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Selon Koztoujours, la droitisation de l'UMP va l'enterrer

Publié le 13 mai 2012 par Sylvainrakotoarison

(dépêche-blog)
Une autre stratégie était, et reste, possible à droite
Koztoujours, tu m'intéresses !
Posted: 11 May 2012 02:32 AM PDT
Le pistolet à un coup a encore tiré. En vain, par définition. L’échec à la présidentielle vient s’ajouter à la liste continue des échecs électoraux successifs de la droite depuis 2007.
Pas un seul scrutin remporté depuis lors et pourtant, aujourd’hui, les Buisson, les Peltier et leurs soutiens martèlent, avec fureur parfois, qu’il n’y a pas d’autre stratégie possible. Avouez qu’il y a de quoi rester perplexe.
En jeu ? Pas une petite revanche post-électorale mais l’orientation de l’UMP et d’une part de la société française. Pas un règlement de comptes mais une conception de la politique.
Une seule stratégie possible : celle qui conduit à l’échec ?
Quand je dis que la droite n’a pas remporté un seul scrutin depuis 2007, j’omets une élection : les européennes. Les européennes, le seul scrutin qui ne se soit pas déroulé sur fond de polémique sur l’identité nationale, les minarets, la burqa ou la laïcité. Au lieu de cela, ce scrutin s’est déroulé sur la base de l’incontestable réussite de la présidence de l’Union Européenne et il a été mené, en première ligne, par Michel Barnier, un homme politique aux antipodes des personnalités clivantes chéries par l’ »école Buissonnière ». 2009, c’était aussi l’époque où, après la crise financière, on entendait Barnier et Fillon parler d’une économie de la sobriété… Et c’est, répétons-le, l’unique scrutin qui a été remporté par la droite. Les municipales ont été perdues, les régionales ont été perdues, les cantonales ont été perdues, les sénatoriales ont été perdues. Et l’homme qui aurait pensé la « stratégie », avec une telle constance dans l’échec que ce mot fait tristement sourire, explique sans ciller qu’il n’y en avait pas d’autre possible. Il n’y a qu’une stratégie possible, elle ne mène qu’à l’échec. Alors, dira-t-on, quitte à perdre, autant que ce soit sur nos idées, non ? Comme l’a déclaré Jean-René Lecerf, trop tôt peut-être,
   « Si c’est pour perdre il vaut mieux perdre les armes à la main. J’aurais préféré que le combat se fasse sur les valeurs qui sont les nôtres. »
Mais à ma droite, on persiste, pensez donc : l’occasion est unique de droitiser définitivement l’UMP. Alors, on poursuit la politique sondagière, et la relecture à base de graphiques d’apparence rigoureuse.
La stratégie Buissonière a plombé Sarko pendant cinq ans
De façon symptomatique et révélatrice, le si Buissonnier Salon Beige m’interpelle. Son attention pour l’avenir de l’UMP est touchante, lui qui diffuse habituellement plutôt les bulletins de santé de Bruno Mégret, Carl Lang ou Bruno Gollnisch… Le Salon Beige produit un graphique. A l’école de Peltier et de Buisson, les voilà analystes de l’opinion. Il faudrait comprendre en somme que Nicolas Sarkozy a perdu du terrain chaque fois qu’il s’est écartée de leur ligne. En premier lieu, l’épisode du Traité de Lisbonne serait responsable de la plongée de Nicolas Sarkozy dans la tourmente. Il est possible qu’il ait eu un impact. Mais les rédacteurs oublient opportunément le « bouclier fiscal », instauré par la loi TEPA adoptée le 21 août 2007. Il est trop facile d’attribuer une évolution à un fait unique. Mais il ne sera pas dit que nous ne sommes pas joueurs. L’examen de l’évolution de la cote de confiance (Sofres, mais les autres instituts ne montrent pas une évolution différente) de Nicolas Sarkozy depuis 2007 illustre qu’après ce premier et impressionnant décroché, il s’en produit un autre.
Entre octobre 2009 et avril 2010, Nicolas Sarkozy perd pas moins de 9 points. 39% de Français lui faisaient confiance en octobre 2009, ils ne sont plus que 29% en avril 2010. Que s’est-il passé à cette époque ? C’est le dramatique épisodedu si mal mené débat sur l’identité nationale. Discuté dès le mois d’octobre, il s’ouvre en novembre, se clôt en avril… Débat sur l’identité nationale : -9.
Le mois de mai 2010 dessine une légère embellie. Pensez donc : la cote de confiance passe à 30%. C’est l’éclate, 30%. Las, elle rechute immédiatement de 4  points et s’établit à 26% en juillet 2010. Mai, juin, juillet 2010 ? C’est le débat sur la burqa. Au mois de mai 2010, l’Assemblée vote la résolution sur la burqa. En juillet 2010, elle vote la loi d’interdiction.  Juin 2010, c’est aussi l’affaire du saucisson-pinard… Débat sur la burqa : – 4.
Un autre exemple ? En avril 2011, l’UMP tient un débat sur la laïcité que d’aucuns qualifient de débat sur l’islam. En avril, la cote de confiance de Nicolas Sarkozy est à 23%. En mai, elle est à 20%. Au plus bas de tout le quinquennat… Débat sur la laïcité : -3.
