Bankin remporte le Grand Prix de l'Appli Bancaire Axa Banque

Publié le 02 juin 2012 par Patriceb @cestpasmonidee
Lancé le 19 mars dernier, le "Grand Prix de l'Appli Bancaire" d'Axa Banque a connu son épilogue hier soir, à l'occasion d'une cérémonie à laquelle j'ai eu la chance d'être invité. L'agenda fut riche : outre les présentations des 6 finalistes et la désignation du vainqueur, nous avons également pu apprécier les résultats d'un concours interne et une application "hors compétition".
En introduction, les représentants d'Axa Banque (dont Pierre Janin, Directeur Général, et Raphaël Krivine, Directeur de la Clientèle Directe) rappelait les objectifs de l'initiative consistant à ouvrir les données bancaires aux développeurs : l'enrichissement de l'expérience client, avec le développement de nouvelles fonctions et opportunités, en mettant à profit la créativité et les idées de tous les volontaires.
Ces derniers peuvent être extérieurs à l'entreprise mais il peut aussi s'agir de collaborateurs. C'est la raison pour laquelle un concours interne était organisé en parallèle du Grand Prix.
Concours d'idées interne
Dans le cadre de la démarche d'innovation participative d'Axa, baptisée Innov'Axa, les salariés d'Axa Banque étaient donc invités à soumettre leurs idées d'utilisation des APIs ("interfaces de programmation") mises à disposition des développeurs. 18 participants ont joué le jeu et 3 finalistes ont été récompensés :
  • "Mon Coach Budget", dont le principe est d'accompagner et encourager l'épargne, pour dépasser le modèle "passif" classique des outils de PFM ("gestion de finances personnelles") ;
  • "Mieux Connaître votre Argent", qui, dans un même contexte de PFM, cible plutôt les économies immédiates, par exemple avec des offres promotionnelles ciblées (sur un modèle "Groupon") ;
  • Un concept de dépôt de chèque en ligne, pour faciliter et accélérer les remises traditionnelles.
C'est finalement cette dernière proposition qui a obtenu le premier prix, à ma grande surprise, puisqu'un des critères de sélection était la faisabilité de mise en œuvre, qui est, dans ce cas, indubitable d'un point de vue technique mais beaucoup plus improbable sur le plan réglementaire.
Plus généralement, ce palmarès est un peu triste pour ceux qui s'intéressent à l'innovation dans les services financiers, puisque les 3 dossiers retenus reposent sur des concepts existants (voire anciens), tels que ceux de Capital Koala, Bank of the West, SmartyPig, Cardlytics ou Chase... Certes, dupliquer et/ou transposer des réalisations existantes est une démarche louable et utile mais, j'aurais espéré un peu plus de créativité dans un concours d'idées.
Grand Prix
Pour le "Grand Prix de l'Appli Bancaire", Axa Banque a enregistré 45 inscrits, parmi lesquels 14 dossiers ont été sélectionnés, dont sont issus les 6 finalistes qui présentaient leurs propositions à l'assemblée. Dans le cadre de ce concours et contrairement à la compétition interne, il n'était pas question de se contenter d'idées, et seules des réalisations concrètes étaient admises.
Passons (rapidement) en revue les solutions en lice, dans un ordre qui n'est pas celui de la cérémonie, vous comprendrez pourquoi plus loin !


La société Fiduceo concourrait avec son offre existante MoneyDoc, combinant agrégation de comptes, gestion de budget et coffre-fort virtuel pour tous types de documents. Par rapport à d'autres outils de PFM, la principale particularité de celui-ci est d'associer automatiquement les opérations des relevés bancaires aux factures (ou autres documents) correspondantes.



Autre acteur connu du PFM, Bankin était de la fête avec sa solution mobile, désormais bien connue. La présentation était l'occasion d'apprendre que son application pour iPhone a été téléchargée 150 000 fois et que ses utilisateurs se connectent en moyenne 20 fois par mois, ce qui démontre (s'il était encore nécessaire) l'appétence des consommateurs pour la gestion de budget.
En revanche, avec seulement 3% d'utilisateurs payants, le modèle économique de la société semble fragile, bien qu'il soit complété de revenus publicitaires (dans les versions gratuites). L'intégration de recommandations contextuelles (un exemple avec une proposition d'ouverture de livret d'épargne était illustré) est une autre piste à l'étude.



Le trio des "usual suspects" était complété par la présence de Linxo avec, là encore, ses services existants de gestion de budget. L'originalité de celui-ci est d'être proposé à la fois directement aux consommateurs mais aussi, en marque blanche et "prêt à l'emploi", aux institutions financières (comme Fortuneo). Côté chiffres, la version "directe" gère dorénavant 120 000 comptes pour "quelques dizaines de milliers" d'utilisateurs.
Les dirigeants de Linxo ne manquent pas d'idées pour le développement de leur solution, depuis la gestion de patrimoine et de portefeuille (qui semble être la priorité) à la détection de fraude et d'erreurs, en passant par l'intégration de PayPal et bien d'autres...



