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Etudiants québécois, une indignation mal placée

Publié le 04 juin 2012 par Copeau @Contrepoints

Chaque soir, je regarde à la télé l’évolution de la crise étudiante. Chaque soir, je constate avec consternation l’ampleur de la mobilisation étudiante et populaire. En dépit de tous mes efforts pour comprendre, je dois bien me rendre à l’évidence : je ne saisis ni la logique des manifestants ni celle de leurs nombreux partisans.

Par Nathalie Elgrably-Lévy, depuis Montréal, Québec.

Etudiants québécois, une indignation mal placée

"Grève" à l'université McGill (CC, Gerry Lauzon)

Chaque soir, je regarde à la télé l’évolution de la crise étudiante. Chaque soir, je constate avec consternation l’ampleur de la mobilisation étudiante et populaire. En dépit de tous mes efforts pour comprendre l’histoire qui s’écrit, je dois bien me rendre à l’évidence : je ne saisis ni la logique des manifestants ni celle de leurs nombreux partisans.

D’une part, les protestataires refusent systématiquement toute hausse des droits de scolarité. Pourtant, le sort des étudiants québécois est loin d’être tragique. En 2016-2017, ils paieront des droits de scolarité inférieurs à ceux exigés aujourd’hui dans sept provinces canadiennes. Ce n’est pas tout. Ces droits seront équivalents à ceux payés en 1968 une fois ajustés pour tenir compte de l’inflation. Oui, équivalents! Reconnaissons-le, le Québec s’est enflammé et a agité ses drapeaux rouges (symbole par excellence du communisme) alors que les droits de scolarité, en dépit de la hausse, resteront parmi les plus faibles du continent.

D’autre part, ceux-là mêmes qui se scandalisent de la hausse des droits de scolarité restent totalement indifférents devant des problèmes ou des situations qui ont pourtant de quoi éveiller la colère et susciter la révolte. Voici quelques exemples :

  • L’écart de niveau de vie entre le Québec et le reste du Canada s’est creusé de 63,4 % de 1981 à 2010, ce qui signifie que nous nous enrichissons nettement moins vite que nos voisins des autres provinces.
  • Après la Colombie-Britannique, c’est au Québec que les pauvres se sont enrichis le plus lentement de 1976 à 2009. La hausse de leurs revenus n’a été que de 3 % alors qu’elle a été en moyenne de 36 % dans les autres provinces canadiennes.
  • Le Québec est la province la plus généreuse au chapitre des subventions aux entreprises. Pour 2009 (année la plus récente pour laquelle des statistiques sont disponibles), elles atteignaient 993 $ par habitant alors que la moyenne des autres provinces canadiennes était de 537 $. Malgré tout, c’est ici qu’on enregistre le taux de faillites et d’insolvabilité le plus élevé du pays, ainsi que l’un des plus faibles nombres d’emplacements commerciaux par millier d’habitants.
  • En 35 ans, le taux de chômage québécois a toujours été supérieur à la moyenne canadienne, sauf en 2009 et 2010.
  • Les contribuables québécois sont soumis au deuxième taux marginal d’imposition du revenu des particuliers le plus élevé au pays (après la Nouvelle-Écosse) et doivent payer les taxes de vente parmi les plus élevées. Malgré tout, c’est ici que la dette publique (qu’elle soit mesurée par habitant ou en pourcentage du PIB) est la plus élevée.

Dans l’ensemble, le Québec n’atteint pas son potentiel. À bien des égards, nous sommes dans le peloton de queue alors que nous avons les capacités nécessaires pour nous classer parmi les économies les plus dynamiques d’Amérique du Nord.

Les manifestants qui envahissent quotidiennement les rues affirment vouloir changer notre société. Dans ce cas, ils devraient chercher à comprendre pourquoi nous ne sommes guère efficaces et exiger que la classe politique crée un environnement propice à la création de richesse. Les Québécois ont 1 000 raisons d’être indignés, mais les droits de scolarité ne sont pas du nombre. Quel dommage de déployer tant d’efforts pour enfoncer une porte ouverte!

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