Magazine Humeur

Les sénateurs de gauche se font piéger : qu’ils assument

Publié le 28 juillet 2012 par Kamizole

J’appris jeudi matin que les sénateurs de gauche s’étaient fait piéger lors du vote du texte de loi durcissant les droits de succession dans le cadre du budget rectificatif. Succession : le Sénat retoque un article (Europe 1, le 26 juillet 2012) : « la gauche étant minoritaire au moment du vote, le Sénat a adopté par 170 voix contre 165, un amendement du groupe UMP supprimant cette disposition ». La droite considérant que cette disposition - qui réduit le montant de 159.000 € à 100.000 € par enfant, l’abattement sur les droits de succession - « réduirait le pouvoir d’achat des classes moyennes » - pas si moyennes que cela ! Lire l’analyse détaillée produite par Samuel Laurent dans Le Monde La fiscalité des successions touche-t-elle les "classes moyennes" ? (24 juil. 2012) et serait « à l’opposé de la revalorisation du travail »…

Ah ! Les sales bêtes… Ils ne manquent pas d’un sacré culot. Je suis comme toujours partagée entre ironie - forcément grinçante - et noire colère. Non seulement ils laissent les finances publiques de la France dans un tel état qu’elle prive François Hollande et Jean-Marc Ayrault - le 1er ministre ayant recouvré toutes ses prérogatives - de toute marge de manœuvre mais ils devraient avoir la décence d’adopter un profil bas de matière de « valeur travail » !

Eu égard au calamiteux bilan de Sarkozy. Le « travailler plus pour gagner plus » qui s’est traduit par la descente en vrille du pouvoir d’achat de la plus grande part de la population - de la Planète pauvre aux classes moyennes - et l’explosion du nombre de chômeurs depuis 2009. Quasi 5 millions, toutes catégories confondues. En n’ayant garde d’oublier la poursuite des délocalisations et de la désindustrialisation massive de la France.

S’ils étaient intellectuellement honnêtes ils devraient saluer le fait qu’autant l’UMP s’était acharnée à limiter au maximum les droits d’expression de la minorité de gauche au sein du Parlement - notamment la limitation extrême du temps de parole et du nombre d’interventions des groupes parlementaires de l’opposition - autant cette réglementation draconienne ne semble pas leur avoir été appliquée dernièrement.

Je lis en effet sur un article de Patrick Roger qu’à l'Assemblée nationale, le PS prend ses marques, l'UMP mène la guérilla (Le Monde 24 juil. 2012) que pour le débat sur la suppression des exonérations des heures supplémentaires « pas moins d’une trentaine de membres de l’opposition étaient montés en ligne (…) On a alors vu le président du groupe UMP, Christian Jacob, et ses collaborateurs à la manœuvre, mettant à l'épreuve les nerfs du gouvernement et de la majorité ».

Pourtant, nonobstant le règlement intérieur de l’Assemblée nationale concocté par l’UMP pour limiter « l’obstruction parlementaire » qui par une foultitude de procédures diverses - amplement détaillées dans un numéro de la revue d’études constitutionnelles et politiques « Pouvoirs » de 1989 que j’avais étudiées à fond en 1ère année de droit - permettait de ralentir considérablement le moment de l’adoption d’une loi, diverses autres procédures constitutionnelles permettraient d’accélérer le procès législatif. A commencer par les ordonnances de l’article 38 C, l’article 49-3 (engagement de la responsabilité du gouvernement) et le « vote bloqué ». Sans oublier les procédures dites « d’urgence » - qui limitent nécessairement le temps d’examen préalable des textes dans les commissions parlementaires, avec un seul passage devant les assemblées au lieu de deux - dont Nicolas Sarkozy fit abondamment usage.