Il est trop facile d’attribuer une évolution à un fait unique, disais-je. Mais la répétition interpelle. On comprend à tout le moins que les bénéfices de la stratégie droitière sont au minimum incertains.
A l’inverse, la cote de popularité de Nicolas Sarkozy bondit de 10 points en juin 2009. Effet du succès des européennes, probablement. La seule élection qui ne se soit pas jouée sur fond de dénonciation de l’islam.
Et lorsqu’elle bondit encore de 6 points, en novembre 2011, ce n’est pas parce que Nicolas Sarkozy a lancé quelque débat sur la taille des babouches, mais très vraisemblablement pour son rôle international dans la tourmente des finances publiques.
Les Buissoniers oublient aussi que la ligne droitière compte pour beaucoup dans l’antisarkozysme, et que ce dernier a servi de ciment à la campagne de Hollande. À force de vouloir être clivant, il a suffi à François Hollande de jouer les passe-murailles. Démonstration vivante qu’une présidentielle ne se joue pas nécessairement sur le clivage, les Français ont élu un candidat pour lequel la transparence a tenu lieu de stratégie. Depuis dimanche, Nicolas Sarkozy fournit un contre-exemple de ce qu’on lui a reproché : il affiche sérénité, panache, stature et capacité de rassemblement. Vrai ou faux, combien de fois ai-je lu et entendu, depuis dimanche, par certains de ses détracteurs que les choses auraient pu être différentes s’il avait plus souvent montré ce visage-là ? On me dira que la popularité ne fait pas un vote, mais l’impopularité non plus.
L’efficacité même de la stratégie droitière sur les reports de voix entre les deux tours est douteuse, comme le relève Dominique Reynié sur France Culture, alors pourtant que Nicolas Sarkozy n’a pas laissé l’ambiguïté planer.
Une seule stratégie peut-être… quand on a carbonisé toutes les autres
Alors non, décidément non, il n’y a pas qu’une seule stratégie possible pour la droite. Ou alors une seule stratégie possible pour Nicolas Sarkozy, après ce quinquennat.
Une fois encore : le « curseur » ne s’est pas déplacé, on l’a déplacé. L’électorat ne s’est pas droitisé, on l’a droitisé.
Vous pouvez déjà le constater dans votre entourage. Pour un peu plus de sérieux, vous vous reporterez à ce débat sur France Culture, repris par Mediapart ((vous connaissez l’expression : « ce n’est pas parce que Mediapart dit que le ciel est bleu que je vais dire le contraire »)) : les politologues Nonna Meyer et Stéphane Rozès le soulignent. Ce dernier signale même le changement d’attitude des électeurs UMP à l’égard du FN, directement induit par le discours de Grenoble :
   « Avant le discours de Grenoble, un tiers d’entre eux voulaient une alliance avec le FN. Entre le discours de Grenoble et la présidentielle, environ la moitié, au moment du premier tour jusque 60 %, et aujourd’hui 66 %. »
L’électorat de droite n’est pas plus moutonnier qu’un autre, mais on le mène où l’on veut, lui aussi. Et on en subit les conséquences. Car, comme le souligne cet autre politologue, Pierre Martin, Nicolas Sarkozy s’est « enfermé dans un piège« . Il s’est mis lui-même dans un corner. Toujours contraint de surenchérir, parce que l’électeur s’habitue à tout, il s’est placé d’office dans l’incapacité de parler à un autre électorat que l’électorat FN. A supposer qu’il n’y ait plus eu qu’une stratégie possible, ce n’est pas en raison d’une quelconque fatalité, mais parce qu’ils ont saboté toutes les autres.
S’il ne pouvait plus parler qu’à l’extrême-droite, c’est qu’il s’était lui-même irrémédiablement coupé de tout espace au centre.
Pas de fatalité pour la droite
Il n’y a pas de fatalité, pas de destin. L’UMP – la droite – n’est pas condamnée à aller chercher ses thématiques dans le programme du FN. Cela ne signifie pas non plus qu’elle devrait ignorer les questions d’immigration et de sécurité. Gare au piège rhétorique grossier de ceux qui vous répondent : « Donc, on ne parle plus d’immigration ? D’insécurité ? ». On peut traiter un sujet sans en faire son horizon.
Il ne doit pas y avoir de fascination non plus. A titre d’exemple, lorsque Jean-Paul Garraud déclare, dans un propos teinté de défaitisme et de soumission,  que « la dynamique est sur le FN depuis 2002« , il ne s’agit pas d’une donnée factuelle mais d’un souhait personnel d’alliance. Il n’y a aucune illusion à avoir sur les raisons qui poussent les uns et les autres, sous couvert de sondages et de courbes de popularité, à prôner une stratégie droitière. Ils ne font que valider leur pente de toujours.
Comme illustré précédemment, on peut faire dire aux chiffres une chose et son contraire.
Restent les convictions, et la conception que l’on se fait de la politique : faut-il suivre les tendances ou les imprimer ?
Koztoujours, le 11 mai 2012


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