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La vague rose

Publié le 26 juin 2012 par Alex75

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Majorité absolue à l’assemblée, contrôle du Sénat, de l’essentiel des exécutifs, jamais la gauche n’aura été si confortablement installé au pouvoir. Le PS détient ainsi tous les leviers de commande, les « pleins » pouvoirs. C’est Hollande imperator. La gauche, prise dans l’euphorie, loue son chef vénéré, la droite, plus perverse et encore discrète, tapie dans l’ombre du jeu de chaises musicales parlementaire, prépare sa future mise en accusation. Il est vrai, qu’Hollande sera jugé responsable de tout. Il reste, en effet, plus puissant dans les apparences, que son maître spirituel, François Mitterrand, qui subit l’opposition d’un sénat vindicatif en son temps, comme de Gaulle. 

C’est du jamais vu, il est vrai, la gauche détient tous les leviers : grandes villes, départements, régions. Mais nous le savons bien, un pouvoir absolu qui reste illusoire. Car contrairement à 1981, l’essentiel des compétences régaliennes, depuis Maastricht, ont été rétrocédées au niveau européen. La politique monétaire est dictée à Francfort, bien qu’elle fut un choix régalien, pendant des décennies pourtant, de Poincaré à Pinay, en passant par Barre, ferraillant dur à l’époque, contre les attaques monétaires du Mark. Des marges infirmes sont laissées à la politique budgétaire par les règles européennes et le poids colossal des dépenses publiques. Ne reste à Hollande que la faculté d’augmenter les impôts. One tardera pas à s’en apercevoir, comme le concédait laconiquement M. Zemmour. Même Arnaud de Montebourg est pieds et poings liés. Il serait facile de se moquer, mais on devrai plutôt s’en inquiéter. Longtemps, son maroquin fut baptisé ministère de l’industrie, c’était au temps, où il y avait encore une industrie française, d’où cette appellation érotique...

Il se place sous la glorieuse tutelle de Colbert, pour signifier le volontarisme industriéliste de l’Etat. Mais Colbert et ses successeurs avait encore une monnaie et des frontières. Montebourg n’a ni l’une, ni les autres. Et il le sait mieux que personne, lui qui a voté non au référendum de 2005, et qui aura défendu des thèses protectionnistes, autour de son concept de démondialisation. Même à Bercy, il aura au-dessus de lui, Pierre Moscovici, qui ne fera rien, qui ne puisse agacer Bruxelles. Et à Bruxelles, règne toujours des libéraux convaincus que le marché – dans ses articulations utra-libérales actuelles -, règne pour le bien commun. L’euro aggrave la situation, dans une double approche, la monnaie étant encore trop élevée – en dépit d’une baisse récente -, pour rendre compétitif les exportateurs français. Surtout, conformément aux thèses du prix Nobel américain Paul Krugmann, la monnaie unique accroît la polarisation de la richesse vers les zones les mieux dotées, industriellement parlant, en clair, vers l’ouest de l’Allemagne. Pour enrayer ce destin tragique, Arnaud de Montebourg ne peut pas améliorer la compétitivité des entreprises françaises, en baissant leurs charges, puisque François Hollande a prévu de les augmenter. Alors Arnaud de Montebourg lancera un appel aux esprits ingénus, aux beaux esprits, dans un appel public (oui, oui).

Mais en attendant ce concours Lépine de la politique industrielle, il parle de recherche, de fiscalité, il fait avec les moyens qu’il a, comme ses prédécesseurs. La Banque Publique d’Investissements, qu’Hollande annonçait pendant sa campagne, a déjà été créé par Sarkozy. Mais c’est l’argent qui manque le plus. L’Europe que Montebourg appelle désormais au secours, dépend du bon vouloir allemand. Mais le temps presse, les plans sociaux et les fermetures de sites retardés pendant la campagne vont tomber comme à Gravelotte. Et Montebourg jouera les pompiers de service, comme ses prédécesseurs, paré au plus pressé dans l’urgence, courir après les patrons des grands groupes mondialisés, quémander, vitupérer, échouer… C’est le tryptique fatal. Comme ses prédécesseurs. Même la politique d’immigration a été transférée à Bruxelles par le traité de Lisbonne – incroyable imposture électorale -, que Sarkozy aura fait ratifier en 2007, selon la célèbre formule du cardinal de Retz. Selon les derniers accords européens, Valls ayant ratifié ce que Guéant avait négocié, la France pourra rétablir ses frontières, en cas de circonstances exceptionnelles. Mais l’essentiel des entrées s’opère par le regroupement familial et les mariages avec les étrangers. Hollande n’y a même pas songé, Sarkozy aussi.

Mais pour Sarkozy, la situation était totalement identique. En 2007, ce-dernier avait été élu sur le supposé retour du politique, faisant de son énergie médiatisée, un gage de son efficacité. Le mythe de l’hyper-président fut ainsi inventé pour farder la réalité de l’hyppo-président, dénué de prérogatives et les Français lui ont fait payer chèrement cette stratégie de com’. Hollande fait de la com’, là aussi. Il a fait  mine de rétablir les anciens usages, autour du mythe du président normal, avec un premier ministre qui gouverne, et un chef de l’Etat en charge de l’essentiel. Seulement l’essentiel, le président n’en a plus la charge. Notre roi n’est plus empereur en son royaume. Même Chirac ne l’était plus, depuis Mitterrand, le dernier monarque républicain, comme il le disait lui-même. C’est l’empire qui gouverne dans son royaume, l’Europe. Notre budget militaire se réduit comme peau de chagrin, Madame Aubry ayant déjà prescrit des coupes sombres, dont souffre l’AVAT – aviation légère de transport -, qui ne dispose, à l’heure actuelle, de plus aucun appareil en état de voler, pour l’anecdote, et pour couvrir certains théâtres d’opérations, comme le relaye la presse au sujet de la situation au Mali. On ne construira plus d’avions, tout seul, même peut-être en coopération avec les Anglais – en dépit de l’hypothétique et désuet accord Sarkozy-Cameron de 2010 -, comme au temps des années Jaguar (et encore, ne sommes-nous plus sûrs de faire aussi bien aujourd’hui…).

Seulement les Français s’en sont aperçus. Les 40 % d’électeurs qui ne se sont pas déplacés (les actifs, les plus pauvres, les plus jeunes, jadis électeurs de gauche), se sont servis d’Hollande pour se débarrasser de Sarkozy. Puis sont rentrés dans leurs tanières, désillusionnés, laissant les élites politico-médiatiques et les plus âgés à leurs simulacres démocratiques.

   J. D.


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