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Lutte contre les paradis fiscaux et sécurité juridique

Publié le 06 juillet 2012 par Duncan

CJUE, 5 juillet 2012, SIAT, C-318/10.

Un arrêt intéressant. Nous avions déjà fait référence aux conclusions de l'Avocat général que la Cour suit, pour l'essentiel.  

Pour rappel, l'affaire concerne un mécanisme fiscal belge qui permet de refuser la déduction de certains frais professionels lorsqu'ils sont soumis, dans un autre Etat, à un impôt qui est notablement plus faible que le taux d'imposition belge si les opérations ne correspondent pas çà des activités sincères et réelles (article 54 CIR). En l'occurrence il s'agissait de la déduction de charges soumises à l'impôt luxembourgeois.

Le raisonnement de la Cour est relativement classique. S'agissant d el'entrave, la Cour note que la déduction de frais professionnels est soumis à une condition supplémentaire par rapport aux règles "normales" de déduction (voir article 49 CIR) à savoir la démonstration du caractère sincère et réel des opérations effectuées. Il n'y a pas non plus de présomption de déductibilité dans cette situation. Il s'agit, selon la Cour, d'une entrave à la libre prestation de services.

La question ets alors de savoir si cette entrave peut être justifiée. Le moins que l'on puisse dire c'est que la plupart des parties intervenantes à l'affire considéraient cette entrave comme justifiée. Ainsi, selon les gouvernement belge, français, portugais et du Royaume-Uni ainsi que selon la Commission, la législation en cause au principal peut être justifiée par la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, par la nécessité de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres, ainsi que, selon les gouvernements français et portugais, par la nécessité de préserver l’efficacité des contrôles fiscaux.

Si la Cour admet la justification de lutte contre la fraude, elle considère toutefois que cette règle est excessive.

En effet, (points 56 et s.) "la règle spéciale impose au contribuable belge de justifier systématiquement la réalité et la sincérité de toutes les prestations, ainsi que de prouver le caractère normal de toutes les rémunérations y afférentes, sans que l’administration soit tenue de fournir ne serait-ce qu’un commencement de preuve de fraude ou d’évasion fiscales.

En effet, ladite règle spéciale peut être appliquée en l’absence de tout critère objectif et vérifiable par des tiers et pouvant servir d’indice de l’existence d’un montage purement artificiel, dépourvu de réalité économique, dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national, seul le niveau d’imposition du prestataire de services dans l’État membre où il est établi étant pris en compte.

Or, force est de constater (...) [qu'une] telle règle ne permet pas de déterminer au préalable et avec la précision suffisante le champ d’application de celle-ci et laisse subsister des incertitudes quant à son applicabilité.  Une telle règle ne satisfait pas, par conséquent, aux exigences de la sécurité juridique qui exige que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir sur les individus et les entreprises des conséquences défavorables".


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