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Umar TIMOL : " L'HOMME QUI NE POUVAIT S'EMPÊCHER DE RIRE " (suite).

Par Ananda

 

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Je viens de me réveiller. J’ai fait à nouveau un rêve étrange, mi-affreux mi-comique. Je me trouvais dans un hypermarché et j’étais entouré de personnes qui toutes se ressemblaient ; toutes, elles portaient en effet de grands costumes bleus et des cravates roses sur lesquelles était inscrite la phrase suivante : nous sommes des clones. Le plus curieux c’est que sur leurs fronts étaient également gravés leurs métiers respectifs. Ainsi  pouvait-on lire je suis un banquier, je suis un comptable, je suis un ingénieur ou je suis un con. Ils avaient l’air de zombies car ils n’arrêtaient pas de se donner des tapes sur les épaules en répétant à qui mieux mieux   nous sommes les meilleurs. Puis ils ont commencé à chanter. Ils chantaient évidemment faux mais j’ai cru comprendre que cette chanson servait à raffermir les liens entre eux. Ensuite, ils entamèrent une danse pour le moins originale, un mélange de polka et de lambada, qui m’a donné, pendant un instant le tournis. Puis ce fut l’heure de la prière, un des clones réclama le silence et se mit à murmurer des mots sacrés. Ainsi, il déclarait nous sommes les créatures de la réussite et de l’argent, notre destin est de servir nos Créateurs, jamais nous ne cesserons de cultiver lavanité, jamais nous ce cesserons d’avoir l’air de cons, jamais nous ne cesserons de porter des vêtements ridicules, jamais nous ne cesserons d’acheter des bagnoles, les unes plus obscènes que les autres, jamais nous ne cesserons d’être des incultes et d’en être fiers, jamais nous ne cesserons de nous battre pour nos convictions, pour notre foi, jamais nous ne cesserons d’être les créatures de la réussite et de l’argent. Je vous assure, c’était franchement beau car les paroles étaient énoncées avec une grande conviction et on y décelait même un semblant de spiritualité. Mais j’en étais arrivé au stade où je voulais sortir du rêve sans cependant y parvenir. Je craignais aussi par-dessus tout qu’il ne se transforme en cauchemar car je sentais un grand rire pointer à l’horizon. En effet, ce rêve , parfaitement affreux dans un premier temps, (après tout il n’est guère agréable de se retrouver parmi des clones-zombies costumés) se transformait à présent en quelque chose de franchement grotesque. Normal tout compte fait: n’est-ce pas vrai qu’on rencontre ce type de cons un peu partout ?. Mais il faut croire que je n’étais pas encore au bout de mes peines puisque, tout à coup, mes clones se mirent à baragouiner des phrases dans une étrange langue, un mélange de français et d’anglais qui ne pouvait me tromper longtemps : oui, c’était cela, je compris assez rapidement que ces malheureux souffraient du syndrome classique du mauricien-qui-balance-en-public-des-mots-en-anglais-et-en-francais-pour-que-tout-le-monde-comprenne-qu’il-maitrise-ces-deux-langues, un syndrome gravissime dont les origines sont multiples et complexes et que personne n’est hélas jusqu’à maintenant parvenu à guérir. Mais pourquoi donc ces cons s’étaient-ils ainsi agglutinés dans mon rêve ? Et puis quel est donc le symbolisme de ce rêve, pour commencer ? Que signifie-t-il ? J’ai trouvé le moyen de me poser ces questions dans le même temps  que je rêvais, ce qui, tout de même, semble révéler que je possède un certain talent. Reste que le rire s’approchait à vive allure, il allait bientôt m'assaillir, me bouffer et je ne pouvais me permettre le luxe d’un nouveau délire. La situation était donc grave. Les clones-zombies se mirent tout à coup à courir dans le supermarché afin de se livrer à un exercice assez particulier qui consiste à se donner des airs en maniant son portable dernier cri. C’était un véritable spectacle de folie et j’allais exploser ! Mais, par bonheur, je fus sauvé par le gong : quelqu’un frappait à la porte.

Umar Timol

(à suivre)


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