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Après Sarkozy, les réacs sont amnésiques

Publié le 28 mai 2012 par Juan
Après Sarkozy, les réacs sont amnésiques Depuis la victoire de François Hollande le 6 mai dernier, certains à l'UMP cherchent les premiers couacs de la présidence Hollande. Au prix d'un effort d'amnésie assez improbable et inédit, les voici qu'ils se déchaînent, creusent et grattent.
Il fallait relire les premières semaines de Nicolas Sarkozy après son élection, en 2007. La presse était unanime, incroyablement unanime, et malgré les fautes Bling Bling des premiers jours du quinquennat. Le 22 mai, Paris Match titrait encore sur « une famille d'aujourd'hui à l'Elysée » ; VSD s'extasiait toujours, le 23 mai: « Façon Kennedy ou Grimaldi, le glamour s'invite sous les ors de la République avec un président qui ne veut rien laisser au hasard » . L'Express n'avait pas moins de retenue: « La révolution Sarkozy» .
Cinq ans plus tard, l'Express est moins indulgent: « Hollande, rattrapé par la crise ». Le Point prévient déjà que c'est « fini de rire », puis titre sur « ces promesses qu'il faut enterrer ». Tout est plus sombre, plus grave et sans appel. VSD pensait connaître de Sarkozy « ses stratégies pour revenir ».
Fin mai 2007, Nicolas Sarkozy faisait campagne pour l'UMP au scrutin législatif. En mai 2012, François Hollande reste distant. Il laisse la conduite de la campagne à Jean-Marc Ayrault.  Mais il est un point où la comparaison des périodes révèle un parallélisme des situations: en mai 2007, le parti socialiste et la gauche en général étaient sonnés. Cinq ans plus tard, l'UMP est dans une position quasi-identique. Elle est tiraillée par une guerre des chefs. Samedi, Copé et Fillon ont ainsi fait mine de jouer l'unité sur une estrade lors d'une réunion des cadres du parti.
Bien sûr, personne n'est parfait. Même dans le gouvernement Ayrault. Crime ultime, il est même certain que certains des nouveaux ministres ont eu un jour quelques contraventions de stationnement ou, pire, d'excès de vitesse. Depuis le 6 et surtout le 16 mai, les sbires de Sarkofrance se sont donc lâchés. Et ils exigeaient la démission de tous les ministres, fussent-ils condamnés d'une amende timbre-poste.
La condamnation d'Arnaud Montebourg à un euro symbolique pour insulte envers les dirigeants de Seafrance, qu'il avait traité d'escrocs, fut l'objet de multiples cris d'orfraies. Nadine Morano, qui avait couvert Brice Hortefeux ou Eric Woerth, et toutes les mises en examens des proches de Nicolas Sarkozy dans l'affaire de Karachi, réclama sa démission. Ironie judiciaire, le tribunal a en revanche considéré que l'expression patrons-voyous, également utilisé par Montebourg, n'était pas une insulte (sic!).
Contre Christiane Taubira, la charge était rude et plus ample. Le Figaro avait exhumé une condamnation pour licenciement abusif d'il y a 8 ans. La réacosphère propageait aussi la rumeur infondée selon laquelle Christiane Taubira aurait jadis montré quelque indulgence envers l'acte de «brûler des drapeaux français».
L'éditorialiste Eric Zemmour accusa la ministre de racisme anti-blanc: «En quelques jours, Christiane Taubira a choisi ses victimes, ses bourreaux. Les femmes, les jeunes des banlieues, sont dans le bon camp à protéger. Les hommes blancs dans le mauvais. Après tout, les femmes votent majoritairement à gauche depuis 1981, et dans les banlieues, Hollande a obtenu des scores de dictateur africain. Mais en quelques jours, la ministre de la Justice (...) a donné une couleur angélique aux débuts de la gauche, qui la ramène là où elle ne voulait pas forcément revenir» Zemmour qualifia même la Garde des Sceaux de « maman pour ses enfants, ces pauvres enfants qui volent, trafiquent, torturent, menacent, rackettent, violentent, tuent aussi parfois ». C'était ignoble, facile, inutilement provoquant. Zemmour fut débarqué de RTL ce samedi 26 mai, trois jours après cette saillie matinale.
A l'UMP, on paraissait donc oublier l'incroyable liste des scandales, petits et grands, qui marquèrent ce quinquennat. Même François Hollande fut l'objet de soupçons anonymes sur sa déclaration à l'ISF. Une rumeur sur Internet l'accusait d'avoir triché à l'ISF en occultant le patrimoine de sa compagne Valérie Trierweiler. C'était faux, à en croire l'article, chiffré, de Rue89. A l'inverse, on s'interroge toujours sur l'origine de la fortune de Nicolas Sarkozy, telle qu'elle a été révélée par sa dernière déclaration de patrimoine de sortie en février dernier.
Jeudi dernier, François Fillon s'est aussi amusé du « festival des couacs » dont aurait souffert le gouvernement. Il pensait à l'annonce prématurée d'un retour à la semaine de 5 jours dans l'enseignement primaire par le ministre Vincent Peillon. Quelle affaire ! Fillon oubliait l'incroyable confession de Jean-Louis Borloo, éphémère ministre des Finances qui lâcha qu'un projet de TVA sociale était à l'étude. L'annonce, dit-on, couta quelques dizaines de députés à l'UMP en juin 2007. Fillon oubliait surtout son propre quinquennat, du début à la fin, Nicolas Sarkozy ou ses conseillers grillèrent l'annonce de toutes les réformes, voire les commissions de réflexions pourtant constituées en grand nombre pour justifier telle ou telle réforme.
Mais au final, que retenir ? François Hollande n'aura eu décidément aucun état de grâce. Pour paraphraser notre confrère Guy Birenbaum, c'est sans doute tant mieux.
Une autre vigilance s'organise. Celle de ceux qui aimeraient que la rupture d'avec les anciennes pratiques de Sarkofrance se mettent en place rapidement.
Le site Mediapart s'est vite attaché à dénoncer les intérêts professionnels de certains récents nommés, David Kessler et Pierre Lescure. On pourra reprocher au site de ne pas avoir attendu la suspension des mandats des deux visés, justement détaillés par le site. Si elle ne tombe pas dans le procès d'intention, la vigilance reste nécessaire. Mediapart a aussi lancé une autre affaire sur les notes de frais des députés, à quelques semaines du scrutin.
Cette autre vigilance doit aussi et surtout s'exercer sur la tenue des promesses du candidat Hollande. Sauf bourde ou reniement prématuré, cette période intermédiaire qui s'intercale entre les scrutins présidentiel et législatif est comme un faux plat. L'opposition ne peut critiquer que l'application du programme sur lequel le candidat vient justement de l'emporter. Les grandes lois sont pour plus tard, quand l'Assemblée nationale sera renouvelée.


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