Petite surprise de la soirée, une équipe hongroise avait fait le déplacement pour présenter MoneyTap, une autre application (pour iPad) de gestion de budget. Leur vision apportait malgré tout une touche d'originalité avec une conception à base de widgets, que l'utilisateur peut agencer à sa guise. D'une manière générale, la maquette démontre un attachement particulier à l'expérience utilisateur avec, par exemple, une vue inédite des opérations en "timeline" (rentrées d'argent à gauche et dépenses à droite), un peu à la Facebook.



Là où de nombreux participants (presque tous, en fait) imaginaient une monétisation du PFM par des offres ciblées, la "Banque du Futur" de Karoo et SalesForce concrétise (un peu) le concept. Cette plate-forme de gestion de budget a donc (enfin !) quelques fonctions différentes à proposer.
Ainsi, le relevé d'opérations permet non seulement de catégoriser les transactions mais aussi de noter le commerçant, la boutique ou le fournisseur de service et, l'approche se voulant "sociale", de consulter les notes moyennes attribuées par la communauté (comme le font les utilisateurs d'applications iPhone sur iTunes). En prolongement, les concepteurs imaginent de pouvoir proposer des offres alternatives ou des comparatifs sur certains secteurs de dépenses, notamment lorsque les appréciations sont mauvaises.
D'autres idées sont esquissées dans cette "Banque du Futur", telle que la (mal nommée, à mon avis) "Taxe Tobin volontaire". Le principe consisterait à analyser les dépenses et à promouvoir un comportement d'achats responsables, via un système de récompenses et/ou de contributions volontaires à des associations, selon les transactions réalisées. Les détails restent à imaginer !
On peut noter également le principe de "Mes offres privées" consistant à consolider des achats groupés sur les marques favorites de l'utilisateur, la comparaison de budget avec la communauté (comme elle existait aux tous débuts du PFM, avec Wesabe) ou encore les idées de "ludification" avec un système de badges...



Dernière de cette série, l'application Map My Cost! d'Ekito ne ressemble à aucune autre. A la base, elle permet de géolocaliser et horodater les achats à partir d'une photo réalisée sur les lieux. Depuis ce point de départ, diverses possibilités sont envisagées : de la catégorisation facile par l'image aux alertes au passage dans une zone "dangereuse" (là où l'utilisateur dépense le plus !), l'imagination n'a pas de limites...
La présentation d'Ekito brillait surtout par son approche de conception, qui est un peu la marque de fabrique ("agile") de l'équipe : consultation des internautes, sur Facebook, pour trouver et développer l'idée d'application, réalisation en 2 jours (à 5 personnes) en mode "task force"... Le résultat est certes moins abouti que d'autres mais l'efficacité du dispositif est redoutable !

Hors compétition
Une équipe du Web Center Axa de Lille, qui fonctionne aussi en mode "agile" pour réaliser les applications web innovantes du groupe (dont QuiALeMeilleurService.com), a également décidé de relever le défi, hors compétition, à ses heures perdues. Le résultat, non finalisé, était prometteur, avec une optique de "projection dans le futur" de la gestion de budget, remplaçant la question "qu'ai je dépensé ?" par une autre plus importante : "que vais-je pouvoir dépenser ?".

Palmarès
Après des délibérations difficiles, le jury, composé d'entrepreneurs, de capital-risqueurs et de représentants d'Axa et de Scientipôle (partenaire de l'opération), a finalement choisi d'attribuer le Grand Prix (d'un montant de 50 000 euros) à Bankin, qui, nous a-t-on dit, l'emporta d'une courte tête devant MoneyDoc.
L'état finalisé de la solution a probablement été un critère majeur dans cette sélection, qui a malheureusement desservi les 3 idées les plus originales (MoneyTap, Ekito et Karoo/Salesforce), encore au stade de concept, au profit des 3 outils de PFM déjà (plus ou moins) solidement établis (MoneyDoc, Linxo et Bankin). Peut-être aurait-il fallu distinguer deux catégories de participants.
Pour ma part, ma préférence va à Karoo/Salesforce dont les orientations s'inspirent d'approches (d'offres ciblées) déjà connues mais les déclinent d'une manière tout à fait unique, qui devrait trouver un écho auprès des utilisateurs (achats responsables, recherche d'économies, dimension "sociale" et ludique...). Et j'attribue une mention (très) honorable à Ekito, même si je crois moins à la valeur de Map My Cost! pour les clients de la banque.
En tous cas, bravo aux vainqueurs et félicitations à tous les participants !
Bilan
Ce premier aperçu des idées que peuvent apporter quelques développeurs (pionniers) à la banque est de bon augure pour les initiatives d'ouverture de données. Il reste à espérer que, au-delà du concours, les efforts se prolongent et aboutissent à des applications réelles (la plate-forme d'Axa Banque sera en production à la fin juin, si j'ai bien compris). Ce sera la condition pour que l'essai soit transformé et qu'on puisse parler de réel succès.
Les banques qui n'ont pas encore envisagé de rejoindre la tendance seront alors en difficulté pour lutter contre la créativité de milliers (millions ?) de développeurs dans le monde...
Pour terminer, je note que l'idée d'exploiter les données des transactions pour proposer des promotions et autres réductions aux clients commence à faire son chemin (elle était présente tout au long de la soirée). Je ne serais pas surpris que les premières implémentations (en France) soient pour bientôt, au grand dam des banquiers que ce genre de proposition effraie.