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Depuis que je suis au Portugal, je dois bien avouer que je n’ai pas vraiment vu « la crise ». À part quelques graffitis par-ci par-là appelant à la « greve geral », le pays semble vivre au rythme de la douceur du soleil et du tourisme. J’ai bien conscience de n’avoir vu là que le vernis doré d’une réalité toute autre. On n’en parle moins, mais le Portugal est confronté à la même crise que la Grèce, que l’Espagne, que l’Italie, que l’Irlande…
Cette crise est complexe et – une fois de plus – je ne prétendrai pas en détenir les clés, ni pour l’expliquer, ni pour la solutionner. Sans doute, est-ce la crise de « ceux qui ont cru pouvoir vivre au-dessus de leurs moyens »… et les premiers coupables sont à ce niveau les banquiers qui continuent à croire et à faire croire que c’est possible ! Nous séjournons dans un « village » construit de toutes pièces ces dernières années, avec des maisons plus ou moins luxueuses et architecturalement originales. À vue de nez, un tiers de ces somptueuses demeures sont abandonnées à leur triste sort. Elles ont sans doute été achetées à un moment donné, mais « l’heureux propriétaire » n’a plus pu payer par la suite…
Comme partout, la seule réponse apportée à cette crise est « l’austérité » : réductions de salaires dans le secteur public et coupes pour les retraités dans les domaines de la santé, de l'enseignement et du social ; TVA augmentée à 23 % ; augmentation de la taxe sur le carburant avec un litre d'essence qui coûte plus qu'en Belgique ; primes de vacances et de Noël réduites dans le secteur public et pour les retraités (mesure jugée inconstitutionnelle, car elle viole le principe d'égalité de traitement) ; quatre jours fériés nationaux annulés en 2013 (ils en avaient beaucoup !) ; la plupart des autoroutes désormais payantes ; soins de santé plus coûteux en raison de l'introduction d'une nouvelle taxe… Et pendant tout ce temps, le taux de chômage tourne autour de 15%, pour les jeunes 30% !
La crise portugaise existe et est bien là. Si je ne l’ai pas vue, c’est évidemment parce que je ne suis qu’un touriste à qui on ne montre que ce qu’on veut bien lui montrer. Au-delà de ce truisme, il me semble qu’il y a aussi une certaine fierté portugaise, consistant à dire « nous allons nous en sortir ». Les Portugais sont loin d’être les seuls à avoir cette fierté. Mais elle existe néanmoins et est sans doute le meilleur moteur vers la sortie hypothétique d’une crise bien plus mondiale qu’on ne veut bien le croire.
En éducation – un domaine que je connais mieux – lorsqu’un apprenant rencontre des difficultés, la phase la plus importante est qu’il se dise : « OK, j’ai des problèmes, je comprends plus ou moins pourquoi, et grâce à cette compréhension, je sais que je peux m’en sortir ! » (c’est ce que Sophie Courau a joliment appelé la phase d’« incompétence consciente »).
Peut-être qu’en termes de crise socioéconomique, c’est la même chose. Mais je n’oserais pas le jurer !