Bellflower

Par Kinopitheque12

Evan Glodell, 2012 (États-Unis)

La rencontre d’un gars cool, souvent imbibé et plutôt paumé, et d’une fille un peu allumée est à l’origine d’une éruption de violence à propos de laquelle Evan Glodell nous avertit par une série de plans très brefs dès l’ouverture. Pourtant, contrairement à Drive (Refn, 2011) ou True romance (Scott, 1993), desquels on peut le rapprocher, leur amour n’est pas mis à mal par un tiers (mafieux ou maîtres chanteurs), ici c’est la fille qui refuse de s’engager et qui, passé un certain temps, préfère aller voir ailleurs. Woodrow (Glodell) avait été prévenu, Milly (Jessie Wiseman) a pour habitude de blesser ses ex. Il lui rendra la pareille et plus encore.

Woodrow et Aiden, son acolyte bricoleur (Tyler Dawson), ont vu cent fois Mad Max (Georges Miller, 1979). Leur lubie est de se préparer à l’apocalypse en se dotant d’un véhicule monstrueux baptisé « Medusa » et capable d’impressionner le jour où ils auront à traverser le désert. Ils se fabriquent également un lance-flammes, à tant qu’à faire. Au bout du parcours, les flammes ne brûleront que les affaires de Milly sur la pelouse de sa propriété. L’apocalypse ne sera déclenchée que dans un quartier résidentiel, sur Bellflower avenue en Californie.

Plusieurs incohérences perturbent le récit (flash-backs étrangement placés, courtes scènes qui, comme dans une histoire parallèle, ne semblent se rattacher d’aucune manière à la chronologie déroulée). Le projet n’a profité que d’un budget dérisoire et Glodell a passé beaucoup de temps pour terminer son film. On peut donc croire, en premier lieu, que le réalisateur a manqué quelques coupes au montage. Ou bien, si l’on considère justement ce montage avec attention et si l’on ne néglige pas l’accident de moto qui vaut à Woodrow d’être blessé à la tête, les défauts que l’on a trop vite décelés deviennent les éléments d’une narration plus complexe qui n’a de cesse de jouer avec les fantasmes et les obsessions de son héros.

Par ailleurs, la singularité formelle du film, en dépit des critiques qui ont été faites, s’accorde tout à fait au récit, à ce va et vient entre réalité et cauchemar. Le grain de l’image, ses couleurs jaunâtres, l’aridité qui s’en dégage, mais aussi le jeu sur la profondeur de champ et la saleté ou la netteté des plans (obtenus notamment à l’aide de caméras bricolées intégrant un « mécanisme de mise au point déréglé ») recréent parfaitement l’ambiance d’apocalypse chère à Woodrow et Aiden. On retiendra donc surtout de ce premier film, par ses expérimentations techniques et par son esthétique, la volonté de composer un univers qui lui est propre. On retiendra aussi son énergie comme le souffle brûlant dégagé par un engin pyrotechnique.


Dvd paru le 4 septembre 2012 et édité par Zylo.
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