Contrairement à Nicolas Sarkozy, le gouvernement a choisi de laisser les débats se dérouler librement et sans contrainte de temps et c’est tout à son honneur. Sarkozy avait eu le culot de prétendre que la substantielle réforme de la Constitution de 2008 visait entre autres à restaurer les droits du Parlement. Il fut tout au contraire plus encore une simple chambre d’enregistrement des lois concoctées à l’Elysée ou dans le plus grand secret des ministères concernés : nous n’avions - l’opinion publique tout autant que les parlementaires - qu’à attendre leurs « surprises » (du chef). Le mot n’est d’ailleurs pas de moi mais des communicants du pouvoir…

La plupart des parlementaires de l’UMP s’en satisfaisaient, bénis-oui-oui en diable. Mais malheur à ceux qui refusaient certaines mesures qu’ils estimaient contraires - à juste titre - à l’intérêt de la France. Nicolas Sarkozy voulait les parlementaires de l’UMP à sa botte, entièrement dévoués à sa cause, le petit doigt sur la couture du pantalon. «Perindhe ac cadaver » à la mode des Jésuites, en quelque sorte. Mais n’est pas Ignace de Loyola qui veut…

Non seulement Sarkozy ou Claude Guéant quand il était encore secrétaire général de l’Elysée les convoquaient pour les morigéner, « recadrer » ou leur tordre les bras à grands coups de menaces pas même voilées : ils n’obtiendraient pas l’investiture de l’UMP mais mieux encore : s’ils avaient eu l’outrecuidance d’adopter un amendement contraire aux vœux de Sarkozy en s’alliant avec les parlementaires de l’opposition, cet amendement était immédiatement remis en cause par le pouvoir. Il fallait voter derechef pour l’abroger.

Or, je fus particulièrement courroucée - toujours le 26 juillet ! - d’apprendre que sur la réforme des successions un nouveau vote du Sénat était demandé (Europe 1) arguant - comme naguère les chiens de garde de Sarkozy - un « problème technique ».

J’t’en fiche ! Ce que j’apprends sur Le Monde Droits de succession : la gauche subit un revers au Sénat (26 juil. 2012) selon lequel il s’agirait « d’une erreur matérielle » n’est pas franchement fait pour calmer ma colère. Rappelant que la gauche n’est que faiblement majoritaire au Sénat (6 voix d’avance) l’article nous indique en quoi a consisté cette erreur, commise par Joël Labbé, élu écologiste et pas encore au fait des us et coutumes - fort contestables - en matière d’adoption des textes. Lequel serait fort « marri » dixit François Rebsamen qui est allé le voir : « il n’a pas l’habitude d’assumer la responsabilité du groupe Verts »…

Il a tout simplement oublié de voter pour les onze élus Verts absents lors du scrutin. Que faisait donc au même moment Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste au Sénat qui affirme : « C’est une erreur matérielle, il y aura une deuxième délibération et l’article sera revoté dans la journée » ? François Mitterrand fustigeait en son temps les actionnaires gagnant des masses de flouze en dormant… Il semble bien qu’il en soit de même pour les parlementaires !

C’est une grave injure pour la plus grande partie de nos concitoyens, lesquels sont au demeurant bien loin d’être aussi grassement rétribués que les parlementaires ! Sont-ils payés s’ils ne travaillent pas, hors événements prévus par le Code du travail ? Que non point. Les heures ou journées d’absence ne sont pas payées sauf si leur employeur en décide autrement, le plus souvent en considération des circonstances ou d’autres éléments appréciés intuitu personae.

J’ai toujours été outrée de voir à la télévision ou lire dans la presse ce lamentable spectacle des parlementaires galopant dans les travées de l’Assemblée nationale et du Sénat pour activer les boutons de vote électronique de leurs confrères absents. D’abord et théoriquement, chaque parlementaire ne devrait pas disposer de plus d’une délégation de vote.

L’article 27 C. - qui rappelle au demeurant la nullité de tout mandat impératif - est tout à fait explicite à cet égard : « Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote (celle-ci a été adoptée en 1958). Dans ce cas, nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat »…

De mon avis, il n’était pas nécessaire de recourir à un second vote des sénateurs, annulant le premier dans la foulée et ce, pour une raison fort simple : l’Assemblée nationale a toujours le dernier mot, y compris en cas d’échec de la Commission mixte paritaire (CMP prévue par l’article 45 C. en cas de désaccord entre les deux chambres).

