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Une lampe de poche pour les aveugles : Lettre à Xénie la moniale

Par Tudry

Saint Grégoire Palamas, Lettre à Xenie la moniale, précédée de la vie du saint (traduit du grec par le père Ambroise Fontrier), L'Age d'Homme, collection La Lumière du Thabor, 2012.

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Il est vraiment insensé et inqualifiable de vouloir théologuer en prêtant son attention aux seuls mots et non à l'essence et à l'objet des termes. (p. 45)

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Le grand ennemi, Voltaire, voulait en son temps, et avec raison, voir se multiplier les « manuels », des livres qui tiendraient dans la main, aisés à transporter et que le lecteur pourrait avoir à porté de main en tous lieux...

Sans que cela soit indiqué sur les livres l'équipe des éditions L'Age d'Homme nomme « lampes de poche » ce nouveau format de la collection Lumière du Thabor ! Lumineuse idée si j'osais...

Plus lumineuse encore de faire de ce texte court mais renversant la première publication de ce nouveau format.

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En quelques soixante pages nous avons, dans le style frappant, solide et souple à la fois de saint Grégoire, un condensé de l'exigence de la vie chrétienne. L'inaltérable et insurpassable vérité de la fin tout entière marquée par les errements du commencement mais aussi par l'inaltérable sauvetage. La vie de l'âme en sa profondeur souvent insondée, le risque de sa mort irrattrapable, occultée, tout est mis en lumière avec une science vécue et éprouvée... C'est beau, et c'est terrifiant comme l'est la beauté nue, c'est-à-dire vraie ! La « vie » présente, réaffirme saint Grégoire ne peut s'harmoniser avec les conditions du Paradis, la « vie » présente « porte la mort » le « pragmatisme » ascétique de la voie chrétienne institue donc « le temps de cette vie » comme « temps de la pénitence ». Encore convient-il de ne pas se laisser prendre aux rets d'un langage qui lui aussi « porte la mort » (Il est vraiment insensé et inqualifiable de vouloir théologuer en prêtant son attention aux seuls mots et non à l'essence et à l'objet de ces termes. p. 45) et bien entendre que la « pénitence » ne contient aucun « moralisme moribond » mais qu'il s'agit bien d'une expérience précise, « matérielle » autant que spirituelle puisque ce dernier domaine est celui qui dirige tout et demeure le moteur de toute transformation véritable.

Véritable compendium de la « plus haute » vie ascétique. En quelques pages très intenses saint Grégoire trace un parcours exigeant, celui qui mène du triste état actuel de l'homme à la perspective réaliste de la déification là où la grâce ramène l'homme à la « beauté insaisissable (amechanon), originelle et première »... Sans jamais rien cacher de l’âpreté de cette voie unique, de la rudesse des combats saint Grégoire condense le sain enseignement de l'Eglise avec une constante humilité. Il n'aurait certainement pas vu d'un mauvais œil qu'il soit comparé avec la boue que le Christ confectionna pour enduire les yeux de « l'aveugle de naissance »... Ce texte court et dense ressemble bien aux actes et à l'enseignement du Maître, les plus petites choses, les plus humbles, les plus misérables et déconsidérées peuvent être les plus purs vecteurs de la guérison « de nos âmes et de nos corps »...


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