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Valeur verte: où en sommes-nous ?

Publié le 03 juin 2012 par Pierre

La valeur verte est à l’actualité ces derniers jours, depuis que l’ADEME a communiqué sur l’étude qu’elle a commandée et dont l’objectif était, il faut le rappeler, de définir la valeur verte, de proposer une première approche chiffrée et d’identifier les freins à son développement. Alors cette valeur verte, où, quand et comment va-t-elle véritablement se manifester ?

Y a-t-il UNE valeur verte ?

Eh bien oui et non. Il y a certes une définition générique qui circule « La notion de valeur verte est, théoriquement, la valeur nette additionnelle dégagée par une construction verte ou plus généralement, par la bonne performance environnementale d’un actif immobilier « . C’est donc une qualité intrinsèque de construction et pas une option. Mais après, on prend quoi en compte et on le valorise comment ?

Dans le secteur du bâtiment, on trouve peu ou prou trois grandes familles de « labels » dirons-nous en matière de valeur verte :

  • Il y a le modèle germanique, centré sur la question énergétique. Il se traduit par des actions sur l’isolation, l’orientation et la ventilation. Ce sont les labels Passivhaus (Allemagne) et Minergie (Suisse),
  • Il y a le modèle anglo-saxon, centré sur la qualité environnementale. Il se traduit par des actions sur l’énergie, sur les matériaux, les déchets, la santé, l’eau… Ce sont les labels Leed (USA) et BREEAM (Royaume-Uni)
  • Et puis il y a le modèle japonais, centré sur la production d’énergie. Il se traduit par des actions sur le solaire photovoltaïque.

A noter qu’une convergence internationale des certifications est en cours, via le Sustainable Building Alliance (SB Alliance), sur six indicateurs : carbone, énergie, eau, déchets, qualité de l’air intérieur et rentabilité financière. Mais nous n’en sommes qu’aux prémices…

Comment obtenir de la valeur verte ?

Pour obtenir de la « valeur verte », 3 leviers principaux sont identifiés :

- D’abord, celui de la qualité intrinsèque des bâtiments : qualité des matériaux et de la mise en œuvre, orientation des bâtiments, FDES et énergie grise… Cela relève directement des industriels, des concepteurs et des metteurs en œuvre. En gros, la filière bâtiment.

- Ensuite, celui de l’exploitation/maintenance : nature des équipements (importance des dispositifs de programmation/régulation), domotique, compteurs intelligents… et dispositifs de suivi : contrats de maintenance, Contrats globaux (CPE et garanties associées…) Les entreprises sont toujours de la partie, mais arrivent les finançeurs et les assureurs, intéressés pour garantir de nouvelles choses, comme le récent colloque d’APOGEE l’a montré.

- Il y a enfin le comportement des occupants, le facteur X… Se posent alors les questions des compteurs intelligents, des clauses comportementales dans les contrats globaux (CPE) et l’information/sensibilisation des occupants. Car les récentes expériences, en HLM notamment, montrent que quand on améliore la qualité des logements, l’effet rebond n’est jamais bien loin et la tentation est grande de remonter de quelques degrés le thermostat…

A côté de ces leviers qu’on qualifiera d’internes, des leviers externes agissent également : la réglementation (nationale mais aussi locale), plus ou moins incitative ou coercitive, les aides financières permettant d’améliorer le bâti, la sensibilisation du grand public… « Macro-politique » dont on se demande toujours dans quel ordre elle doit fonctionner. Le débat actuel sur une possible obligation de travaux à la transaction en est la parfaite illustration : par quoi commencer ? A cet égard, le chapitre relatif aux conditions d’émergence de la valeur verte de l’étude ADEME est tout à fait instructif.

Avons-nous une valeur verte sur le marché immobilier aujourd’hui ?

L’étude ADEME semble indiquer que plutôt non ; même constat lors du colloque organisé par l’ANIL en février. On constate néanmoins la prise de conscience générale des usagers consommateurs, qui est le préalable puisque la valeur verte n’est qu’un paramètre de plus entre l’offre et la demande sur un marché donné, l’immobilier en l’occurrence.

Et puis il faut distinguer le marché du logement de celui de l’immobilier de bureaux, plutôt en pointe sur ce sujet et carrément critère de décision déjà dans certains pays comme les USA.

Quelques idées comme ça…

Sur la valeur verte, permettons-nous ces quelques interrogations:

D’abord, elle va très probablement s’exprimer via la consommation énergétique, et seulement cela dans un premier temps. Ce n’est pourtant pas le sujet le plus facile à appréhender : prend-on la consommation conventionnelle, la consommation réelle, avons-nous des outils de mesure fiables, des retours sur investissement précis ? Autant de questions – qui ne font pas l’objet d’un consensus aujourd’hui – et qui sont pourtant des préalables essentiels à une valeur verte convertible en euros lors d’une transaction.

Aussi, la valeur verte apparaît, à première vue, d’autant plus intéressante que le parc de logements est mauvais. En effet, sa mécanique sur un marché donné procède, grâce aux DPE et autres réglementations thermiques, à un déclassement progressif des biens les plus énergivores. C’est une manifestation de la valeur verte par le bas (ce sera l’inverse sur un marché de bureaux ou le bien sera survalorisé par la valeur verte).

Autre caractéristique de la valeur verte, elle est par définition temporaire. Avec l’évolution des réglementations (notamment thermique) et la hausse du coût des énergies, elle tend naturellement à se réduire, d’où la question cruciale du temps de retour, à ce jour non réglée par le secteur. Car à quoi bon investir dans des travaux si le bien est obsolète sur le marché avant même un retour sur investissement ?

Enfin, la valeur verte ne pourra se développer que si les pouvoirs publics donnent de la visibilité sur l’évolution des réglementations (techniques, fiscales, d’urbanisme…).

Conclusion

Pour être « durable », il apparaît certain que la valeur verte devra être :

- socialement comprise et acceptée par les consommateurs (arrêter les pubs dans lesquelles les occupants sont en maillot de bain dans leur logement alors qu’il neige dehors),

- et être proposée à un coût maîtrisé, et peut-être même garantie…?

Mais demeure la question du comment… Comment la valeur verte pourra-t-elle être mesurée et par qui sera-t-elle attestée ? On sait que certaines organisations, Cerqual en tête, se sont positionnées. Y aura-t-il d’autres voies que la certification ?


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