L’islam a encore fait
l’actualité ces derniers jours et on ne peut pas dire que son image en soit
sortie grandie dans l’opinion française. L’islam fait peur comme le titre,
peut-être un peu excessivement, l’Express.
Même si la notion d’Islamophobie reste à préciser et ce sentiment à
quantifier, ce qu’on peut lire à travers les commentaires et les blogs laisse à
penser que l’islam est de moins en moins bien perçue par de plus en plus de
français.
Paradoxalement, ce sont des « agressions » contre l’Islam qui sont
à l'origine de ce regain d’islamophobie en France.
La méfiance à l’égard de cette religion semble grandir en France et certains
(certaines) comme
Marine Le Pen ou
Jean-François Coppé surfent allègrement sur cette vague.
La montée en puissance de l’islamophobie comme beaucoup de ce qui, au niveau
d’une nation, se termine par phobie ou commence par anti en désignant une
partie de la population, n’est certainement pas une bonne chose. L'islamophobie
est un signe parmi d'autres de la difficulté que nous avons à vivre au sein
d'une même nation en bonne harmonie avec l'autre, le différent, celui qui n'a
pas la même religion, les mêmes pratiques alimentaires ou les mêmes tendances
sexuelles.
Pour autant, expliquer cette méfiance par une mentalité xénophobe ou raciste
est à la fois extrêmement réducteur et injurieux à l’égard de beaucoup de
français. Le jugement est faux et lapidaire, il évite souvent de s’interroger
sereinement sur les causes du ressentiment et en conséquence sur les remèdes à
y apporter.
Parlons des causes :
Il faut bien avouer que l’Islam donne un certain nombre de raisons sinon de
la rejeter au moins d’être circonspects vis-à-vis des messages qu’elle véhicule
et du comportement de certains de ses pratiquants.
Les agissements criminels que ses extrémistes commettent au nom de l’Islam
sont largement diffusés et contribuent à donner une image déplorable de cette
religion.
Dans un environnement mondialisé ou dans les 30 secondes qui suivent, le
monde entier est informé d’un
attentat sanglant à Karachi ou qu’un tribunal Iranien a condamné une pauvre
femme au fouet puis à mort par lapidation pour cause d’adultère présumé, tout
cela en se référant à l’Islam, comment éviter que cette religion ne soit jugée
par beaucoup à l’aulne de ces évènements.
D’autant plus que les plus modérés ont beau répéter que tout cela ce n’est
le fait que d’une petite minorité de fanatiques et que l’Islam n’est pas
intrinsèquement une religion qui prête à la violence, la répétition quasi
quotidienne des méfaits commis en son nom et leur brutalité sinon leur
barbarie, semblent contredire cette affirmation.
Sans évidemment amalgamer les islamistes avec la très grande majorité des
musulmans vivant en France, il est difficile pour un démocrate républicain
d’avoir une perception positive d’une religion au nom de laquelle on condamne
les auteurs de soi-disant
blasphème à une mort atroce, on persécute ceux qui
n’adorent pas le bon prophète, on convertit de force, on
assassine, on incite à l’assassinat, on lapide et on exécute.
Au delà de ces faits extrèmes, certains comportements plus généralisés et
qui apparaissent à tort ou à raison comme très liés à l’Islam, semblent être en
contradiction avec nos propres valeurs. Citons en vrac, la soumission imposée
aux femmes, l’homophobie violente ou encore les limites à la liberté
d’expression dès qu’il s’agit de religion.
Plus inquiétant encore, pour certains musulmans la loi de l’Islam prévaut
sur les lois civiles, à tel point que certains ont imposé ou
veulent imposer la charia dans la constitution de leur pays (exemple
Tunisie).
Dans ces conditions, il n’est pas facile de considérer positivement cette
vision de l’Islam …de l’étranger. Mais il faut néanmoins considérer tout cela
avec un peu de recul. Les agissements et comportements les plus visibles sont
souvent, même dans les pays musulmans le fait d’une minorité, d’une très petite
minorité lorsqu’on parle de terrorisme. De plus, les motivations sont souvent
autant d’ordre politique ou culturel que religieux. Dit autrement, beaucoup
d’agissements que nous réprouvons se produiraient dans le cadre d’une autre
religion que l’Islam.
De toute façon, l’Islam de France n’a pas grand-chose à voir avec tout ce
qui a été présenté ci-dessus. Pourtant, son image auprès des français se
détériore.
Elle pâtit, tout d’abord, d’être associé dans l’esprit de beaucoup à une
immigration plus ou moins bien acceptée et dans certains cas pas toujours bien
intégrée. Le lien, largement entretenu par le Front National entre immigration
et Islam fait que cette religion apparait comme un mauvais corolaire d’une
intégration ratée. Le jeune qui brule une voiture, caillasse les pompiers et
s’adonne au trafic de drogue est nécessairement un musulman.
Pire encore, le discours de l’extrême droite consistant à présenter
l’immigration comme invasive, laisse à penser que d’ici peu de temps la
religion musulmane sera majoritaire. Le mauvais débat sur la viande hallal
lancé il y a quelques mois par Marine Le Pen en est une illustration parfaite.
Vous voyez, ils sont tellement nombreux qu’ils commencent à nous imposer leurs
rites d’abatage. Sous entendu, cela commence comme ça et ensuite ce sera voile
obligatoire sur toutes les têtes féminines.
Il pâtit également d’une incompréhension de l’importance qu’à la religion
pour beaucoup de musulmans, dans notre pays qui ne pratique plus guère ses
propres cultes.
L’affaire des caricatures a mis en valeur les réactions des uns et des
autres par rapport au fait religieux. Chrétiens (à plus forte raison athées) et
musulmans ne réagissent pas de la même manière lorsqu'on raille leur religion.
Ce que les uns considèrent avec plus ou moins d’indifférence, les autres le
ressentent comme une agression insupportable.
On peut avoir du mal à comprendre cette sensibilité exacerbée, comme on peut
souhaiter que les musulmans soient capables de prendre un peu plus de recul par
rapport à la religion, mais c’est un fait qu’il est nécessaire d’intégrer si on
souhaite une société apaisée et œcuménique.
En tout cas, il ne sert à rien de rejeter une partie importante de la
population française sous prétexte qu’elle pratique une religion qui ne nous
convient pas, c’est le meilleur moyen pour favoriser la montée des
extrémismes.
Plus généralement, il faut avoir confiance en nos valeurs républicaines et
dans nos capacités de les promouvoir. L’Islam tel qu’il est pratiqué par la
très grosse majorité de nos compatriotes est tout à fait soluble dans la
démocratie. Aucune incompatibilité entre la pratique juste et modérée de cette
religion et les lois de la république et notamment la loi de 1905 qui a
instauré la séparation des églises et de l'État. N’oublions pas d’ailleurs que
cette même loi dès son premier article rappelle que « la République assure
la liberté de conscience ».
Il faut savoir être ferme sur nos valeurs et sur les grands principes qui
régissent notre société laïque, tout en respectant les croyances de tous.
Surtout, il faut croire en l’effet d’entrainement de notre modèle de société
pour amener progressivement tous les français, d’où qu’ils viennent, à adhérer
à nos valeurs, jusqu’au moment ou on ne pourra plus dire que l’Islam est un
problème.