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Des guerres et des hommes par Marc de Fritsh et Olivier Hubac

Publié le 04 juin 2012 par Egea

Savez-vous que je continue à lire des livres ? Malheureusement, je n'ai plus le temps d’écrire les fiches de lecture correspondantes.... Je dois être mal organisé.

Des guerres et des hommes par Marc de Fritsh et Olivier Hubac

Aussi , quand des copains publient un bon bouquin, je suis fort embarrassé : le lire, j'y arrive facilement, mais la fiche... C'est pourquoi j'ai trouvé une solution : que quelqu'un d'autre, neutre, la rédige à ma place. Enfin un peu d'objectivité sur égéa : ça nous manquait !

Et en plus, il en dit du bien !... Merci donc à Philippe Bignon pour cette collaboration de circonstance !

Des guerres et des hommes, Idées reçues sur 25 siècles de conflits

Auteurs : Marc de Fritsh, Olivier Hubac, Editions Le Cavalier Bleu, 2012

L’ouvrage

Écrit peu après l’intervention armée en Libye, l’ouvrage présente, sous la forme de dix-huit « fiches » organisées en trois parties, des analyses critiques de poncifs, régulièrement entendus dans les médias, au bar du mess ou parfois même, dans les sphères décisionnelles, au sujet de la guerre et des armées.

Par une approche généraliste en début de fiche, les auteurs parviennent à donner, au fil des lignes, des éléments précis sur les caractéristiques des conflits, leur conduite et les perspectives en la matière.

Les auteurs

Saint-cyrien, diplômé de l’ESSEC et ancien auditeur du Centre des Hautes Etudes Militaires (CHEM), Marc de Fritsch est colonel dans l’Armée de terre. Il est actuellement sous-directeur à la Délégation aux Affaires Stratégiques (DAS). Il a notamment commandé le 4° régiment d’hélicoptères des forces spéciales.

Saint-cyrien et juriste de formation, Olivier Hubac est consultant dans un cabinet spécialisé dans l’intelligence stratégique (CEIS). Analyste de défense, il travaille sur l’évolution des doctrines militaires et les nouvelles menaces.

La guerre et l’homme : une si vieille complicité…

Dans cette première partie, les auteurs s’attachent à inscrire le phénomène de la guerre dans l’histoire de l’humanité et à en découvrir les ressorts.

La guerre serait donc initialement l’objet d’une tentative pour préserver les ressources puis les faire croître. Mais, si la guerre fournit à l’homme (et à la femme, dont la place évolue d’ailleurs également dans les conflits) l’adversité nécessaire pour stimuler son instinct créatif, elle demeure porteuse de sombres conséquences.

En effet, même si la morale devient à nouveau un élément essentiel dans la justification des conflits (en contournant, si nécessaire, le droit positif), la guerre incarne toujours la barbarie lorsque le combattant néglige l’humanité de son adversaire. Le respect de sa propre humanité tracerait donc la frontière entre le bien et le mal.

La guerre, une affaire facile ?

Les auteurs décrivent la guerre comme un art coûteux et complexe qui obéit à des règles.

En effet, le coût humain et financier d’un conflit se mesure difficilement car il fait peser un effet d’éviction sur d’autres dépenses qui auraient pu être entreprises. Le conflit en Irak aurait ainsi un coût bien supérieur aux estimations initiales dans la mesure où il a favorisé la hausse du prix du pétrole, ce qui a entretenu une bulle spéculative, participant au déclenchement de la crise économique…

La guerre est, par ailleurs, complexe car une approche scientifique ne permet pas d’en cerner tous les aspects et encore moins les évolutions. Ni la technologie, ni l’emploi exclusif de forces spéciales ne sont les garants de l’efficacité des armées. D’autre part, la puissance militaire n’étant plus l’unique instrument de domination, la guerre requiert la coordination des actions militaires et civiles. Déjà en 1965, le président Johnson évoquait la nécessité de « gagner la bataille des cœurs et des esprits ».

Mais la guerre obéit à des règles qui ont progressivement pris place sur le champ de bataille. La définition de la notion de crime de guerre au tribunal de Nuremberg ou la ratification, encore fragile, des statuts de la Cour Pénale Internationale en 2002 illustrent ce cheminement. Si les règles ne sont pas toujours respectées, il est cependant incontestable que la guerre a une éthique.

La guerre : toujours un bel avenir ?

Les auteurs se gardent d’affirmer que la guerre est de retour. Elle est présente et va perdurer mais elle évolue.

L’arme nucléaire a représenté une révolution, qui se caractérise par le remplacement de l’incertitude de la guerre par la certitude de la destruction. Mais contrairement aux idées reçues, la simple dissolution des armées, prônée par quelques courants pacifistes, ne ferait pas disparaître les guerres qui se développent là où l’économie est fragile et l’Etat peu légitime (40% de la population vit dans ce type de pays). Par ailleurs, les tensions pour accéder aux hydrocarbures, aux terres rares et à l’eau seront des facteurs déclencheur, si elles se doublent d’un sentiment nationaliste ou d’une volonté de puissance.

En revanche, la guerre évolue. Les armées occidentales sont confrontées aux risques d’une dérive de la Révolution dans les Affaires Militaires (RAM). En effet, le déploiement de nouvelles technologies dans les conflits, multiplie les sources d’information (+1600% d’acquisition de données grâce aux drones depuis 2001 dans l’armée américaine) et dématérialise le combat (cyberespace). Il en résulte une dangereuse distanciation vis-à-vis de l’ennemi.

Cette même technologie permet le développement d’armes à létalité réduite, dont l’utilisation ne serait donc plus limitée et qui ferait passer du concept, jugé moral, de la guerre juste à celui, mieux accepté par les opinions, mais amoral, de la guerre propre.

La guerre représente donc toujours un danger, mais ce n’est pas son retour sous sa forme classique qui est à craindre, c’est plutôt la multiplication des conflits mettant en cause des acteurs non étatiques et revendiquant certains pouvoirs régaliens (justice, taxation…) comme les grands mouvements terroristes actuels. La guerre sortirait alors de son champ habituel. Elle pourrait même prendre des voies inédites et nécessiterait donc plus que la simple coordination, mais bien l’étroite collaboration des forces chargées de la sécurité et de celles chargées de la défense.

Avis du lecteur

L’ouvrage est agréable à lire et accessible à tous car abordant des problématiques connues, il développe des idées pertinentes et illustrées d’exemples concrets et originaux. En revanche, la forme choisie, de fiches successives, rend la compréhension de l’opinion générale des auteurs plus délicate.

En bref, il s’agit d’un ouvrage parfaitement adapté à la mise en condition opérationnelle, deux semaines avant les épreuves écrites du concours d’admission à l’École de Guerre.

Philippe Bignon


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