"Chaque difficulté rencontrée doit être l'occasion d'un nouveau progrès. Plus fort, plus haut, plus vite. L'important dans la vie, ce n'est point le triomphe, mais le combat. L'essentiel n'est pas d'avoir vaincu, mais de s'être bien battu. Voir loin, parler franc, agir ferme." (Pierre de Coubertin)
"Le sport doit être une école authentique et une expérience continuelle de loyauté, de sincérité, de fair-play, de sacrifice, de courage, de ténacité, de solidarité, de désintéressement, de respect." (Jean-Paul II)
Ces deux citations illustrent ce qu'est le sport : une éducation physique, morale et sociale. Il n'est pas anecdotique de rappeler que Pierre de Coubertin demanda et reçut le soutien du pape Pie X afin que l'Eglise catholique contribuât à donner aux Jeux Olympiques l'ampleur qu'ils méritaient, à une époque où la pratique du sport civil (vs. militaire) n'était pas encore entrée dans les habitudes.
En 2012, les Jeux Olympiques de Londres devraient ainsi être l'occasion pour le monde entier de découvrir, en ces temps troublés, les valeurs universelles du sport ... plus ou moins bien appliquées par nos athlètes! Car les sportifs comme tous les hommes ont aussi leurs petites contradictions qui sont l'occasion pour nous de comprendre les racines des crises économique, sociale et internationale qui nous submergent.
Notre crise économique est une crise de tricherie. C'est la crise d'un homme ou d'une équipe prêts à tout pour gagner une médaille. Ce sont bien-sûr ces anglais devenus rois des faux-départs tactiques mais ce sont également ces banques anglaises qui trichent sur le LIBOR. C'est encore HSBC qui fait du blanchiment à grande échelle; c'est Nomura qui est impliquée dans des délits d'initiés; ce sont toutes ces entreprises qui, à leur niveau, cherchent à maximiser le profit en oubliant les impacts humains, moraux et sociaux de leurs actions; c'est aussi moi, vous, nous tous qui boursicotons, contournons les lois, nous ruons sur les places de métro en jouant des coudes. Nous sommes des tricheurs. Les politiques se trompent d'angle d'attaque lorsqu'ils accusent le libéralisme et veulent tout régenter; le problème de la crise n'est certainement pas la liberté mais plutôt l'éducation morale. Comme nous ne sommes plus éduqués, nous adorons le veau d'or. Nos yeux pétillent à la vue de l'argent, de la gloire ou du sexe. Nous voulons notre médaille pour être des petits dieux. Sauf que nous ne pouvons évidemment pas être Dieu et que la spirale infernale s'enclenche sitôt que nous dévions du bon chemin. "Loyauté, sincérité, fair-play, sacrifice, courage, ténacité, solidarité, désintéressement, respect". Jean-Paul II ne parlait pas que de sport; il évoquait toute la vie que nous devrions mener.
Notre crise sociale est une crise de dopage. C'est la crise d'un homme incapable d'accepter ses limites; un homme prêt à se transformer physiquement, à oublier sa nature, pour gagner sa médaille. Certains prennent des stéroïdes pour améliorer leurs performances, d'autres contournent l'anthropologie pour obtenir ce que la nature leur interdit. Il fut un temps où les athlètes soviétiques tombaient enceintes puis se faisaient avorter pour bénéficier des vertus hormonales des débuts de grossesse. Aujourd'hui, c'est le désir d'enfant qui cherche son dopage. Mariage gay, mère porteuse, techniques de fécondation, nous acceptons des piqûres peu éthiques pour obtenir notre victoire. Pourtant le sport nous enseigne que nous devons combattre avec nos propres forces. "L'important dans la vie, ce n'est point le triomphe, mais le combat." Pierre de Coubertin avait compris qu'il y a de la beauté dans le fait d'avoir été au bout de nous-mêmes, de courir avec notre coeur sur la ligne droite sur laquelle nous avons été placée. Certains d'entre nous n'auront pas d'enfant mais cela ne signifie pas que leur course aura été ridicule ou inutile. Ils trouveront bien des moyens de transmettre l'amour qui les porte et ils trouveront une satisfaction immense d'avoir couru la course de leur vie.
Notre crise internationale est une crise de sélection. C'est la crise d'un homme qui ne sait pas tirer le meilleur de ses athlètes, qui ne respecte pas leur dignité d'êtres humains. Dans le sport comme dans le monde, il y a des sélectionneurs qui s'appuient sur des joueurs mal élevés; des dirigeants de fédération qui traitent mal leurs athlètes; des capitaines qui décuplent la haine des autres équipes. Nous pouvons baisser les bras et considérer que les hommes sont naturellement jaloux, haineux, égoïstes, vénaux. Vous lâchez un sportif sur twitter et vous dites adieux à vos années de poésie. Pourtant le leader peut montrer le chemin; il peut éduquer, guider, aider, s'abandonner, créer de la confiance. Je prie pour qu'il y ait la paix dans les stades de Syrie et de tous les pays en guerre. Je prie pour que les opposants révoltés se choisissent des sélectionneurs vertueux qui respectent les minorités et habités par la recherche de la vérité, de la liberté et de la charité.
Je prie, car nous comprenons de tous les événements qui nous arrivent que l'homme ne peut pas gagner tout seul. Il pourra courir, se battre, peut-être même avoir une médaille d'or mais il ne pourra jamais véritablement gagner tout seul. Sa médaille dort si elle pend à un cou qui n'est pas dirigé vers le ciel. Elle n'a aucun sens. Lorsque la crise matérielle, économique et politique s'accompagne d'une crise immatérielle, de foi et de transcendance, le monde est deux fois plus en danger. C'est tout l'enjeu soulevé par la prière des Evêques de France pour la fête de l'Assomption.
Je prie donc pour qu'à côté de chaque médaille, d'or, d'argent, de bronze ou de chocolat, il y ait une plus petite et plus humble médaille de la Vierge et que ce soit celle-ci qui fasse courir les hommes. Que cette médaille nous réveille pour qu'enfin, nous nous relevions. Car si notre médaille dort, c'est la crise deux fois.