J’ai vu ces derniers jours avec satisfaction, sur de nombreux blogs de toutes tendances politiques, des notes prenant la défense d’Alain Duhamel, qui, suite à une vidéo prise à son insu en novembre dernier dans un amphi de sciences-po et publiée sur le net, a été invité par la chaîne publique France 2 à se mettre en retrait de la campagne présidentielle. Alain Duhamel a par ailleurs spontanément renoncé à présenter sa chronique quotidienne sur RTL durant le temps de la campagne.
Pour ceux qui n’auraient pas vu la fameuse vidéo, je la mets en ligne, ainsi que la réponse d’Alain Duhamel dans une interview avec Jean-Michel Aphatie.
envoyé par jeunesudfparisDuhamel-vote-Bayrou
Cette vidéo est très intéressante, car elle montre que, même si au détour d’une phrase Alain Duhamel se dit prêt à voter pour Fr. Bayrou, sa préférence politique ne l’empêche pas d’être un journaliste rigoureux et honnête : beaucoup de passages dans cette vidéo sont très critiques envers le candidat du centre. Alain Duhamel est la preuve qu’on peut afficher une couleur politique tout en étant un journaliste aussi impartial que possible.
C’est une erreur de croire que les journalistes seront plus neutres s’ils ne disent pas leur préférence politique. On ne présente jamais les faits de manière brute, et la façon de les ordonner révèle souvent la position du journaliste, que ce soit à son corps défendant ou non. Faire croire que les media pourraient être simplement le vecteur de l’information est une illusion.
Un historien dont j’ai oublié le nom disait un jour que, pour qu’un ouvrage d’histoire gagne en objectivité, l’historien devrait toujours écrire en début d’ouvrage d’où il vient, et ce que sont ces préférences politiques. L’avantage est double : d’une part, en affichant ses préférences, l’historien est obligé de s’imposer une très grande rigueur intellectuelle dans le traitement de la matière historique, afin qu’on ne puisse l’accuser d’écrire une histoire partisane ; d’autre part, il est bon que le lecteur sache quelle est l’idéologie qui sous-tend l’ouvrage qu’il lit, car malgré toute son objectivité, l’historien ne pourra jamais voir autrement qu’à travers son propre regard.
Bref, la meilleure façon de tendre vers l’objectivité est de reconnaître que l’objectivité absolue n’existe pas, et ce qui vaut pour l’historien devrait valoir pour le journaliste. Libération est un journal de gauche, le Figaro un journal de droite, et cela n’empêche pas ces deux journaux de présenter une presse de qualité. Le lecteur qui veut se faire une idée juste de l’actualité lira l’un et l’autre, pour s’y faire sa propre opinion en confrontant les points de vue. Cela vaut beaucoup mieux qu’un journal qui ne dirait pas quel point de vue il adopte, et qui, par sa fausse neutralité, influencerait le lecteur à son insu. Les chaînes publiques ne devraient donc pas en vouloir à un journaliste qui, sans ostentation, révèle sa couleur politique.
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