Serait-ce trop demander aux parlementaires d’être présents à l’Assemblée nationale ou au Sénat lors des séances ? J’admets fort volontiers que certains n’y peuvent assister pour diverses raisons tout à fait honorables ou justifiées : ils siègent au même moment dans une commission, participent à des missions telles que les enquêtes parle-mentaires ou dans des organismes en tant qu'élus ou désignés par leurs pairs ou le gouvernement. Qu’ils donnent une délégation de vote à quelque collègue et la cause est entendue.

Je n’ai pas le souvenir de la date exacte - quelque personne charitable me la donnera sans doute parmi les lecteurs/trices - mais il fallut attendre fort longtemps avant que les parlementaires n’adoptent - enfin ! - une loi les astreignant comme tout un chacun à l’impôt sur le revenu s’agissant de leur rémunération principale de député ou sénateur. Lors même qu’ils votaient les dispositions de la loi de Finances s’appliquant à l’ensemble de la population !

Si cette rémunération fixe dite « de base » assez élevée - 5.514,68 € - était transformée en « jetons de présence » nul doute qu’ils feraient preuve de plus d’assiduité ! Fût-ce dans les couloirs, la salle des pas perdus ou à la buvette, sachant qu’une sonnerie retentit au moment des votes. Par ailleurs, et au moment même où la Commission Jospin est chargée de plancher sur la moralisation et la rénovation de la vie politique, il me semble plus que mal venu que les députés socialistes se fussent opposés au contrôle des dépenses des députés, s’agissant de fiscaliser la part non dépensée de l’IRFM (indemnité représentative pour frais de mandat). Le problème se posant d’ailleurs exactement dans les mêmes termes pour les sénateurs.

Ce sont les mêmes élus qui depuis plus de 10 ans n’ont cessé de rogner les frais professionnels de diverses catégories, soit qu’elles aient bénéficié d’une remise de 30 % soit que certains aient choisi d’être imposés selon le régime des frais réels, devant fournir des justificatifs de leurs dépenses, bien évidemment contrôlées par le service des impôts.

Sachant que les députés perçoivent mensuellement 9.138 € affectés « à la rémunération de collaborateurs », attaché parle-mentaire, secrétaire ou autres. Et que certaines de ses fonctions sont parfois assumées par leur conjoint et/ou leurs enfants… et que l’IRFM proprement dite - 6.412 euros… supérieure à leur indemnité de base ! - est en principe destinée à leur permettre « de faire face aux dépenses liées à l’exercice de leur mandat qui ne sont pas directement prises en charge ou remboursées par l’Assemblée ».

Sachant qu’ils disposent par ailleurs de la prise en charge inté-grale de leurs déplacements - les salariés n’ont droit, dans la Région parisienne, qu’au remboursement de 50 % de leur Carte orange - sur l’ensemble du territoire. Qu’elle serve à régler le loyer d’une permanence parlementaire dans leur circonscription, soit. Mais qu’elle fût affectée « aux frais d'habillement et de dépenses courantes » ! Voilà qui est sidérant. Hormis les cas où les vêtements de travail - blouses ou bleus, divers uniformes - sont fournis par l’entreprise, j’aimerais que l’on m’indiquât quelles sont les professions où les salariés et les cadres bénéficient d’une prime pour être vêtus de façon aussi convenable que leur statut l’exige…

A en croire Charles de Courson, initiateur de l’amendement, certains députés utiliseraient tout bonnement l’IRFM comme un complément de revenu. D’où l’idée de soumettre à l’impôt sur le revenu la part non effectivement dépensée dans des frais de représentation - lesquels devraient être strictement contrôlés par les services fiscaux. Ou la rembourser. Ce qui semble logique.

Bien évidemment, je n’ai pas attendu Bruno Le Roux : "Il faut plus de contrôle, plus de sobriété, plus de transparence au Parle-ment" (Le Monde 24 juillet 2012) pour subodorer que « Monsieur de Courson, député depuis dix-neuf années dont quatorze dans la majorité (qui) découvre sur le tard les vertus de la transparence ! » jetait de fait un pavé dans la mare des socialistes pour les mettre en porte-à-faux avec toutes les déclarations de principe sur la transparence et la moralisation de la vie publique.

Raison de plus pour adopter le principe de cette fiscalisation ! Car l’UMP n’aura que trop beau jeu à démontrer à l’opinion publique que les socialistes et leurs alliés n’exigent de fait la sobriété, la transparence et les contrôles que pour les autres. Sans doute l’opinion publique ne sera-t-elle pas dupe, s’agissant des intentions réelles de l’UMP qui n’a jamais admis un tel contrôle quand elle était au pouvoir, à preuve ce que m’apprend in fine un article de Samuel Laurent Députés : pourquoi la transparence est un long chemin (Le Monde 23 juil. 2012) :

« En 2011, le député PS de l'Aisne René Dosière, connu pour ses combats en faveur de la transparence, avait réussi à faire voter par l'Assemblée la fin de l'écrêtement. L'argent restant devait rester dans les caisses de la collectivité. Mais les sénateurs UMP avaient finalement supprimé son amendement et rétabli le dispositif, qui est toujours en place ».

Sur le principe, je ne peux donc que donner raison à Jean-Louis Borloo : le refus par les députés du contrôle de leurs frais est une "énorme erreur"  (Le Monde 19 juil. 2012) notamment quand il déclare sur BFM/TV que « refuser de justifier ses frais est incompréhensible par les Français et qu’il s’agit d’un combat d’arrière-garde qui va se retourner contre les parlementaires et la démocratie »… Ben, oui quoi : c’est une fois de plus donner du grain à moudre à Marine Le Pen dans son combat démagogique contre « l’UMPS » et sa dénonciation des « tous pourris » !

Il faut toute la connerie d’un Henri Guaino - nouveau député UMP des Yvelines - pour oser affirmer sans rire (?) que « si les députés sont obligés de justifier chaque dépense, alors ils ne vont plus être des députés libres » ajoutant mais le sachant au moins aussi menteur que Nicolas Sarkozy je ne sauras me prononcer sur la réalité de son affirmation « Il n'y a pas une seule démocratie au monde où les députés ont aussi peu de moyens pour faire leur travail »… encore faudrait-il qu’ils le fassent ! Et ne jouent pas les abonnés absents lors des séances.

Où ne va-t-il pas faire se nicher la liberté ! J’ai des revenus modestes, d’où force galères dont je me passerais aisément, je ne fraude ni le fisc ni la Sécu mais je me sens d’autant plus libre de critiquer ces gloutocrates qui se gobergent aux frais de la princesse. Je vous avais prévenu : je suis certes socialiste mais nullement bénie-oui-oui et personne ne m’empêchera de critiquer le gouvernement et les élus socialistes si je considère qu’ils ont tort, sur la forme comme sur le fond. Et c’est précisément le cas tant pour le second vote à l’assemblée nationale que s’agissant de la transparence sur leurs dépenses.

Le même Guaino qui en décembre 2009 osa parler de « dazibao » - les affiches murales de la Révolution culturelle maoïste - lorsque le Canard enchaîné publia le montant de son salaire de conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Elysée… entre autres articles sur le sujet : Son salaire révélé, Guaino dénonce «une transparence totalitaire (Libération 2 déc. 2009). Culture du secret qui n’a nulle place dans une république démocratique fondée sur l’Etat de droit : les citoyens - con…tribuables - ont le droit d’être informés de l’usage fait des deniers publics.

Les députés de la majorité sont proprement ridicules quand ils prétendent renvoyer la balle au sujet des frais de mandat au président de l’Assemblée (Le Monde 20 juil. 2012) pour qu’il fasse des propositions. Pierre-Alain Muet n’échappe pas au ridicule en affirmant : « C'est un vrai sujet. On peut le régler entre nous ».

Une fois de plus les « petits arrangements entre amis » ! Dans le seul souci d’échapper au seul contrôle qui vaille car selon ce que je lis sur un autre article du Monde Ces députés qui acceptent le contrôle de leur frais professionnels (20 juil. 2012) « l’adoption de cette proposition aurait, il est vrai, impliqué que les parlementaires fournissent à l'administration fiscale des justificatifs de leur frais pour qu'elle puisse déterminer ce qui devait - ou non - échapper à l'impôt sur le revenu »…

Il n’est donc pas étonnant le moins du monde que Christian Eckert (PS), rapporteur général du budget, opposé à l’amendement - et appuyé par Gilles Carrez, président (UMP) de la commission des finances de l’Assemblé nationale - tout en reconnaissant que « le problème de fond est le problème du contrôle » se dise « favorable à un contrôle par les questeurs de l'Assemblée »…

Ah ! Ah ! Ah ! Triple buse. Merci de nous prendre pour des cons ! J’ai non seulement une mémoire en très bon état de marche mais des tonnes d’articles archivés dans les dossiers de mon ordinateur. J’avais donc parfaitement souvenance d’un questeur - socialiste ! : Jean-Marc Pastor épinglé pour ses notes de frais lesquelles empoisonnèrent l’atmosphère au Sénat (Le Monde 5 juil. 2011)… Pas de chance, hein ? Surtout presque un an après, ça l’affiche plutôt mal. Cherchant le plus maladroitement possible à minimiser l’affaire, il osa même se prévaloir d’un faux communiqué de soutien de Larcher (20 Minutes 4 juil. 2011) alors président du Sénat.

Jean-Marc Pastor s’était fait régler les factures de deux repas pour un total de 2492 euros dans un restaurant géré...par sa fille ! Arguant que « le règlement du Sénat n'interdit pas que l'on puisse utiliser nos frais de représentation dans nos départements »… Sans doute mais dans le resto de sa fille ? Il a quand même fini par reculer et « décidé de rembourser ces 2.000 euros ».

Vous trouverez un très bon résumé de cette lamentable affaire dans l’Express Un sénateur PS épinglé pour des notes de frais douteuses (6 juil. 2011) laquelle tombait plutôt mal pour Larcher et les sénateurs car au même moment les sénateurs se votèrent une prime de 3.500 euros (Libération 5 juillet 2011). En fait de 3531,61 euros - 500 € de plus ou de moins est loin d’être négligeable ! - justifiée « comme un rattrapage exceptionnel sur un complément d’indemnité représenta-tive des frais de mandat (IRFM) qui aurait dû être versée en une seule fois fin juin ».

L’article indiquait que l’indemnité de base mensuelle s’élevait à 5.514 € et qu’il fallait y ajouter, outre une indemnité de fonction de 1.420 €, l’IRFM pour un montant de 6.240 €… Et qu’au surplus « les dignitaires, présidents, vice-présidents, questeurs et secrétaires perçoivent une indemnité supplémentaire, laquelle était de 5.170 € bruts par mois pour les questeurs qui touchent chacun, en plus, des frais de représentation de 11.600 € par an » !

Devant le tollé général, cette disposition fut abrogée. Nul doute que si elle n'était venue à la connaissance du grand public elle aurait été appliquée. Eh ! hop ! passez muscade.

D’autant plus indécent qu’à la même époque le gouvernement infligeait aux Français de nouveaux sacrifices en raison de la crise grecque, et a remis le couvert au mois d’août 2011. En n'ayant garde d’oublier une masse de dispositions tout aussi injustes et draconiennes dans la loi de Finances 2012 adoptée début novembre 2011.

