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L’ONU tarde à agir au Nord-Mali

Publié le 27 septembre 2012 par Seifenblase @Pointe_d_Actu

Interviendra ou n’interviendra pas ? Le dilemme est de taille. Confronté à une grave crise, le Mali a officiellement demandé de l’aide à l’ONU la semaine dernière. Mais la résolution de l’Organisation tarde à arriver et à la France refuse d’intervenir directement militairement.

La situation est de plus en plus tendue au Mali dont le Nord est sous la coupe des terroristes depuis avril dernier.  Depuis la révolution libyenne, beaucoup de touaregs maliens, anciens mercenaires pour Mouammar Kadhafi, sont revenus avec des armes lourdes. Ils ont alors rejoint le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), principal groupe touareg pour l’indépendance du Nord du pays. Composé de 2 000 à 3 000 hommes, le MLNA a dès lors eu les capacités d’affronter militairement l’armée régulière et s’est donc lancé, depuis le début 2012, à l’assaut des villes du Nord-Mali, qui sont tombées une à une. Suite à cette situation, le gouvernement du président démocratiquement élu en 2002 puis en 2007 Amadou Toumani Touré subit un putsch militaire le jeudi 22 mars et le Comité national pour le redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat (le nom que se donne la junte), dirigé par le capitaine Amadou Sanogo, prend le pouvoir. Mais, dépassé par les évènements, le gouvernement a décidé de faire appel à l’ONU pour régler la situation qui devient ingérable, les islamistes gagnant de plus en plus de terrain. Un responsable des forces de sécurité maliennes avouait au Nouvel Observateur que  « la superficie de notre Sahara est trois fois celle de la France. Nous sommes peut-être le pays le plus pauvre du monde. Comment voulez-vous que nous contrôlions le désert ? »

Guerre de l’ombre

L’ONU tarde à agir au Nord-Mali

Infographie du Figaro.

Mais si la communauté internationale a admis mercredi la gravité et l’urgence de la situation au Mali, la constitution d’une force internationale réclamée par Bamako semble encore lointaine. Bamako et la Cédéao (Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest) se sont mis d’accord la semaine dernière sur les grandes lignes d’une intervention, dont les troupes seraient ouest-africaines mais bénéficieraient d’un soutien logistique d’autres pays. Plusieurs responsables africains soutiennent cette demande et, en Occident, la France appuie aussi pour une action mais se montre prudent. Aujourd’hui, le ministère de la Défense a réfuté toute « planification militaire » d’une intervention dans le nord du Mali et a réaffirmé que Paris attendait une résolution de l’ONU et les décisions de la Cédéao sur cette opération.

Le principal frein à cette intervention tient pourtant dans le scepticisme affiché par les autres pays de la communauté internationale, à commencer par les Etats-Unis. La secrétaire d’Etat Hillary Clinton préférerait le retour à un Etat de droit au Mali avant une éventuelle intervention militaire ; François Hollande réplique qu’il est difficile de tenir des élections présidentielles dans un tel contexte. Outre le ministre belge des affaires étrangères qui insiste pour que les objectifs de cette éventuelle intervention soient clairement définis, le secrétaire général des Nations unies lui-même se montre prudent face aux requêtes pressantes de Paris et Bamako. Parmi les doutes évoqués, le fait que si la Cédéao est une force sur le papier, elle n’a pas assez de troupes à fournir, ni même la volonté de participer, pour certains pays comme la Mauritanie. Et de préciser que la restructuration de l’armée malienne, préalable à toute intervention,  prendra au moins 18 mois. Pourtant, si la situation est jugée aujourd’hui incontrôlable, la reconquête du nord a en fait commencé depuis plus de deux ans, explique le Nouvel Observateur. Un millier d’hommes parmi les forces spéciales françaises, mauritaniennes, algériennes et américaines sont déjà à l’œuvre au Sahara. La CIA a d’ailleurs installé son QG en Algérie quand les forces spéciales se sont établies au Mali et au Burkina Faso. La décision de l’ONU d’apporter son soutien à la Cédéao légaliserait donc une guerre de l’ombre.

La France reste prudente

Quel rôle la France pourrait-elle donc jouer dans la résolution de ce confit ? Comme à chaque crise dans l’une de ses anciennes colonies africaines, elle doit être prudente. Impossible d’intervenir sans être taxée de néo-colonialisme, impossible de ne rien dire ou faire non plus sans être taxée d’indifférence. Preuve que la France, qui avait demandé une intervention rapide, ne possède pas toutes les clefs. François Hollande tient d’ailleurs à rappeler que le soutien de la France se limitera « au plan logistique »  en récusant officiellement l’idée d’une action militaire directe. « Ce sont les Africains qui ont la clé de la situation si nous savons les appuyer».

L’ONU tarde à agir au Nord-Mali

A l’ONU, François Hollande a plaidé pour une action rapide au Mali, soutenu par le Niger.

L’autre raison de ce retrait français tient dans la sécurité des six otages français, détenus par Al Quaïda au Maghreb Islamique (Aqmi) même si le président estime ne pas pouvoir « conditionner notre position sur le Nord-Mali par rapport à la question des otages ».  Leur libération reste un objectif prioritaire mais ne saurait déterminer une stratégie globale pour le Sahel. D’autant que les otages vivants sont plus utiles pour Aqmi qui s’en sert comme d’une importante monnaie d’échange.

Ce volontarisme affiché par Paris ne passe pas inaperçu au sein de la nébuleuse djihadiste et sur Internet, les réseaux salafistes ont déjà commencé à cibler la France. Recherché par la police de son pays dans le cadre de l’enquête sur l’attaque, à Tunis, le 14 septembre, de l’ambassade américaine, le Tunisien Abou Ayad, chef du groupe Ansar Al-Charia a écrit « France, pays en ruine, nous t’annonçons ce qui te déplaira par la volonté de Dieu ». D’autres sites, irakiens notamment, se sont engouffrés dans la brèche et beaucoup de messages en arabes filtrent via Twitter.


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