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Entretien avec Gaspard Koenig

Publié le 18 mai 2012 par Copeau @Contrepoints

Né en 1982, Gaspard Koenig est écrivain et philosophe français. Se revendiquant de l’école libérale, celui-ci a d’abord mis ses idées au service des Français en étant la plume de Christine Lagarde, de 2007 à 2009. Depuis, il a intégré la BERD, localisée à Londres. C’est dans cette ville où il réside désormais qu’il a décidé de se présenter aux législatives 2012, qui vont permettre pour la première fois de désigner 11 députés représentant les Français de l’étranger, sous l’étiquette du PLD. Il a accepté de répondre aux questions de Contrepoints.

Entretien avec Gaspard Koenig

Contrepoints : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi  vous vous présentez aux législatives 2012, dans votre circonscription ?

Gaspard Koenig : Mon parcours professionnel m’a mené à travailler au sein de la BERD, que j’ai intégrée il y a trois ans. Vivant donc à Londres depuis cette période, c’est tout naturellement que j’ai décidé de me présenter dans cette circonscription. Je mène principalement campagne dans cette capitale, même si cette circonscription, la 3ème, regroupe en réalité toute l’Europe du Nord. Ce qui représente environ 100 000 Français inscrits au consulat.

Faire campagne dans ces conditions implique-t-il des méthodes différentes ?

C’est vrai, on est loin de l’image du député présent depuis 30 ans, qui chaque semaine fait le marché à la rencontre de ses électeurs. Cette fois, tout est nouveau, tout est différent. La circonscription est extrêmement vaste ; elle s’étend sur une dizaine de pays. De fait l’électorat est très éclaté. Il y a bien quelques « poches » de Français, dans certains quartiers des grandes villes comme ici à Londres, mais cela reste diffus. Dans mon cas, j’ai plus facilement accès, par mon travail et ma situation géographique, aux Londoniens, ce qui me permet d’aller à leur rencontre, organiser des réunions et des meetings pour les sensibiliser aux législatives en général et ma candidature en particulier.

La nouveauté de cette élection est-elle un avantage ou un défaut ?

C’est difficile à dire. Ce qui est très intéressant, c’est que comme cela concerne un nombre relativement restreint de français, en plus dispersés, les instituts de sondage ne s’y intéressent pas, ce qui évite de polluer la campagne par des discussions incessantes sur des quarts de point gagnés ou perdus. Et comme c’est la première fois que cette élection a lieu, le scrutin est très ouvert. Il n’y a pas comme ailleurs de candidat installé de longue date, avec un réseau verrouillé par le clientélisme ordinaire. L’incertitude est d’autant plus forte qu’à l’élection présidentielle, qui a donné F. Hollande en tête à 53% le taux d’abstention s’est élevé à 70%, empêchant tout pronostic fiable.

Pourquoi vous présenter ?

J’ai envie de porter les valeurs libérales d’émancipation des individus. Quitte à élire des députés des Français de l’étranger, il serait dommage de choisir toujours les mêmes étiquettes. Je porte des idées nouvelles, qui je l’espère rencontreront le succès qu’elles méritent. Ce qui est sûr c’est que les Français que je rencontre sont très pessimistes quant à la situation économique de la France. Ils ne considèrent pas comme véritablement crédibles les solutions de sortie de crise qui ont été proposées par les candidats et le nouveau Président. D’ailleurs, ses attaques contre la finance n’ont pas eu beaucoup d’écho. Les gens savent que cela relève surtout d’une posture de campagne. C’est dans ce contexte que je veux leur expliquer que le libéralisme, injustement décrié en France, est la seule solution pertinente de sortie de crise. En outre, l’éclatement probable de l’UMP après des législatives qui s’annoncent mauvaises du fait des nombreuses triangulaire avec le FN, va mener à une recomposition de la droite, ce qui permettra je l’espère de faire émerger un nouveau pôle libéral dont je souhaite faire partie.

Si vous êtes élu, quelle forme prendra votre action ? Quelles seront les propositions que vous porterez ?

Soyons lucides, la plupart des électeurs potentiels que je croise m’identifient à un homme politique de droite ; non par mon parcours, mais par ma défense du libéralisme. Pourtant, cette idéologie n’est ni de gauche, ni de droite. De fait, je soutiendrai les différents projets/propositions de Loi au cas par cas. Cela dépendra également du rapport de force et de la forme des différents groupes parlementaires qui se seront constitués et auxquels j’appartiendrai, le cas échant. Au-delà, j’ai la volonté de proposer trois grands projets :

- La non-imposition totale des Français de l’étranger. Je considère que lorsque vous résidez dans un pays, vous ne devez payer des impôts qu’à celui-ci. Cela me semble une mesure de bon sens. D’ailleurs, cela fait directement référence à ce qui est écrit dans la Déclaration des Droits de l’Homme, qui indique qu’il est obligatoire de payer des impôts « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration ». Or, on ne dépend toujours que d’une seule administration, et les impôts dont tout citoyen doit s’acquitter ne peut financer que celle dont on dépend.

