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Mitterrand n’était pas socialiste en économie, Hollande ne le sera pas non plus

Publié le 16 mai 2012 par Copeau @Contrepoints

L’élection de François Hollande donna lieu à une comparaison : celle de mai 1981. Ainsi, François Hollande serait le deuxième Président dit « socialiste » de la Ve République ; le conditionnel est de rigueur : il n’en n’est rien.

Par Loic Floury

Mitterrand n’était pas socialiste en économie, Hollande ne le sera pas non plus
La question est : François Hollande, ce nouveau Mitterrand ? Si ce premier est aussi socialiste en économie que le dernier, les libéraux n’ont rien à craindre. François Mitterrand symbole du socialisme économique, c’est Karl Marx symbole du capitalisme. Élu en 1981, Mitterrand tentera d’être socialiste jusqu’en 1983 : l’année de son élection verra une augmentation massive du SMIC (10 %), des allocations familiales et logement (25 %) et handicapés (20 %) tandis que le 13 février 1982, une loi de nationalisation est votée. L’échec de cette politique keynésienne, non contente de creuser les déficits, forcera Mitterrand à engager le célèbre « virage de la rigueur » dès 1983 sous un troisième Gouvernement Pierre Mauroy. En 1984, la crise sidérurgique dans le nord de la France verra la fermeture ou reconversion des anciennes mines de charbon : le monde ouvrier sous le choc permettra la première percée du Front National, notamment aux élections européennes. La période sera un désastre économique : Mitterrand dévaluera le franc en 1981, 1982 et 1983, les salaires ne seront plus indexés sur l’inflation prix dès 1982. Des réformes sociales sont cependant adoptées : la peine de mort est abolie, une loi d’amnistie sur les « délits homosexuels » est votée, de même que la semaine de 39 heures, la 5e semaine de congés payés et la retraite à 60 ans.

De 1984 à 1986, le gouvernement Fabius rentre en scène et permettra l’adoption de l’Acte Unique Européen, symbole ultime du socialisme ! Laurent Fabius bricolera d’ailleurs une loi sur les grandes fortunes, les exonérant fiscalement pour la détention d’œuvres d’arts et d’antiquité, notamment pour favoriser sa famille et son père André, détenteur de la plus grande collection de tableaux de Georges de la Tour.

La France connait alors sa première cohabitation : de 1986 à 1988, ce sera Jacques Chirac de prendre les choses en mains : la loi supprimant l’autorisation administrative de licenciement est promulguée, les banques et entreprises publiques sont privatisées et l’ordonnance du 1er décembre 1986 instaurera la liberté des prix et de la concurrence.

Durant son deuxième septennat, François Mitterrand confiera le Gouvernement à Michel Rocard de 1988 jusqu’en 1991 : la suppression du contrôle des changes et la signature de la Convention Schengen (très socialiste elle aussi) sont au programme.

Le Gouvernement Cresson (1991-1992) viendra rajouter une pierre à l’édifice européen avec la signature du Traité de Maastricht ; sur le plan de la communication politique en revanche, l’image d’une femme Premier Ministre est désastreuse : Edith Cresson cumule les bourdes, la presse se régale. Lui succèdera un bref Gouvernement Bérégovoy (1992-1993) avant que ce dernier ne se suicide, éclaboussé par un scandale de corruption, et ne laisse sa place à Balladur pour une deuxième cohabitation jusqu’en 1995, date à laquelle l’ancien Ministre Jacques Chirac est élu.

Au total, sur deux septennats, la France cumule sept Gouvernements,  deux cohabitations et… Un mort. Joli record ! Si François Mitterrand introduisit des réformes sociales en début de mandat, il n’en possède pas moins le monopole : à l’exception des revendication issues du Front Populaire de 1934, la droite française a voté TOUTES les réformes sociales jusqu’à aujourd’hui. Si François Hollande se dit aujourd’hui de son héritage, la droite comme le monde n’a aucun soucis à se faire, à la différence de ses électeurs, futurs premiers déçus. La finance non plus n’a rien à craindre, Hollande a lui même affirmé aux journaux anglo-saxons « La gauche a été au gouvernement pendant quinze ans au cours desquels nous avons libéralisé l’économie, ouvert les marchés à la finance et aux privatisations. Il n’y a rien à craindre ». Quelle belle dualité de discours…

En définitive, ce qui changera ces cinq prochaines années, ce sera la politique, non l’économie : la droite conservatrice s’opposera à une gauche dite « libertaire ». Le candidat « socialiste », s’il l’est autant que le fut Mitterrand, ne pourra rien faire en économie : les règles ont changés depuis les années 1980. L’Europe s’est construite et les marchés financiers responsabilisent les États ; la mondialisation (détestée à tort, elle est la meilleure chose qui soit arrivée à l’Humanité ce dernier siècle), possède ses règles.

Mieux : les citoyens ont une arme redoutable dans les mains grâce à Nicolas Sarkozy, la Question Prioritaire de Constitutionnalité. Le matraquage fiscal proposé par le PS est sans conteste une atteinte délibérée à la propriété : le Conseil Constitutionnel sera le pire ennemi du Gouvernement sur cette question. François Hollande n’est pas socialiste en économie et ne le sera jamais : l’échec cuisant de cette doctrine en Europe aurait dû démontrer aux français l’irréalisme et la démagogie du programme qu’il leur proposait. Il est d’ailleurs fort risible de voir que l’Histoire se répète : la crise ouvrière de 1982 verra la percée du FN, les délocalisations (jugées à tort dévastatrices) engagées bien avant 2007 verront Marine Le Pen gratifiée d’un score d’environ 18% au 1er tour. Au regard du monde actuel, il est aisé d’affirmer qu’Hollande ne pourra pas être socialiste ; au regard de l’Histoire, on peut même affirmer ce qui se passera le cas échéant : nous revivrons « le virage de la rigueur ».

Lire aussi : Mitterrand pendant la seconde guerre mondiale, un article d’archives de Contrepoints

Ou encore : Hollande, c’est bon pour le business libéral


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