec l’argent public) ou de quoi que ce soit du genre », avait dit Stephen Harper sur les ondes d’une chaîne américaine en 2009.

Mais attention. L’association des banquiers canadiens s’est empressée de préciser que ce n’était pas un bailout, mais bien un « soutien à la liquidité ». Pendant la panique, le crédit se faisait rare sur les marchés. Pour s’assurer que les banques puissent continuer à se financer et à prêter aux consommateurs, l’État, avec l’aide de la SCHL et de la Banque centrale, est intervenu. D’ailleurs les banques ont, à ce jour, remboursé tous ces prêts. Et si le but était de maintenir en santé le marché immobilier, on peut dire que l’opération a fonctionné. D’ailleurs peu de temps après le renflouement de liquidités par la SCHL, les taux d’intérêt hypothécaires diminuaient.

N’empêche que la CIBC, la BMO et la Banque Scotia ont eu besoin de financement qui égalait ou surpassait leur valeur en bourse. Sans cette aide gigantesque, est-ce que leur problème de « liquidité » en serait devenu un de « solvabilité » ? Si la réponse est oui, appelons ça un bailout. Mais on ne le saura probablement jamais.

Trop gros pour tomber

De toute façon, rien de tout ça ne devrait nous surprendre. L’oligopole bancaire canadien est too big to fail, comme disent les Américains. Et au moindre problème, le gouvernement sera là pour l’aider.

Dans son étude, Macdonald cite le PDG de la Banque TD, Edmund Clark, lors d’une conférence en 2009. Ce dernier déclarait à des investisseurs : bien que cette garantie du gouvernement ne soit pas explicite, « quelles sont les chances que la TD ne soit pas sauvée si elle faisait quelque chose de stupide ? » Cinq jours plus tard, un haut placé du gouvernement canadien tapait sur les doigts de M. Clark, affirmant qu’il était faux de croire une telle chose.

Cette chose s’appelle un aléa moral. Pile je gagne, face les contribuables perdent. Sachant que le gouvernement est là pour corriger nos erreurs, c’est tentant de prendre plus de risques. Mais rassurez-vous. On dit que les banques canadiennes sont bien gérées et ne prennent pas le genre de risques que les banques américaines ont pris.

Gardons-nous quand même un brin de scepticisme. Après tout, plusieurs croyaient aussi que les banques canadiennes n’avaient pas eu besoin d’aide pendant la crise…


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