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Les chinois coupent les nouilles en quatre

Publié le 23 août 2012 par Kamizole

Les chinois coupent les nouilles en quatre : « la fin du travail » et… des humains ?

Jeremy Rifkin avait raison : la recherche permanente de la produc-tivité et la robotisation sonnent « la fin de travail ». La preuve est donnée par un article du blog Big Browser ULTRAMAN – Les robots coupeurs de nouilles envahissent la Chine (Le Monde 22 août 2012). Si même en Chine l’on remplace les emplois les plus rebutants par des robots l’on ne donne pas cher de nombres d’autres jobs. Je suppose qu’il s’agit - pour l’instant - de cela puisque l’article débute ainsi « Confronté au désintérêt croissant des étudiants chinois pour le coupage de nouilles, une activité répétitive et épuisante, un restaurateur chinois a eu l'idée de recourir à une armée de robots coupeurs de nouilles dans son établissement ».

Avant d’ouvrir l’article je pensais qu’il s’agissait de robots ména-gers adoptés par les Chinoises. On n’en est bien loin et ce simple petit article qui tient en à peine 12 lignes sur mon fichier m’inspire une foule de considérations. Surtout sachant que le premier robot coupeur de nouilles a été créé il y a un an et qu’ils déferlent par milliers voire sans doute par dizaines de milliers sur la Chine. Je doute que la France et d’autres pays occidentaux soient pour l’instant concernés, les restaurateur chinois achetant vraisemblablement leurs nouilles chez des importateurs mais s’il est possible de mettre au point un robot pour une activité simple il me semble que rien n’empêche de trouver de multiples applications dans d’autres domaines et même selon une formule chère au management « d’enrichir les tâches ».

Si j’avais quelque argent - ils coûtent quand même 1.500 $ - j’atten-drais de pied ferme un robot capable de tout faire dans la maison… Ouf ! La feignasse se réjouirait de pouvoir mettre en pratique « Le droit à la paresse » de Paul Lafargue (1880). Marx - qui visait « le développement des forces productives » et à ma connaissance (je n’ai pas lu « Le Capital » mais quelques autres ouvrages de qualité sur le sujet suffirent pour mes études d’économie) ne se soucia pas du « temps libre » - ne dut apprécier que fort modérément les idées de son gendre.

Je ne l’avais pas encore lu dans ma lointaine jeunesse mais j’avais la parfaite illusion que les progrès technologiques permettraient non seulement de supprimer les tâches les plus répétitives et/ou pénibles mais également de produire en beaucoup moins de temps tout ce qui était « socialement nécessaire » et utile à la société et l’économie en général, consommateurs compris faisant ainsi inéluctablement baisser considérablement les temps de travail et permettant aux humains de se consacrer à d’autres activités : culture et loisirs en général.

Je compris assez vite qu’il n’en serait rien et je lus trop tardi-vement - vers 35 ans - quelques ouvrages de Jean Fourastié dont « Le grand espoir du XXe siècle » pour partager son optimisme en matière de progrès technologiques : semaine de 30 heures et environ 35 ans pour la durée de la vie active. Cela me parut déjà totalement invraisemblable : la crise de 1975 était passée par là avec sa cohorte de chômeurs et d’entreprises liquidées au non de la rentabilité et le terme de « compétitivité » de formation assez récente (1960) nous fut infligé ad nauseam. Il s’agissait en effet de faire baisser les coûts de production au maximum pour affronter la concurrence des nouveaux producteurs. Le Japon pour l’innovation technologique et les « Dragons » asiatiques - ou la Tunisie et la Turquie - pour la faiblesse des salaires, concurrence que l’on qualifia à l’époque de « contrainte extérieure ». Vaine course-poursuite technologique qui atteindra son apogée avec les délocalisations : il s’agit encore et toujours de produire plus. A moindre coût.

Se soucie-t-on vraiment de savoir si c’est socialement et humai-nement utile ? A l’évidence la réponse est non. D’autant que ce productivisme conduit à fabriquer des produits dont la durée de vie est calculée pour être la plus courte possible (ils sont programmés pour cela) et que la publicité incite à acquérir les produits hi-tech dernier cri toujours plus performants sous peine de passer pour le dernier des ringards. Inepte gabegie puisque ceux que l’on remplace sont destinés à être jetés.

Pour en revenir aux nouilles chinoises j’ai visionné la vidéo accessible sur l’article. Il est fort dommage qu’elle ne fût pas sous-titrée (sauf pour les commentaires en chinois mais je suis d’une nullité parfaite en anglais). Toutefois, les seules images ont suffit à m’instruire en même temps qu’à me faire froid dans le dos.

J’ai donc découvert la technique du coupage de nouilles à la mode chinoise. Elle doit être exactement semblable qu’il fût opéré par un humain ou un robot. Imaginez donc le coupeur de nouilles assis devant un énorme bloc de pâte rectangulaire muni d’un très fin et long couteau incurvé à la manière d’un sabre qu’il passe aussi inlassa-blement que régulièrement sur la surface du bloc de pâte, les fines lamelles ainsi découpées en nouilles tombant devant lui.

