Magazine Culture

Rémi Brague : “nous ne sommes peut-être qu’au tout début du christianisme”

Publié le 22 août 2012 par Tchekfou @Vivien_hoch

Notre-Dame de Paris, par Vivien Hoch

C’est dans son livre Europe. La voie romaine – traduit en quinze langues – de 1992, que Rémi Brague introduit la distinction que l’on connaît entre chrétiens et “christianistes”, à savoir entre ceux qui croient au Christ, et ceux qui défendent la civilisation chrétienne – ce qui peut aller ensemble. Mais Rémi Brague distingue toutefois les deux, et appelle les chrétiens à se recentrer sur leur salut en Jésus-Christ, laissant choir un peu “les choses de ce monde”.

Le  ”Christ n’est pas venu pour bâtir une civilisation, mais pour sauver les hommes de toutes les civilisations“, traversant les diverses sociétés, en cherchant à y pêcher des âmes à sauver. Aussi, “ce qu’on appelle “civilisation chrétienne” n’est rien d’autre que l’ensemble des effets collatéraux que la foi au Christ a exercés sur les civilisations qui se trouvaient sur son chemin”. Il faut donc se méfier, à propos de l’instrumentalisation de la foi en Dieu par certaines visées politiques, à propos notamment de l’Action française : ” au fond, c’était une idolâtrie dans ce qu’elle a de pire : mettre Dieu au service du culte de soi-même”. 

LChrist n’est pas venu pour bâtir une civilisation, mais pour sauver les hommes de toutes les civilisations

De l’autre côté, c’est cette inculturation propre au christianisme qui lui permet d’être si vivace. Il a une “culture d’insertion” – par opposition aux “cultures de digestion” (l’Islam par exemple…), qui lui permet de traverser les siècles et les civilisations, et de ne, peut-être, jamais disparaitre.

Mais faut-il opposer aussi abruptement les défenseurs d’un ordre chrétien avec les chrétiens de foi ? Évidemment, “ce qu’il y a de chrétien chez les chrétiens, c’est le Christ” (Saint Augustin), et on ne saurait réduire le Christ à des pratiques politiques. Mais il ne faut pas atténuer la portée incarnée de l’Eglise de Dieu, y compris dans son pendant temporel et mondain, socle nécessaire pour présenter les propositions de foi. Nous ne pouvons être un chrétien vivant de grâce et de théologalité sans vouloir le salut de l’ensemble de ses contemporains, car nous sommes pas des êtres sotériologiquement solitaires. La Bible décrit ces profondes et constantes interractions entre ce que font les hommes et ce que veut Dieu (ce dernier ne voulant certes pas forcément “ce que l’on veut”, comme le dit Rémi Brague, mais tout le jeu consiste à les faire coïncider).

 ”ce qu’il y a de chrétien chez les chrétiens, c’est le Christ

Qu’en bref, la christianité (défense de la civilisation chrétienne) s’insère fondamentalement et essentiellement dans la vie de foi, même s’il ne s’agit pas de défendre statiquement l’histoire, mais plutôt de perpétuer ce geste proprement chrétien qui est celui d’aller puiser avec grâce et beauté à la source de toute vie et de toute en-vie d’aller de l’avant…

Concédant toutefois, à la fin de son entretien, que “ceux qui défendent la valeur du christianisme et son rôle positif dans l’histoire me sont bien sûr plus sympathiques que ceux qui le nient. Je ne veux pas les décourager. Je souhaiterais même qu’ils soient plus nombreux en France. Mais ce n’est pas parce qu’ils sont des “alliés objectifs”. C’est tout simplement parce que ce qu’ils disent est vrai.“… En finissant même par reconnaitre les erreurs de cette civilisation “post-moderne” : “Il est vrai que nous sommes malades. On peut appeler les symptômes les plus alarmants “relativisme” et “nihilisme.”Merci de reconnaitre, M. Brague, que le déficit civilisationnel du christianisme est aujourd’hui patent, et dramatique.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Tchekfou 38994 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte