Depuis cinq ans, Ole Joern (38 ans) dirige sa propre agence RED STAR PHOTO au Danemark. Il a appris son métier de photographe de presse en travaillant pour un des plus grand quotidiens du pays et a été photographe attitré pour la coupe du monde 2006 en Allemagne.
Dans cet interview, le photographe nous livre ses secrets techniques. Pour tous les photographes amateurs ou professionnels qui s’apprêtent à immortaliser les moments forts de l’Euro en Pologne ou en Ukraine ou des jeux olympiques à Londres, cet article est pour vous.
La photographie sportive nécessite une bonne place et un équipement performant. Quels sont les conseils de base pour un amateur engagé lorsqu’il veut photographier un sportif en pleine action?
Mon avantage en tant que photographe professionnel ne réside pas seulement dans le fait que je suis bien équipé mais aussi dans le fait que je suis toujours bien placé sur le terrain. L’action est à la hauteur de mes yeux et j’ai la même perspective que celle que les spectateurs obtiennent en visionnant un match en direct à la télévision. Cependant, lors de la coupe du monde 2006, j’avais une place dans la tribune, et la perspective que je partageais avec les autres spectateurs dans le stade, m’a donné de nouvelles possibilités. Bien sûr un bon téléobjectif (minimum 300 mm, de préférence 500 ou 800 mm) est nécessaire pour photographier les athlètes de près. Avoir une perspective à partir des rangs des spectateurs est l’occasion de travailler d’une façon plus graphique à mon avis. En laissant de côté les plans rapprochés, on peut travailler sur la formation, l’organisation du terrain en hockey ou en football par exemple. Le plus important c’est de tirer les avantages de sa place et de privilégier par exemple son attention sur la réaction du public plutôt que sur l’action sur le terrain. Avant tout, je vous conseille de prendre les photos en format RAW qui se trouve être le meilleur format pour retravailler et recadrer les images sur ordinateur par la suite. Le plus important dans la photographie sportive c’est de pouvoir « lire » le sport et être prêt à appuyer sur le bouton dès que l’action se passe.
À quoi doit-on faire attention par exemple lorsqu'on prend des photos dans un stade ?
Cet été, des évènements sportifs sont tous les jours sous les feux de la rampe. Qu’est-ce qu’un photographe doit-il prendre en compte par rapport aux différents moments de la journée et qu’est ce qui change dans la façon de photographier une piste d’athlétisme ou du gazon ?
J’aime les projecteurs ! À la différence d’une journée ensoleillée, un stade sous projecteurs bénéficie d’une lumière constante c’est à dire sans ombres importantes ou sans contre-jour. Comme la lumière reste constante, la balance des blancs est définie et vous pouvez conserver cette configuration pendant tout le match. Réglez manuellement la balance des blancs, utilisez une sensibilité ISO importante (surtout pour les photos prises avec téléobjectif, un cliché sans flou, saisir un joueur en plein mouvement) pour que le sujet photographié donne l’effet d’être gelé sur place. Un ISO élevé prend effet dans un temps d’exposition plus court, il peut aussi influencer la qualité de la prise en ce qui concerne les photos numériques (surtout les appareils avec capteur photographique). Parfois se forme de la « poussière » ce qui donne un aspect granuleux comme dans les vieux films, ce qui n’est pas très classe dans ce cas. Le photographe doit prendre cela en compte en faisant ses réglages. Sinon les temps d’exposition longs (1/15 de seconde par exemple), un trépied ou le bord de la tribune comme trépied peuvent rendre de belles atmosphères et des images différentes. Lorsque vous photographiez, vous capturez l’ambiance du moment. En tant que photographe amateur, vous n’avez pas à rendre de compte à votre rédacteur en chef alors laissez-vous aller !
Le sport c’est rapide. Comment photographier et faire la capture du déroulement éclair d’une épreuve sportive ?
Lorsque je fais de la photo sportive aujourd’hui, je me sers d’un téléobjectif, d’un temps d’exposition court (1/800 voir plus rapide) et de plusieurs appareils photo (un appareil muni d’un téléobjectif de 300 ou 400 mm, un autre de 80 à 200 mm puis un autre de 24 à 70 mm lorsqu’il s’agit par exemple de photographier un joueur de football qui s’approche de la bande). Ce qui compte en photographie sportive est d’attraper les images que les yeux des humains n’ont pas eu le temps de capter. Tout ce qui dérange alors la vue devrait être éliminé de la photo, par exemple un arrière-plan trop net qui dévie le regard du sujet principal. Un téléobjectif sert à cela. En sport, les images doivent être réduites à l’essentiel, que ce soit lors de la prise ou bien lors de l’édition sur ordinateur. Aussi, l’intérêt dans le sport se trouve souvent hors du terrain. Prenez aussi en photo les spectateurs et leurs émotions. Photographiez ce que les journaux ne montrent pas et regardez les photos qui paraissent dans les médias les jours suivants.
Le photographe Ole Joern, correspondant attitré pour la coupe du monde 2006, donne ses conseils de pro...
As tu une photo de sport favorite parmi celles que tu as prises ? Qu’est qu’il te plaît particulièrement dans ce cliché ?
Oh, j’ai beaucoup de photos de sport préférées. Beaucoup d’entre elles ont été prises par d’autres photographes. Pendant la coupe du monde 2006 en Allemagne, j’ai fait pas mal de photos. Lorsque je les voyais le jour suivant dans le journal, mes clichés ne se distinguaient pas de ceux des autres photographes. À partir de ce constat, j’ai décidé de faire davantage des photos du public que d’action sur le terrain de sport (mon rédacteur en chef n’était bien sûr pas très enthousiasmé par cet idée). Je trouve encore maintenant que les émotions des spectateurs sont plus représentatives pour le sport que des images de joueurs énervés après une défaite.