Comme à son habitude, la Cour des comptes a rendu un rapport captivant, cette fois-ci, le 17 juillet dernier, sur la politique de la ville. Intitulé « La politique de la ville, une décennie de réformes », le rapport dresse un bilan balancé de cette politique publique.
Tout est dans le titre, une décennie de réformes. Des réformes multiples, qui se suivent, qui changent d’angles d’attaques, qui modifient les règles de ce que l’on appelle la géographie prioritaire (les quartiers éligibles aux fonds de la politique de la ville). Une décennie précédée d’une autre qui avait déjà lancé de multiples réformes dans ce domaine.
Pourquoi cette succession de réformes et quel bilan en tirer ? Les cassandres jugent cette politique couteuse et inefficace. Inefficace, mais par rapport à quoi ? Imaginez à quoi ressembleraient les quartiers sans une action publique ambitieuse. La politique de la ville, au travers du programme national de rénovation urbaine et à son agence, à totalement transformé la physionomie et l’esthétique de quartiers qui étaient restés bloqués à l’ère des années 60 qui les ont vues naître. La politique de la ville a donc déjà offert un nouveau cadre de vie à ses habitants.
En revanche, elle n’est pas une solution miracle à tous les problèmes rencontrés sur ces territoires. La politique de la ville est aujourd’hui de plus en plus une politique de l’urbain et non une politique sociale. Même si certains de ses instruments, comme les contrats urbains de cohésion sociale, intègrent un volet social, une volonté d’aider les habitants, la politique de la ville n’a pas tout résolu.
Que manque t-il ? D’abord la mobilité résidentielle. Les quartiers restent touchés par un phénomène de ghettoïsation. Les quartiers rénovés n’attirent pas des classes moyennes et aucun brassage social ne se produit. Comme le révèle la Cour, le ghetto est neuf mais reste un ghetto ! Ensuite la mobilité urbaine reste insuffisante. Sortir du quartier, pour travailler, étudier ou tout simplement les loisirs reste une gageure faute de raccordement facilité aux transports en commun.
En conséquence, c’est la mobilité sociale qui a le moins évolué. Les quartiers ont changé de physionomie mais pas les indicateurs de pauvreté, de chômage, de difficultés sociales. Et c’est là qu’une énième réforme de la politique de la ville a tout à démontrer. Si l’on souhaite mettre fin à cette succession décriée des réformes, la prochaine devra moins chercher à travailler sur l’urbain que sur le social. La politique de la ville doit devenir celle de ses habitants.