Gérard Larcher se serait bien passé de voir le Sénat une nouvelle fois sous les feux de la rampe après que Mediapart eut épinglé les très hauts salaires des membres de son cabinet  (Nouvel Obs 12 avril 2011) soulignant que les dépenses de personnel du président du Sénat avaient augmenté de 26 %…

Le plus fendard - façon de parler - étant que Gérard Larcher avait succédé en 2008 à la présidence du Sénat à Christian Poncelet - « alors au cœur d’une polémique sur le train de vie luxueux du Sénat et pour s’être fait attribuer notamment une appartement à vie » ! Application évidente du principe selon lequel l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même - en axant sa campagne interne sur le retour de la rigueur ! Mauvaise pioche : selon Mediapart, la rémunération de son directeur de cabinet était de 19.154 € net imposable par mois, celle de la conseillère de presse de 10.880 € (contre 6.229 € du temps de Poncelet), le conseiller aux Affaires sociales, entreprises et formation professionnelle touchant 8.788 € (contre 5.378 € sous Poncelet) et un conseiller - forcément très spécial - percevait 8.029 € qui s’ajoutaient aux 11.715 € de la pension qu’il percevait au titre de fonctionnaire retraité du Sénat…

Enfin, je ne sais s’il vous en souvient mais au début de l’année 2010, alors que Sarkozy, Woerth & consorts entendaient infliger une véritable punition à la plus grande majorité des Français en matière de réforme des retraites - refusée par 66 % d’entre eux - nous eûmes la révélation du système de retraite des sénateurs, véritablement exorbitant du droit commun, dépassant même en termes de générosité appliquée à soi-même le régime des députés qui ne les laisse pourtant pas sur la paille. J’avais bien entendu épinglé ces monstrueux privilèges en son temps La très dorée retraite des parlementaires (6 juin 2010) en me référant à un article du Nouvel Obs Le jackpot de la retraite des parlementaires (28 mai 2012) dont le sous-titre parlait de lui-même « A l'heure où les Français sont appelés à travailler plus longtemps, députés et sénateurs, eux, cumulent les avantages » dont le moindre n’était pas qu’il leur suffit d’avoir cotisé 5 ans - la durée d’un mandat - pour percevoir le même revenu qu’un salarié du privé : 1.550 € (étant entendu que certains touchent nettement moins) qui aura cotisé 40 ans.

Députés comme sénateurs ayant la possibilité de verser une double cotisation pendant 15 ans, ce régime étant aménagé pour les années suivantes. Globalement, la pension moyenne pour un député est de 2.700 euros nets par mois, celle d'un sénateur de 4.442 euros nets. Selon Marie-Laure Dufrêche, déléguée générale de Sauvegarde retraites dont les propos sont repris par un article de La Dépêche Sénateurs et députés: un régime de retraite très avantageux (14 avril 2010) le régime de retraite des députés fonctionne selon le système par répartition (les actifs cotisant pour les retraités en même temps que pour leur future retraite) « mais leurs cotisations n’abonderaient leur caisse qu’à hauteur de 12%, par leurs cotisations, les 88% restant sont financés par une subvention - votée par les parlementaires eux-mêmes ! - et payée par l'Etat. Ce qui coûterait aux Français la bagatelle de 52 millions d'euros par an sur les 60 millions de prestations versées. Le rendement de leur régime est imbattable : pour un euro versé, un député en touchera 6 au moment de la retraite, contre 1 à 1,5 pour un Français lambda ». Pas belle leur vie ?

Quant aux sénateurs, ils ne font pas appel aux fonds publics, leur caisse fonctionnant en grande partie par capitalisation. Les cotisations couvrent 43% des dépenses, le reste étant financé par les intérêts de leurs placements.

