Le 14 juillet est un exercice symbolique, un rite républicain comme les Britanniques ont leur salue de la reine au balcon de
Buckingham Palace. Celui-là, 14 juillet 2012, était donc « le premier de la
présidence Hollande ».
Passée la description parfois fastidieuse des militaires qui défilaient sur les Champs-Elysées, nous pûmes écouter François Hollande, en direct de
l'Hôtel de la Marine, interrogé par Claire Chazal (TF1) et Laurent Delahousse (France 2).
Voici les trois points que l'on pouvait très subjectivement retenir.
Eviter le microcosme médiatique
Nous l'attendions, la question sur le Tweet, le fameux Tweet de Valérie Trierweiler et la réaction semi-officielle et à froid du fils Thomas Hollande. Nous ne fûmes pas déçus. Le sujet était sans
intérêt, eu égard au gravissime politico-international. Mais c'était sans doute celui qu'appréciaient les plus les éditocrates. Chazal et Delahousse ne faillirent pas à leur devoir de classe et
abordèrent donc le fameux sujet. Et la réponse de Hollande fut simple, directe et ferme. Nous pouvions enfin reprendre une activité normale.
CLAIRE CHAZAL
Monsieur le président, vous avez toujours défendu l'idée d'une présidence normale, pendant votre campagne. Vous aviez d'ailleurs pris des engagements qui ont marqué l'opinion, de ne pas mélanger la vie privée et la vie publique. Est-ce que le tweet de votre compagne, Valérie TRIERWEILER, et aussi les récentes déclarations de votre fils, Thomas HOLLANDE, vous ont gêné ?
FRANÇOIS HOLLANDE
Vous avez rappelé quelle était ma conception : je suis pour une claire distinction entre vie publique et vie privée. Et donc, je considère que les affaires privées se règlent en privé, et je l'ai dit à mes proches, pour qu'ils acceptent scrupuleusement le respect de ce principe.
LAURENT DELAHOUSSE
Est-ce que vous comprenez que les Français aient pu être troublés ?
FRANÇOIS HOLLANDE
Non mais, je pense que les Français ils sont... j'allais dire, comme moi : ils veulent que les choses soient claires, que l'Etat soit dirigé par celui qu'ils ont choisi, et qu'il n'y ait aucune interférence. Donc c'est pour ça que le principe que je viens de rappeler sera scrupuleusement appliqué.
Ce ne fut pas le seul échange futile et sans intérêt. Il y eut aussi « il va falloir avoir beaucoup de talent, dans les
années à venir, pour rester populaire ; est-ce que la popularité c'est quelque chose d'important ? » (Laurent Delahousse), « il n'a pas plu aujourd'hui ! C'était magnifique ! »
(Laurent Delahousse, encore), « Vous avez suivi l'équipe de France. Selon vous, finalement, qu'est-ce qui gêne le plus les Français ? C'est l'attitude de certains joueurs, ou les résultats
? » (Laurent Delahousse, encore); « Une question sur Jean-Marc AYRAULT, vous l'avez évoqué il y a un instant. Comment ça se passe, la répartition des rôles ? On a envie de
comprendre » (Laurent Delahousse, enfin ?).
Laurent Delahousse s'était surpassé.
A l'inverse, reconnaissons-lui cette audace, le journaliste de France 2 aborda le cas de la nomination de Jean-Pierre Jouyet.
L'ancien ami de François Hollande allait être nommé à la tête de la Caisse des Dépôts. A droite, la critique est mal aisée, Jouyet fut ministre de Sarkozy; la nomination de Jouyet suit la
procédure officielle, et Jouyet ne part pas pantoufler dans le privé comme nombre d'anciens collaborateurs de Sarkoland. A gauche, on s'agace et on critique cette nomination « amicale ».
Sortir du piège PSA
Le piège était là, François Hollande allait-il tomber comme jadis Lionel Jospin et Vilvoorde ? Le constructeur automobile
venait d'annoncer le plan tant redouté, 8.000 suppressions de postes et la fermeture du site d'Aulnay en 2014.
Le président rappela la manipulation politique (« Le président de Peugeot a même avoué -- et je l'en remercie, de sa
sincérité -- qu'il était prêt à annoncer son plan durant l'année 2012, au début de l'année, mais que parce qu'il y avait des élections, on lui avait fait comprendre que c'était mieux de le faire
après. »), et refusa le plan social proposé par la direction du groupe (« Ce plan, je le considère, en l'état, inacceptable »).
En matière de mesures, Hollande en annonça deux qui, sans être complètes ni définitives, ouvraient au moins une perspective
politique plus grande que le rafistolage sur-mesure auquel l'administre Sarkozy avait fini par nous habituer. Primo, PSA va subir un audit quasi-présidentiel: « Qu'a décidé
le gouvernement ? De nommer un expert, qui va rendre son travail d'ici la fin du mois, pour connaître la réalité de la situation de Peugeot et les justifications ». Avis aux amateurs.
Secundo, un plan stratégique pour l'industrie automobile avec, notamment, « des mécanismes d'incitation pour que nos véhicules, les véhicules français, fabriqués en France,
soient davantage achetés.»
Faire la pédagogie de la rigueur
Hollande n'aime pas le terme. Qu'il nous pardonne de l'utiliser.
Ce samedi, le président français a dû faire de la pédagogie de la rigueur. Ce ne fut pas toujours facile.
Les deux journalistes voulaient des réponses simples. Laurent Delahousse piaffait d'impatience. Il exigeait des « annonces » intelligibles pour faire une accroche de JT (« Je reviens
juste sur la question de la CSG : c'est une question qui est tout de même à l'étude aujourd'hui, au sein du gouvernement ? »).
Hollande avait beau répéter que le budget 2013 devait se construire, que les ministères devaient travailler à leurs économies
et leurs missions, que c'était le job du premier ministre que de « conduire la politique de la nation »; qu'il ne voulait « décider de tout, tout seul », rien n'y
faisait.
« Il n'y a qu'un mot, dans ma bouche, qui sera employé, parce qu'il correspond à ce que je veux faire, pour mon pays... L'effort juste.(...) Oui, il nous faut faire des efforts, y compris en faisant des économies, y compris en appelant les ressources, pour la fiscalité, de celles et ceux qui ont déjà eu beaucoup.»
Chroniques de Juan