En ce 20 mars 2008, le regretté Premier ministre Guy Verhofstadt rend comme prévu son tablier au profit du sieur Leterme.
L’Etat fédéral belge, ou si vous préférez le Royaume de Belgique, perd en Verhofstadt un homme d’Etat et se voit contraint d’accueillir à la tête de son « gouvernement » crée dans l’urgence un personnage passe muraille sans envergure nationale mais surtout contesté : Yves Leterme.
Toléré avec méfiance au Nord et quasi honni à Bruxelles et au Sud, Leterme est censé devenir le Premier ministre de tous les Belges, du Nord, de Brussel et du Sud. Son challenge, fédérer les peuples et les politiques de trois régions et de trois communautés, est plus difficile que celui de Nicolas Sarkozy démocratiquement élu au suffrage universel. Le problème, en Belgique, c’est que le Premier ministre est le Chef de l’Etat dans les faits et que cette haute fonction n’est pas dévolue par le Président de la République ni par le Roy, mais qu’elle revient traditionnellement au parti qui a remporté les élections - en l’occurrence le CD&V, parti chrétien démocrate flamand - et que celui-ci a choisi l’homme aux 800.000 voix régionales, un super flamingant obtus et radical comme beaucoup de ses confrères nordistes.
Après neuf mois de crise et un ultimatum de Verhofstadt – ce que le Roy Albert II n’était pas parvenu à faire – un gouvernement fantoche regroupant cinq partis (deux flamands et trois francophones), crée contre nature, vient d’être constitué dans l’urgence et à l’arraché sur des bases socio-économiques contestables car élaborées sur des recettes et des dépenses peu fiables. Des effets d’annonce en quelque sorte comme à poker menteur. Un premier obstacle pointe déjà à l’horizon : l’évaluation flamande en juillet prochain de l’état d’avancement de la réforme institutionnelle en cours d’élaboration. Si pas d’avancées significatives, autrement dit si les Francophones ne baissent pas pavillon, les Flamands l’ont annoncé haut et fort, ce sera le clash.
La politique belge a toujours été faite de compromis, de mises au frigo, de reports de sujets qui fâchent mais maintenant les Flamands n’en peuvent plus. Ils veulent leur réforme et ils l’auront. Quoi qu’il arrive. Peut-on leur en vouloir ? Non. Et ce sera finalement un grand bien pour la Wallonie dont l’avenir politique est immanquablement lié à celui de la Flandre, une chance pour elle car elle devra bouger une fois pour toutes et mettre fin à ses vieux démons sous-régionalistes qui la dévorent.
Si le vieux couple belge est encore debout après le passage du gros open ditch de juillet, les élections régionales de juin 2009 pourraient sonner le glas de ce gouvernement et même de la Belgique fédérale sinon de la Belgique tout court. Mais peut-être ne devra-t-on pas attendre si longtemps tant les intérêts et les attentes sont divergents au sein de « l’équipe gouvernementale » de M. Leterme où tous les participants s’épient et se toisent avec méfiance derrières de beaux sourires hypocrites.
C’est la lutte finale.
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A lire ICI dans La Libre Belgique l’excellent édito de Michel Konen, rédacteur en chef.