(Source : Le Figaro)
Les hommes d’aujourd’hui sont globalement des partenaires plus attentionnés, dans leur vie de couple comme en société, mais ils sont aussi jugés moins bons vivants et moins forts que ceux des générations passées. Autant dire que chacun pourra trouver matière à se réjouir – ou à s’inquiéter – en lisant les résultats de la dernière enquête Ifop-Lilly, «Regards croisés sur la masculinité». Le sondage, réalisé en ligne les 3 et 4 avril dernier sur un échantillon de 1003 personnes, représentatif de la population française âgée de plus de 18 ans, dessine le portrait d’hommes moins caricaturaux qu’on ne le dit parfois.
Nombreux sont les hommes pour qui l’affirmation de la virilité n’est plus vécue comme une règle de vie. La masculinité s’est trouvée redéfinie par la prise de conscience que la sexualisation des rôles n’était pas une donnée naturelle immuable, dans une société civilisée, mais relevait nettement de processus de socialisation sexistes. Une évolution profonde qui ne se fait pas sans grincements de dents. C’est là pourtant un antidote à «la face sombre de la masculinité», dénoncée par les psychologues américains Louise Silverstein et Gary Brooks, au sujet de la propension masculine à l’impulsivité, l’agression et la violence. Selon eux, il est toujours tentant, mais trop facile, de réduire à une problématique individuelle les comportements déviants de certains hommes, telles que la violence ou les agressions sexuelles: «Bien que nous considérions que chacun est responsable de son comportement, nous sommes aussi convaincus que la solution à cette face sombre doit être trouvée autant à un niveau sociétal qu’individuel», écrivaient-ils il y a une dizaine années déjà. En somme, il faudrait se défier d’une norme de masculinité qui met l’accent sur la force physique et le stoïcisme émotionnel, l’agressivité, la compétition, la performance en évitant soigneusement tout ce qui est jugé comme « féminin».
Persistance d’inégalités : Pas de doute: pour les personnes interrogées, les hommes des générations passées étaient franchement plus «patriarcaux» que ceux d’aujourd’hui et aussi plus «forts» et plus «machos». Hommes et femmes s’accordent sur ce point. D’autres consensus apparaissent: les hommes modernes seraient plus séducteurs qu’avant mais aussi des partenaires plus attentionnés et de meilleurs pères de famille. Ils se montrent sensibles, font preuve d’ouverture d’esprit, sont à l’écoute, disposés au dialogue et ont le sens des responsabilités. Pour Georges Vigarello, historien et directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales: «Les valeurs ont beaucoup évolué: la prise en compte et l’attention de l’autre sont devenues fondamentales. C’est pourquoi le dialogue et le partage ont pris plus de place dans l’intimité.»
Très majoritairement, les Français estiment que les hommes sont plus nombreux à participer, désormais, aux tâches domestiques et à l’éducation des enfants. Une comparaison qui ne doit pas masquer la persistance d’inégalités fortes dans le partage des tâches. Par exemple, on compte encore un tiers des couples dans lesquels la femme s’occupe seule de la cuisine, du ménage et des courses, alors que ce n’est le cas que de 1 % des hommes. Les inégalités professionnelles n’expliquent pas tout. Plus subtilement, il y a quatre ans, les sociologues de l’enquête sur la sexualité en France soulignaient comment «la polarisation des rôles masculins et féminins s’effectuait progressivement dans le couple, avec une accélération marquée lors de l’arrivée des enfants».