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Le modèle américain : une alternative à l’État culturel français ?

Publié le 10 juillet 2012 par Copeau @Contrepoints

Là où la France fait de l’État l’acteur majeur de son rayonnement culturel, les États-Unis préfèrent jouer sur le mécénat privé et les incitations fiscales, tant au niveau local qu’au plan fédéral.

Par Frédéric Mas.
Publié en collaboration avec Le Cri du Contribuable.

Le modèle américain : une alternative à l’État culturel français ?
Le mécénat d’initiative privée

Le dynamisme du tissu associatif américain jadis célébré par Tocqueville s’est concrétisé dès la fin du XIXe siècle et tout le long du XXe siècle. Des organisations philanthropiques financées par de grands industriels soucieux d’améliorer le bien-être de leurs concitoyens se sont développées au sein de la société civile, indépendamment du pouvoir politique.

Andrew Carnegie crée par exemple en 1911 la Carnegie Corporation à New York, qui consacre 80 millions $ par an à l’attribution de bourses dans le domaine éducatif et pour promouvoir la paix dans le monde. En 1936, la Ford Foundation voit le jour avec un but semblable, mais avec à disposition un portefeuille de 9, 5 milliards $.

Les fondations Rockefeller, Melinda and Bill Gates ou encore celles de Ted Turner ou de Georges Soros témoignent à des décennies d’intervalle de la vitalité de l’échange entre le monde de l’entreprise, de l’éducation et de la culture.

Pour Marina Weimert, directrice de projet chez Capgemini Financial Services, la raison principale de la générosité de ces milliardaires vient du sentiment de reconnaissance à l’endroit d’un pays qui les a tiré de la misère : « Beaucoup de nouveaux riches ont bâti eux-mêmes leur fortune. En donnant à des fondations, ils cherchent à rendre à la société ce qu’elle leur a donné. » Concrètement, cela se traduit par la présence de plus de 12 000 fondations sur le sol américain là où seules 600 prospèrent en France.

Incitations fiscales en faveur de la culture

Il ne faut cependant pas croire que l’État et la culture ne se rencontrent jamais outre-Atlantique. Les relations y sont plus complexes, car les acteurs publics préfèrent encourager la culture par des incitations  et des dégrèvements fiscaux plutôt que par des subventions directes, que le Congrès observe toujours d’un œil hostile.

Ainsi, en 2001, les dons dans le domaine culturel et humanitaire représentaient 12,41 milliards de $. Avec une exemption fiscale de l’ordre de 40% en moyenne, ce sont ainsi près de 6 milliards de $ qui ont été alloués de manière indirecte à ce secteur.

En France, à titre de comparaison, les individus ont donné aux œuvres d’intérêt général un milliard € auquel se sont ajoutés environ 340 millions € venant des entreprises mécènes, alors que la réduction de l’impôt sur le revenu était de 50%.

État fédéral et États fédérés

Au plan national, l’équivalent du ministère de la culture français se nomme National Endowment for the Arts (NEA), et coûtait la bagatelle de 154 millions $ au contribuable américain en 2011, soit à peu de choses près le prix d’un avion de chasse F22.

Agence fédérale créée par le Congrès en 1965, elle distribue des bourses d’aide aux projets artistiques, encourage la littérature et coopère régulièrement avec d’autres organismes culturels locaux et régionaux.

La NEA est dirigée par un président nommé pour 4 ans par le président des États-Unis lui-même. Cette particularité, ajoutée à la taille relativement réduite de la structure, suscite régulièrement des polémiques sur sa trop grande politisation.

Accusée sous Clinton de complaisance pour les avant-gardes les plus obscènes et les plus sordidement provocatrices, elle est actuellement dirigée par Rocco Landesman, nommé en 2009 par B. Obama. M. Landesman n’a pas échappé aux critiques de ses adversaires qui l’accusent régulièrement de snobisme culturel.

Au plan local, les États et les collectivités locales ont augmenté leur financement de 100% de 1993 à 2001, ajoutant au coût de la NEA respectivement 420 millions et 800 millions de $, ce qui, bien entendu, doit être rapporté à l’échelle d’un pays au PIB de 14 300 milliards de $.

Pour conclure, notons que la crise de 2008 a sans aucun doute découragé certains de ces donateurs qui constituent le cœur du modèle culturel américain.

Elle a aussi incité certains artistes à la création. Les plus inventifs d’entre eux n’ont pas attendu la charité du contribuable pour continuer à faire vivre le monde de la culture, mais ont proposé des solutions innovantes comme la modulation des tarifs ou la levée de fonds pour s’adapter au nouveau contexte économique.

Espérons qu’un jour une telle mentalité puisse voir le jour au sein de la création en France.

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