« Leur régime est tellement bien géré » selon Marie-Laure Dufrêche, « que leur caisse était excédentaire de 575 millions d'euros fin 2008, ce qui leur permet d'assurer 23 années de prestations pour leurs 572 pensionnés (296 ayant droits directs, 271 veufs et 5 orphelins) ». Autre avantage exorbitant du droit commun : « en cas de décès, le veuf ou la veuve reçoit 66% de la pension du défunt, sans condition de ressources »…

Interrogé à l’époque, le socialiste Jérôme Cahuzac - alors président de la Commission des Finances à l'Assemblée - estimait que « c’est une question de principe et de choix : si l’on considère qu’exercer un mandat n’est pas un métier comme un autre mais une fonction, il faut savoir si l'on veut que cette fonction soit exercée par tous ? Si l'on veut que la représentation nationale soit le reflet de toutes les composantes du pays, alors il faut que tous puissent être élus, pointant le risque, que ne s’engagent dans ce type de fonction élective que ceux qui, soit par la naissance soit par les hasards de la fortune ou de la chance, pourraient se permettre d'être élus en faisant fi de tout avenir professionnel autre ».

Réponse qui n’est pas sans nous rappeler « Le Savant et le politique » de Max Weber. Or, il y a beaucoup plus de parlementaires qui ont fait de leur activité une profession que de ploutocrates (de ploutos : fortune) et parmi les parlementaires et/ou ministres une proportion importante de hauts fonctionnaires. Qui non seulement reprendront leur activité s’il abandonnent leurs mandats ou fonctions ministérielles mais à qui la retraite de la fonction publique est intégralement versée comme s’ils avaient cotisé comme n’importe quel autre Conseiller d’Etat ou préfet…

Gérard Larcher qui n’est jamais avare de stupidités aussi grosses que lui - donc énormes ! - nous la bâilla bien belle en prétendant que selon un audit réalisé en 2009 par un cabinet extérieur "Un sénateur retraité coûte 3,7 fois moins cher à l'Etat qu'un conseiller d'Etat ou qu'un préfet" (La Tribune 22 juin 2010)… La bonne blague ! A supposer que ce fût vrai, il oublie simplement que ceux des sénateurs qui sont issus de la haute fonction publique cumuleront et leur retraite de parlementaire et celle de haut fonctionnaire - à taux plein et sans avoir cotisé quand ils n’exerçaient plus dans leur corps d’origine. C’est donc bien l’Etat qui leur versera cette pension.

Le même Larcher ne manqua pas d’un sacré toupet en déclarant qu’en matière de retraite des sénateurs nous nous appliquerons les mêmes choses qu’aux Français(Le Point 20 avril 2010). Pur poker menteur mais il s’agissait de faire avaler aux Français la pilule de la réforme des retraites ! Je doute que la retraite des députés et sénateurs ait été aménagée autrement que tout à fait à la marge… La preuve en étant que selon un article de 20 Minutes, Jean-Pierre Bel, nouveau président PS du Sénat justifiait - « comme ses prédé-cesseurs » - l’existence de la "cagnotte" alimentant la retraite des sénateurs (10 nov. 2011) soulignant que « ce système s’avère moins coûteux pour le contribuable »…

Sans doute mais les sénateurs restent de sacrés privilégiés comparés au vulgum pecus. Bref, plus ça change, moins ça change ! Comment voudriez-vous - que même de gauche - ils aient beaucoup d’égards pour les difficultés de la grande masse des Français ? J’englobe dans mon sévère jugement Jérôme Cahuzac, à moins que depuis sa déclaration d’avril 2010 il n’eût été touché par la grâce en prenant ses nouvelles fonctions de ministre de l’Economie et des Finances…

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Liste des articles dépouillés sur le sujet et non cités :

Retraite en or: la «cagnotte» des sénateurs Marianne 18 Juin 2010

La retraite en or cachée des dignitaires du Sénat Mediapart 08 septembre 2011

Quand le Sénat réforme les retraites des... sénateurs La Tribune 13 oct. 2010

Sénat : Ces très chères retraites complémentaires 20 Minutes 9 sept. 2011 (selon lequel certains sénateurs toucheraient 5.000 € en plus de leur indemnité)

La réforme des retraites des parlementaires est en cours Le Monde 20 oct. 2010


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