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Rodríguez délivre l’Uruguay et signe la revanche d’un condamné

Publié le 11 juin 2012 par Rene Lanouille

Tenus en échec à domicile par le Venezuela lors de la 5ème journée (1-1), les coéquipiers de Diego Forlan se devaient de réagir face à un Pérou diminué, puisque privé de sa star Jefferson Farfan. En effet, victime d’une intoxication alimentaire, l’attaquant de Schalke 04 a préféré renoncer quelques heures avant le combat, laissant le druide Sergio Markarian dans la tourmente. Décidé à prendre les trois points, l’Uruguay entame la rencontre pied au plancher, privant la Rojiblanca de ballon. Arcboutés dans leur surface de réparation, les péruviens finissent par céder à la 15ème minute. Sebastian Coates, défenseur central de son état et remplaçant de l’emblématique capitaine Diego Lugano, place une tête rageuse sur un corner brillamment exécuté par Forlan. Malgré l’intervention à la desperado du gardien adverse Diego Penny, le ballon franchit la ligne pour quelques centimètres. L’arbitre brésilien Leandro Vuaden valide le but et le Centenario exulte.

Un quart d’heure plus tard, sous la pression charrúa, la défense inca commet une grossière erreur dans sa relance et laisse Luis Suaréz filer droit au but. Si l’attaquant de Liverpool bute sur Penny, Maximiliano Pereira n’a plus qu’à pousser le cuir au fond des filets pour doubler la mise. A cet instant précis, la messe semble dite. Rien ne laisse alors présager d’un renversant retournement de situation, tant Luis Advincula et consorts sont aux abois.

Le destin décide pourtant de s’en mêler. Les fantômes de l’Uruguay version 2002-2009, cette équipe qui menait au score puis s’écroulait sans crier gare, va refaire son apparition. Ainsi, sans qu’on comprenne vraiment comment, le Pérou réduit la marque grâce à…Diego Godin. Pris au dépourvu sur un centre tendu de Yoshimir Yotún, le solide gaillard de l’Atletico Madrid crucifie son compère Fernando Muslera, qui n’avait rien eu à se mettre sous la dent jusqu’à cette fatidique 39ème minute.
Au retour des vestiaires, l’indéboulonnable Paolo Guerrro, meilleur buteur de la Copa America 2011, se charge de remettre les deux équipes à égalité. Dans la surface de réparation, il enchaine amorti de la poitrine et frappe limpide pour cueillir à froid l’Uruguay et ses 68 000 fanatique, tous médusés. Les hommes de Tabarez se sont vus trop beaux, leur concentration initiale s’estompant au fil du match, comme si le Pérou ne méritait pas une attention de tous les instants. Les erreurs de marquage se multiplient et on comprend au regard du visage tendu du coach de la Celeste que le pire n’est pas inenvisageable. Le destin, encore lui, va foudroyer dans son élan l’ange blond Diego Forlan. Le meilleur joueur de la Coupe du Monde 2010, qui sort certes d’une saison décevante sous les couleurs de l’Internazionale de Milan, va tout bonnement « louper » un penalty (57ème), qui aurait pu octroyer un nouvel avantage à son pays. Si les éternels puristes magnifieront la parade du corpulent Penny, toujours-est-il que le score reste figé à 2-2.

Mais à la réflexion, le destin fait généralement bien les choses. Et ce dimanche devait être le jour de résurrection nationale d’un éternel condamné : Cristian Rodriguez, alias « El Cebolla » (l’oignon). L’ancien ailier du PSG, également passé par Benfica, n’a jamais eu de chance avec la sélection uruguayenne. Banni du groupe des 23 mondialistes en 2010, il contemple le parcours héroïque de la Celeste devant son poste de télévision. Condamné à ronger son frein. Lors de la Copa America argentine, ses débordements incessants et son abattage physique sont médiatiquement éclipsés par les performances stratosphériques de Luis Suarez. Puis cette saison 2011/2012, il vit une nouvelle désillusion, cette fois en club. Pour service rendus au FC Porto, le président du club décide de…ne pas renouveler son contrat. Consterné mais pas abattu, Rodriguez rentre à Montevideo où durant plusieurs semaines il s’entraîne seul au « Complejo Celeste », le centre d’entraînement de l’équipe nationale. Avec en ligne de mire, non seulement retrouver un club (il a signé avec l’Atletico Madrid), mais aussi décrocher une place parmi les 3 « guides » qui accompagneront les jeunes U-23 uruguayens lors des Jeux-Olympiques de Londres. Contre le Pérou, c’est donc lui qui à la 63ème minute va libérer tout un peuple d’une tête plongeante extraordinaire. Oui, c’est bien Cristian Rodriguez, le sempiternel condamné, l’homme qui ne lâchait rien, qui va redonner le sourire à 3,5 millions d’habitants. Et aussi la 2nde place du Groupe Amsud à l’Uruguay, avec 8 points, juste derrière le Chili mais avec un match en moins. A peine croyable, tant on n’attendait plus cette résurrection. Le 4ème but uruguayen, signé Sebastián Eguren dans les arrêts de jeu, demeure presque anecdotique.

Dimanche, le héros ne s’appelait ni Suarez, ni Cavani, ni encore moins Forlan. Son nom ? Cristian Rodriguez. Et au vu de sa rencontre, il n’est pas impossible qu’il fasse partie de l’aventure londonienne. Vous avez dit revanche ?
Le Pérou, lui, semble destiné à se morfondre dans les profondeurs du classement. Avec seulement trois points, il squatte déjà la dernière place. Là, on ne peut pas parler de rédemption, mais d’éternel recommencement.
Maurice Neyra

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