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Canard, Charlie, médias et islams

Publié le 27 septembre 2012 par Egea

Personne n’a été surpris de voir qu'egea ne réagissait pas au tumulte médiatique lancé à la suite des "affaires" de Benghazi puis de Charlie. Maintenant que le tumulte est passé, il est possible de commenter ces affaires avec un peu de lucidité.

Canard, Charlie, médias et islams
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1/ Tout d'abord pour constater que ces affaires ont été largement "provoquées" par les médias : à force de courir après la nouvelle et d'avoir peur d'être en retard, ils sont en avance et en viennent à "créer" l'événement. Ce sont les mêmes qui dénoncent ensuite les prophéties auto-réalisatrices des banquiers, sans voir que leur rôle est essentiel dans la construction de ces bulles événementielles. Autrement dit, les médias font de la spéculation informationnelle.

2/ Benghazi : OK, une attaque et un ambassadeur au tapis. Aussitôt, éditos enflammés sur la théorique "rue arabe", cette masse nommée et irréelle, construction fantasmée d'observateurs qui n'observent pas, justement. Et justement, il n'y a pas eu de manifestation dans le monde arabo-musulman, sauf opérations d'agit-prop du Hezbollah. Autrement dit encore, pas de réaction de masse. Et on a à peine rendu compte des origines de l'affaire (une manip de groupes salafistes) et quasiment pas de la contre manif des Benghazistes contre lesdits salafistes. Mais ça n'était pas conforme au fantasme. Par contre, les 200 ahuris qui ont été se faire voir devant l’ambassade des Etats6-Unis ont été copieusement couverts médiatiquement : on voudrait inciter au drame, on ne s'y prendrait pas autrement.

3/ Charlie hebdo : ils n'avaient pas publié que TF1 et France 2 avaient déjà envoyé des norias de journalistes faire le siège du journal pour savoir s'il n'y allait pas y avoir de débordements. Et la mayonnaise médiatique a pris, mais seulement dans le monde clos des médias: aucune, mais absolument aucune réaction face à ces caricatures, et un mauvais et lourd débat sur la liberté d'expression, avec les éternelles déclarations lourdingues des politiques prenant des positions héroïques (et sans danger) devant l'absence d'adversité.

4/ Ce qui nous a valu un délicieux édito du Canard enchaîné, plein de subtilité (si, au sens propre, ce billet était subtil et nuancé) expliquant que la liberté d'expression n'empêche pas d'être adroit. Et qu'elle ne nécessitait pas d'insulter tous les croyants alors qu'on veut s'attaquer aux extrémistes. Mais au fond, ce n'est pas Charlie le plus coupable, mais bien la soupe médiatique qui a voulu créer l'événement, et a versé à haute dose de l'huile sur un feu qui n'existait pas.

4/ Là est probablement le plus étonnant dans cette affaire : l’absence de réaction des dites populations, ici ou ailleurs. Car on voit bien le mécanisme : il consiste à vouloir faire coïncider une réalité (différente) avec le fantasme, celui de masses homogènes, barbares et fanatisées et musulmanes, avec en plus la double dimension menace externe/menace interne : hors, ce fantasme ne correspond pas à la réalité. Parce que les musulmans de l'intérieur sont dans leur immense majorité laïcisés; et que les islams de l'extérieur sont tellement fragmentés que notre diversité culturelle est pet de nonne par rapport aux divisions internes aux islams, n'en déplaisent au schématistes.

5/ Pas besoin d'être spécialiste (et je ne suis pas spécialiste de ces choses là) pour apercevoir que l'islam africain diffère de celui d'Indonésie, du Maghreb et des Machrek ou de ceux des Asie centrales. Qu’il faut ajouter la ligne de partage chiite sunnite (sans même évoquer leurs multiples ramifications), entre Al Ansar et gardiens des lieux saints, entre Hamas et Hezbollah, entre frères musulmans et salafistes, etc.... Conclusion bien simple, dans cet orient compliqué : "LE" musulman, n'existe pas, malgré les prétentions à l'unité des croyants, mais il y a de bien nombreuses variétés de musulmans : il y a DES musulmans, ce qui est très différent.

6/ Alors : inconscience? bêtise? machiavélisme? calcul ? course au fric ? Un peu de tout ça. Et tentative de recycler sur un bouc émissaire qui n'en peut mais des difficultés qui viennent d'ailleurs, et notamment de la crise économique et ses conséquences sociales. Avec des manifs qui se développent dans tous les pays du club Méd, l'avez vous remarqué ?

7/ Bref, ces médias si prompts à faire la morale et à accuser la finance pour son irresponsabilité me font penser à cette histoire de paille et de poutre. Heureusement, vous avez des blogs ...

O. Kempf


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