- Le non cumul absolu des mandats. En Angleterre, le cumul des mandats est strictement proscrit. Tout maire qui devient député doit abandonner l’une des deux charges. En France, le cumul des mandats crée des situations de clientélisme et de conflit d’intérêts. En effet, il est fréquent de voir des propositions de Loi fortement amendées par des députés soumis à des pressions de lobbys locaux. Ainsi un député va préférer déposer un amendement à une loi pourtant utile, juste pour se faire bien voir de la population et se faire réélire. L’attache locale est donc contraire au bon fonctionnement démocratique. Le non cumul permettra d’éviter ces situations préjudiciables

- Enfin, je défends la libéralisation du système d’enseignement supérieur. Un pas important a été franchi, et de manière efficace, lors de l’autonomisation des universités. Mais pour aller au bout de la logique, il faut absolument mettre en place la sélection des étudiants à l’entrée. En Angleterre où cela existe depuis les réformes de Thatcher, le taux d’échec en première année est de 12%. En France, il dépasse en moyenne 30%. Ne pas pouvoir sélectionner les étudiants implique que les universités doivent accepter des publics qui n’ont pas leur place dans les amphithéâtres, et nombreux sont ceux qui, mal orientés, échouent en première année et redoublent une, voire deux fois. On m’oppose souvent le fait qu’avec cette réforme, de nombreux étudiants ne trouveront pas de place à l’Université. Je serai clair : je préfère 5% d’élèves en moins, qui seront orientés vers d’autres formations, que 50% d’élèves pour ne pas dire plus qui pâtissent de l’effondrement du niveau de l’enseignement supérieur.

Pour terminer, pourriez-vous nous donner votre avis sur les questions de société suivantes :

1) Faut-il légaliser toutes les drogues ?

Je suis pour la légalisation du cannabis. La première raison est que cela permettra de tuer dans l’œuf les trafics — cela a été démontré plusieurs fois –, tout en permettant des revenus supplémentaires pour l’État et, surtout, de financer des méthodes de prévention plus efficace. Il faut mettre fin à l’hypocrisie ambiante qui veut que l’alcool puisse être en libre vente, comme le tabac, mais que le cannabis, qui n’est pas plus nocif, soit interdit. Cela dit je ne considère pas que cela soit le problème le plus urgent à régler.

2) Faut-il supprimer le recours obligatoire  à la Sécurité Sociale ?

C’est en tout cas une discussion à avoir. Je défends le libre choix des individus, qui doivent pouvoir opter pour une assurance privée s’ils le souhaitent. Mais il y a, c’est vrai, le risque qu’avec le libre choix, un phénomène d’antisélection conduise à un déficit encore plus grand des comptes de la sécurité sociale, du fait que les assurances privées capteraient les individus les plus « rentables », laissant les autres au système public. Rien n’empêche de créer des mécanismes pour contrer cet effet. Je constate qu’au Chili, qui n’est pourtant pas le pays le plus libéral du monde, un tel système a été mis en place, avec un grand succès.

3) Faut-il supprimer le SMIC ?

Oui, ou en tout cas sous sa forme actuelle. Je note d’ailleurs que le nouveau statut d’autoentrepreneur, créé par Hervé Novelli, a insidieusement mis fin au caractère général du SMIC. Celui-ci crée en effet involontairement du chômage, en désincitant les entreprises à embaucher du personnel peu qualifié. Pour ceux-là, seules les aides sociales permettent de survivre, et elles sont évidemment moins élevées qu’un salaire. À la place, on pourrait imaginer un tarif horaire journalier minimum, ce qui introduirait plus de flexibilité dans le système. À ce titre, j’insiste sur le fait que la suppression du SMIC ne peut être efficace et pertinente que si elle s’accompagne d’une plus grande flexibilité du marché du travail. Il faut en finir avec un système dual, où les « insiders », ceux qui ont déjà un travail, sont très protégés, et les « outsiders », les chômeurs, ont beaucoup de difficulté à trouver un emploi. Cette flexibilité devrait s’accompagner, comme dans le modèle suédois, d’allocations chômages généreuses, afin que la période de chômage ne soit plus perçue comme une situation de grande précarité. Enfin, la prise en compte de la nécessité de sécuriser les parcours professionnels via une meilleure formation des chômeurs, me semble aller dans le bon sens.

4) Faut-il réduire le nombre de fonctionnaires ?

Je ne poserais pas la question en ces termes. Selon moi, ce n’est pas en premier lieu le nombre de fonctionnaires qui pose problème, même si dans certains secteur ils sont effectivement trop nombreux, mais plutôt leur statut. Je veux mettre fin au statut spécifique de la fonction publique ; en clair l’emploi à vie. Je préconise un statut commun avec le secteur privé, tel que le secteur public sera géré par des managers qui auront l’entière responsabilité de leurs équipes, embauches comme licenciements. Cela permet d’améliorer l’efficacité du service public, et de responsabiliser les managers, permettant une meilleure adéquation des besoins au niveau local.

5) Faut-il libéraliser le permis de conduire ?

Oui. Il est normal que l’État fixe par la norme, la Loi, ceux qui peuvent conduire et les autres, via la détention du permis de conduire. Mais il faut mettre fin à la forte régulation du système des autoécoles. En Angleterre, chaque moniteur peut facilement se mettre à son compte et donner ses propres cours, chose impossible en France. Si l’on compare les deux systèmes, l’avantage est sans ambiguïté en faveur de l’’Angleterre : plus d’autoécoles, donc plus de concurrence, des prix moins élevés, et pas plus d’accidents !

6) Quelle réforme du système fiscal ?

Je propose de remettre complètement à plat la fiscalité française. Ce mille-feuilles d’impôts et de taxes directes ou indirectes brille par sa complexité. Au-delà du niveau de prélèvements, c’est un vaste effort de simplification qu’il faut mener, un peu comme ce que préconisait Herman Cain pendant la primaire républicaine US. Je ne suis en revanche pas hostile au principe de progressivité de l’impôt sur le revenu, surtout en prenant en compte l’état de nos finances publiques.

Un dernier mot pour finir. Si vous deviez donner un argument principal pour amener les français de votre circonscription à voter pour vous ?

Ask what for you can do for France, not what France can do for you !

Entretien réalisé par PLG pour Contrepoints.

Site internet du candidat : http://gaspard2012.com/


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