Il y a quelques mois deux faits m’ont marquée. Cet article de Marion qui recensait une agression de rue et qui était suivi par beaucoup de commentaires, qui, tous relataient une histoire similaire. Au milieu, des propos d’hommes trollant, ou expliquant ce qu’il faut faire ou se demandant bien comment ils allaient faire pour draguer (sisi l’agression sexuelle leur semble une méthode de drague). Ce qui choque évidemment le plus dans cet article et ses commentaires – j’y reviendrai, cela n’est pas un reproche aux auteurs, c’est la banalité intériorisée de l’agression.
Puis j’ai entendu une émission de Ruquier sur Europe 1 où l’un des chroniqueurs, Pierre Bénichou, expliquait que lutter contre le viol, oui, mais contre les mains au cul fallait pas exagérer, on allait où là. J’avais entendu beaucoup de choses dans le féminisme, que nous menions des combats inutiles, anodins, qu’il y avait mieux à faire mais je n’avais jamais entendu une minimisation des agressions sexuelles.
Lorsqu’est sortie la video belge j’ai donc lancé sur twitter le hashtag #harcelementderue qui permet aux twittos de repérer tous les gens ayant twité en rapport avec ce sujet là.
Pourquoi « de rue » ? Déjà parce que 140 caractères oblige, on définit ainsi les lieux inconnus, ouverts à tous et toutes ; cela comprend la rue donc mais aussi les lieux publics ou les transports communs. Nous empruntons tous et toutes ces lieux et ne pouvons faire sans. Ce sont les endroits où nous rencontrons le plus d’inconnus ; à la différence du travail par exemple où le harcèlement sera pratiqué par des gens qu’on connait ou connus de nos collègues.
Le harcèlement de rue est un harcèlement court dans la durée ; j’en ai ainsi subi un qui me balançait « 5ou 6 salopes, tu suces » puis passait à la femme d’après.
Pourquoi « harcèlement » ? pour témoigner du caractère répétitif des agressions qui ne sont pour le coup pas le fait d’UNE personne (on n’est pas harcelé par une personne) mais de beaucoup. Evidemment, le harcèlement recouvre des choses très différentes et bien souvent on est proche de l’agression.
J’ai constaté que deux éléments prédominent dans les agressions subies par les femmes.
Dans le cas du viol c’est simple c’est l’omerta, le silence le plus total. On ne dit pas qu’on a été violée. Jamais. J’avais d’ailleurs assisté à un beau paradoxe lorsqu’on m’avait dit « Diallo n’a pas pu être violée car si elle l’avait été elle ne l’aurait pas dit ». Si l’on ne dit pas qu’on a été violée, me direz vous c’est par honte ? Mais par honte de quoi. J’ai tendance à penser qu’on a ancré chez beaucoup de femmes qu’il y avait quelque chose avec la sexualité, qu’il fallait rester propre, à tout prix et que même si le viol n’est pas de la sexualité ma foi… on est salie non ? C’est le seul crime me semble t il où la honte est portée par la victime.
Le harcèlement de rue. Celui là c’est plus simple. Soit on n’en parle pas, soit on en parle comme on parle de la meteo ; un truc avec lequel il faudra de toutes façons faire. Et puis il faut bien le dire quand tu dis que tu t’es pris une main au cul dans le métro, personne ne va te plaindre. Au mieux on considérera qu’il faut faire avec au pire que tu fais peu d’histoires pour pas grand chose.
C’est comme si d’un coup le corps des femmes ne leur appartenait plus dans l’espace public et pouvait être touché, commenté, analysé, soupesé à loisir. Et qu’on devait trouver ca flatteur. En rue, nous ne serions plus que des êtres sexués et sexuelles, qu’il faudrait traiter comme tels.
Une solution ?
Elle est simple. Personnellement je ne crois qu’en l’éducation et au fait de ramasser systématiquement les gens qui tiennent des propos sexistes. Mais puisque cela fait 15 ans que nous demandons des cours d’éducation antisexiste dés la maternelle et ce sans succès, je propose de mieux faire respecter la loi et de faire notre devoir de citoyenne. A chaque agression, insulte, allez porter plainte au commissariat. Jeu d’abrutis ? Sans doute. Mais comment se faire entendre sans les noyer sousun flot continu de plaintes ?