Un robot humanoïde - il s’arrête au tronc - posé sur la paillasse d’un restaurant. Le cuisinier se sert au fur et à mesure en fonction se ses besoins. Des centaines voire des milliers alignés sur le sol - l’on dirait qu’ils sont agenouillés - dans une entreprise, quelques employés surveillant la fabrication comme autant de contremaîtres dans n’importe quelle usine.

Quelque chose me fit froid dans le dos : leurs yeux. Tout ronds. Quand ils sont en fonction, ils s’éclairent d’étranges lueurs, passant du vert pâle au jaune et à l’orange. Impression de malignité comme s’il disaient : « toi, je t’aurai ». Et si c’était vrai ?

Je ne suis pas adepte du tout de la science fiction. Mais j’ai le parfait souvenir d’une dramatique entendue fin 1973 sur France Culture dans la soirée. Si je peux situer la date c’est qu’à l’époque j’étais hospitalisée en ophtalmo à l’hôpital d’Orléans pour une grave kératite et que ne pouvant lire je n’avais que la radio pour meubler mes insomnies. Or, dans cette histoire un robot totalement huma-noïde se vengeait de son propriétaire en prenant sa place.

La révolte des robots ? Vous allez sans doute dire que j’affabule et que mémé Kamizole mériterait qu’on lui passât la… camisole.

Mais imaginez que dans un temps relativement proche - les progrès technologiques s’accélèrent à la vitesse grand V - notre univers se peuplât d’une armada de robots humanoïdes de plus en plus sophis-tiqués.

Vous ne voyez toujours pas où est le problème ?

 Je ne vais pas m’étendre mais il tiendrait à la confluence entre deux discipline scientifiques : d’une part les recherches sur « l’intelligence artificielle » - à terme les machines informatiques lato sensu devant être capables de s’autoprogrammer et de se réparer sans intervention humaine ; d’autre part les recherches en neuro-science visant à découvrir pour autant que faire se peut les méca-nismes ou le centre de l’intelligence humaine, lesquelles utilisent toutes les ressources scientifiques et technologiques disponibles : biologie, chimie et l’imagerie médicale la plus sophistiquée.

Je ne saurais dire s’ils aboutiront à l’un des buts poursuivis depuis le Moyen-âge et la Renaissance par les métaphysiciens : la recher-che des ressorts de l’âme humaine (le but ultime étant de découvrir et démontrer l’existence de Dieu par des preuves irréfragables). Mais il ne fait point de doute que leurs résultats contribueront à enrichir l’intelligence artificielle.

Bon, et après ? Comme je ne manque nullement d’imagination je vous entraînerais donc dans un (petit) scénario de science-fiction. « La planète des robots » à l’instar de celle des singes de Pierre Boulle. En l’an de grâce 2.000 et de petites ou grosses poussières des armadas de robots humanoïdes remplacent les humains pour nombre de tâches industrielles et domestiques. Pour le conten-tement général des humains comme des patrons. Surtout ces derniers : une fois faite l’acquisition des robots - dans leurs bilans ils équivalent n’importe quel investissement en machines - alors qu’ils sont grands gagnants : ils n’ont plus à payer de salaires et de charges sinon pour les quelques personnes affectées à la surveillance du travail des robots.

Or, nous ne saurons jamais à qui doit être imputée « La révolte des robots »… Il y eut sur ce sujet autant de thèses contradictoires que d’auteurs. Certains supposèrent qu’il s’agissait d’un simple bug informatique qui se serait rapidement propagé via Internet. D’autres accusèrent les robots eux-mêmes - que l’on avait eu le malheur d’interconnecter - qui modifièrent d’eux-mêmes leurs programmes. « Lutte des classes » d’un nouveau genre : devenus aussi intelli-gents que les humains - sinon plus - qui les commandaient, ils refusaient d’être exploités.

L’on accusa aussi quelque savant fou - malgré d’actives recherches il ne fut pas possible de l’identifier - d’avoir introduit (sans doute par mégarde) un programme rendant possible cette révolte. Allant nette-ment plus loin, un adepte de la « théorie du complot », digne émule de Thierry Meyssan - je me suis d’ailleurs toujours demandé si ce n’était pas lui - soutint qu’il s’agissait non pas d’une simple erreur mais d’un complot fomenté sur fond de terrorisme. Sans pour autant apporter la moindre preuve tangible à l’appui de sa thèse.

Toujours est-il que j’écris ces lignes bien à l’abri dans un lieu qui doit être tenu secret : les robots ont pris le pouvoir et traquent impitoya-blement les humains qui ont encore quelque idée - surtout de révolte - entre les deux oreilles.

Les chinois coupent les nouilles en quatre : « la fin du travail » et… des humains ?


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