Pourtant, c'est un fait, notre environnement est de plus en plus bruyant. Entre les voitures, les avions, les trains, les enfants de voisins (les votres ne sont pas bruyants, n'est-ce pas ?), les sources sonores artificielles (chaine hi-fi, télévision), on finit par oublier... le silence. Même lorsque nous nous sentons "au calme", notre oreille entend de légers bruits. Pour connaître la valeur du silence, il faut se rendre soit dans un désert, soit dans une chambre sourde. J'ai fait les deux. Dans les deux cas, ça m'a fait une drôle d'impression. Pas désagéable, mais pas très agréable non plus. Nous avons besoin d'un léger fond sonore pour pouvoir être à l'aise !
Mais pas n'importe quoi, ni n'importe quand. Le bruit, que ce soit au travail ou chez nous, engendre un stress, que l'on a tendance à sous-estimer, même ceux qui en sont victimes ! Les conséquences de ce stress sont multiples : insomnie, irritabilité, dépression, sans oublier bien sûr la surdité partielle qui peut survenir lorsque le bruit est trop intense (plus de 120 dBA).
Même un bruit bien plus faible, disons 100 décibels, peut causer un dommage à l'oreille s'il survient brusquement : Les innuits du Groënland, qui vivent dans un silence presque total, soufrent très souvent de graves déficiences auditives. Pourquoi ? Parce qu'ils chassent avec un fusil, et que la détonation, survenant après une longue période de silence, blesse leur oreille. L'oreille possède en effet la qualité de s'adapter, dans une certaine mesure, au bruit environnant. Mais seulement dans certains limites ! Les jeunes qui écoutent de la musique très fort sont souvent victimes d'acouphènes, des sifflements de l'oreille, lorsque le silence revient. Parfois ces sifflements s'en vont avec le temps. Parfois pas. L'oreille est un organe fragile, et il est facile de lui causer des dommages irréversibles !
On mesure l'intensité sonore en décibels acoustique. Le décibel acoustique est une mesure de la puissance sonore reçue par l'oreille (ou par un micro). C'est une unité logarithmique, ce qui signifie que quand on ajoute (ou enlève) 3 décibels, on multiplie (ou divise) la puissance par deux. Par exemple si votre chaine hi-fi de 100 W génère (à fond) un bruit de 80 décibels, une chaîne de 200 W générera un bruit de 83 décibels, et une chaîne de 50 W un bruit de 77 décibels.
Question: quelle puissance devrait avoir votre chaîne (en supposant que l'ampli et les haut-parleurs aient le même rendement), pour générer un bruit de 101 dB ? Voyons voir : repartons de mon ampli de 80 W, qui fait 80 décibels. 101 dB, c'est 21 de plus que 80. 21, c'est trois fois sept. Donc il faudra multiplier sept fois par deux la puissance de mon ampli. et 80 x 2 x 2 x 2 x 2 x 2 x 2 x 2, ça fait 10240 W. Dix kilowatts ! Cela explique la taille énorme des amplis des groupes qui se produisent en plain air, et qui cherchent à faire un "son" de 100 dB.
Les avions
A tout seigneur, tout honneur : Quand on parle de pollution sonore, c'est en général aux avions qu'on pense en premier. Et il est vrai qu'un avion produit un bruit très important lorsqu'il vole à basse altitude, c'est à dire pendant les phases d'atterissage et de décollage. Au décollage, le bruit est produit à peu près uniquement par les réacteurs. A l'atterissage, le buit est provoqué pour moitié par les réacteurs, et pour moitié par l'écoulement aérodynamique de l'air le long du fuselage, des ailes et du train d'attérissage. Les avionneurs sont conscients du fait que le bruit est un enjeu majeur, et ils font des efforts pour réduire le bruit des avions. l'Airbus A380, par exemple n'est, malgré sa taille, pas plus bruyant (du point de vue de la gêne ressentie) qu'un A320 pourtant beaucoup plus petit, ceci en partie parce que les fréquences sonores qu'il émêt sont plus plus graves et moins "stressantes" que celles d'un petit avion. Concorde, en revanche, était un avion extrèmement bruyant. Mais souvenons-nous que les clients des avionneurs sont les compagnies aériennes et non les aéroports, et que certaines compagnies sont plus "sensibles" que d'autres sur la question du bruit...Parce que leur bruit est beaucoup plus fort lorsqu'ils sont proches de l'aéroport, les avions gênent essentiellement les riverains. Ici, je fais faire un peu de provocation : Lors de l'ouverture de l'aéroport de Roissy CDG, il était situé au milieu de rien : les riverains étaient très peu nombreux. C'est après l'ouverture de CDG que les zones résidentielles se sont mises à pousser comme des champignons près de l'aéroport, et que des centaines de miliers de personnes s'y sont aglutinés, attirées par son importance économique (Roissy génère 10% de l'économie de l'île de France !). De quel droit ces gens se plaignent-ils maintenant du bruit des avions ? Ils savaient très bien de quoi il retournait avant de faire construire !
Oui, c'est vrai, mais... C'est aussi un fait que les pouvoirs publics ont pris conscience assez tardivement du problème, et qu'ils ont réalisé seulement il y a une vingtaine d'années que s'ils comptaient seulement sur la sagesse des gens, ceux-ci n'écouteraient en fait que les promesses des promoteurs. Il fallait réglementer ! Et des règlements, il y en a. Ceux-ci portent aussi bien sur les règles à respecter par les constructions d'habitations que celles qui concernent le mouvement des avions, contraints désormais de suivre des procédures anti bruit : au décollage, les avions montent le plus vite possible pour ne géner qu'un minimum de riverains. A l'atterrissage, ils descendent en pente constante (on ne peut pas faire suivre à un avion qui est en "finale" une pente descendant à plus de 3%, ce serait dangereux). Et bien sûr, leur trajectoire est fortement "encadréé". Les pouvoirs publics se concentrent à l'heure actuelle sur la précision de ces trajectoires, de manière à ce que les avions ne s'en écartent jamais : le principe est : quitte à géner, autant gêner toujours les même, en choissant les zones les moins peuplées et en réglementant les constructions dans ces zones définies. Le trafic de nuit (à roissy, essentiellement celui de Federal Express) est églement limité.
Mais quoi qu'on en dise, le nombre d'avions va continuer à augmenter. L'espoir est que ce sera avec des avions moins bruyant, sur des trajectoires mieux définies.
Les routes
Alors là, pas de pitié ! Mais que fait la police ! Les mobylettes trafiquées sont une plaie. On a calculé qu'un de ces engins, traversant Paris à trois heures du matin, réveille 20000 personnes...Idem pour les camions : je veux bien que ces véhicules aient besoin d'une forte puissance, et doivent donc être plus bruyants que les voitures. Mais calculons donc : un moteur de camion fait a peu près 300 CV, il est donc a peu près quatre fois plus puissant que celui d'une petite voiture. Il devrait donc faire 6 décibels de plus, et seulement six ! On en est loin. La reglementation est très peu contraignante pour les camions...
Enfin, une bonne partie du bruit des véhicules ne provient pas de leur moteur, mais simplement du contact avec la route. Or on sait faire des routes avec des revètements peu bruyants. Il existe même des routes HQE, dites de haute qualité environnementale. (Voir l'article correspondant sur wikipedia)
Conséquences du bruit
Une étude financée par la région Ile-de-France a porté sur 30 communes de cette région, exposées à des niveaux variés de bruits. Selon ses conclusions (analyse de questionnaires anonymes de 4 400 patients suivis par 78 médecins généralistes de ces communes), publiée mercredi 26 septembre 2007 montrent que l'exposition au bruit est associée dans ce panel à un risque plus élevé d'hypertension artérielle chez les hommes, d'hospitalisation et d'arrêt de travail chez les femmes, à des états anxieux et à une consommation auagmentée de médicaments chez les deux sexes. La différence est forte chez les hommes de 40 à 69 ans, concernant la tension artérielle (la prise de médicament est 5,6 fois plus fréquente quand le domicile est survolé par des avions passant à moins de 1 000 mètres). Au même âge, les femmes prennent environ 10 fois plus d'anxiolytiques et d'antidépresseurs lorsque leur logement est proche d'un "point noir" ferroviaire. Des corrélations fortes entre l'exposition au bruit et les troubles de l'appétit et du sommeil apparaissent également. Cette étude demande des approfondissement pour déterminer la part du bruit ou de la pollution ou d'autres stress associés à la source du bruit. Cette région demande l'interdiction des vols aériens de 23 heures à 6 heures à Roissy, et Orly.Les éoliennes
Il y a des pisse-froid qui protestent contre l'implantation d'éoliennes pour produire de l'électricité, au motif que ces dernières seraient bruyantes. Soyons clair : c'est du vent (!). Le bruit d'une éolienne est réel, mais il est faible. Et rien n'interdit de les mettre loin des maisons ! De plus, le concept "poussé" par EDF, celui de champs d'éoliennes géantes, est complètement dépassé : EDF ferait bien d'apprendre que l'ère des "centrales electriques" hyperpuissantes et en nombre restreint est terminée, et que l'avenir est aux petites unités réparties sur tous le territoire.Le bruit de la mer
Enfin, une chose à laquelle on ne pense pas forcéement, c'est que la pollution sonore existe aussi... dans la mer.Le monde du silence est de plus en plus bruyant. Les scientifiques s'inquiètent d'une pollution sonore croissante dans les océans, générée par le transport maritime, et qui pourrait toucher la faune marine.
Des échouements spectaculaires de baleines ont été liés à l'utilisation de sonars militaires, déclenchant une polémique sur leur utilisation. Mais les scientifiques s'inquiètent davantage de l'augmentation générale du bruit de fond de l'océan, dû pour une grande part à la navigation commerciale.
L'audition est primordiale pour les animaux marins qui utilisent les sons pour naviguer et communiquer. Dans ces conditions, certains chercheurs estiment que le développement d'un «smog acoustique» revient à «aveugler» ces créatures, ce qui affecterait leur alimentation, leur reproduction ou d'autres activités.
«Leur monde est en train de s'écrouler», prévient Christopher Clark, bioacousticien à l'Université Cornell, «Ils se fient énormément au son. Ils ne voient rien.»
L'augmentation de cette pollution sonore coïncide avec l'essor de la navigation commerciale. Entre 1948 et 1998, la flotte mondiale a vu son tonnage passer de 85 millions à 550 millions. Dans le même temps, le bruit de fond de l'océan s'est accru d'environ 15 décibels, soulignent les scientifiques.
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